Europe, n°1058-1059 : Olivier Rolin / Gunther Anders

Peu d'auteurs français contemporains qui savent composer un monde d'une telle profondeur de champ. Bien peu qui possèdent un registre de thèmes et de langue aussi étendu. Très peu, enfin, qui s'aventurent aussi loin des schémas du roman traditionnel. Si son écriture est mobile («elle doit s'adapter à son objet», dit-il dans l'entretien qu'on lira plus loin), sa voix, très singulière, est presque immédiatement reconnaissable. Je laisserai aux écrivains et critiques qui ont accepté de participer à ce dossier le soin d'une approche ordonnée et systématique de quelques aspects de cette oeuvre foisonnante, me contentant d'en définir les pôles et d'en présenter les thématiques les plus importantes.

Les lecteurs nonchalants ont tendance à réduire l'oeuvre des écrivains à un ou deux romans-pour Olivier Rolin, Port-Soudan et Tigre en papier. C'est non seulement injuste, c'est aussi très réducteur, comme le prouvent les deux gros volumes de ses oeuvres complètes publiés il y a quelques années sous le titre générique Cirais.

On ne parle pas d'égal à égal avec un arbre : il oblige à lever la tête. Sans cette arrogance, d'ailleurs, qui caractérise beaucoup de choses élevées : il en impose, mais avec une majesté simple, sans apprêt, et comme légère, sans doute à cause de l'air qui le traverse.