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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un petit village de cases dans la forêt équatoriale au sud-est du Nigéria. Deuxième partie du XIXe siècle.

Okonkwo est devenu chef de clan à la force des poignets. Travailleur infatigable, il a voulu compenser la paresse de son père qui faisait de l'ombre à son orgueil. Société patriarcale d'agriculteurs, les Ibos cultivent principalement l'igname, le maïs et le gombo et fabriquent un vin de palme fort apprécié. Au cours d'entretiens avec les sages des tribus voisines, les hommes partagent la noix de kola après leurs palabres interminables.

Le respect des traditions, le culte des ancêtres et la communication avec les nombreux dieux sont indissociables de leur vie hiérarchisée. Les us et coutumes ainsi que les superstitions sont évoqués dans une première partie qui m'a fait instantanément penser à ces « rendez-vous en terre inconnue », à ces tribus qui vivent loin de la civilisation – où qu'elles soient dans le monde – mais qui, tôt ou tard, disparaîtront ou seront absorbées par les villes.

Depuis qu'un jour, pour respecter la vision du sorcier, Okonkwo tue le meilleur ami de son fils, qu'il avait adopté et qui comblait son ambition, sa vie va changer irrémédiablement : les anciens l'avaient dissuadé de cette exécution, son fils fuit le village, Okonkwo tue le sorcier par maladresse et est condamné à un exil de sept ans, toujours selon la loi tribale. La séparation devient inévitable à tous les niveaux. le village perd son chef, la famille est démantelée, les valeurs ancestrales prennent un coup dans l'aile et, pour ne rien arranger, des étrangers européens sillonnent le pays pour imposer leurs moeurs et leur religion.

Le début du colonialisme britannique désorganise l'ordre social, les missionnaires blâment les sacrifices humains – ces sauvages n'enferment-ils pas les nouveau-nés jumeaux dans des jarres pour les enterrer dans la forêt, ne font-ils pas appel aux incantations du représentant des dieux pour rendre la justice ? Ils dénigrent tout autant la polygamie, la violence entre clans, ridiculisent les coutumes ancestrales tout en vantant les merveilles des techniques et des outils européens qui facilitent la vie et apportent la richesse. Un dieu remplace tous les autres, il est bon et miséricordieux.

Les missionnaires sont rompus aux belles histoires de la Bible et les Africains adorent les contes.

Le titre du livre est extrait du poème de Yeats « The Second Coming » :
« Tournant, tournant en cercles toujours plus larges, le faucon n'entend plus le fauconnier. Tout s'effondre, il n'y a plus de centre. L'anarchie se déchaîne sur le monde »

Chinua Achebe est né en 1930 dans le Sud Nigeria, de parents chrétiens d'expression anglaise. Ses études universitaires le conduisent à travailler dans la communication (radio, rédacteur en chef, professeur d'anglais). Il voyage beaucoup en Afrique, en Angleterre et aux Etats-Unis. Il est professeur dans plusieurs universités. En 1960, le Nigéria obtient son indépendance mais n'évite aucunement les clivages ethniques et religieux. Chinua Achebe a toujours soutenu les sécessionnistes du Biafra (sa région natale) et il est le premier écrivain africain à raconter d'un point de vue africain les déboires de son peuple face à la colonisation.

Plusieurs fois, il a été pressenti pour recevoir le prix Nobel de littérature et les plus hautes récompenses dans son pays, prix qu'il a refusés en protestation à la politique dictatoriale du Nigéria.
Il est mort à Boston en 2013.

L'écriture de Chinua Achebe est très expressive et simple. le traducteur a gardé des expressions de la langue ibo, ce qui rend hommage à la culture de ce peuple et donne au texte une sonorité ardente et énergique.

Lecture attachante proposée par NastasiaB que je remercie vivement.
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Les peuples d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique qui ont eu la primeur, et l'immense et infini bonheur de voir de leurs propres yeux l'arrivée des Européens, ont eu le privilège, en même temps, d'assister à la fin d'un monde – celui qui rythmait leurs vies. En Indonésie, sur l'île de Bali, ils appelèrent cet épisode tragique du nom exotique de « Poupoutan » : la fin. (que Vicki Baum décrit dans son très beau roman « Sang et volupté à Bali », que je ne saurais trop conseiller, même si l'auteur, dans sa préface, considère la colonisation comme une oeuvre... « civilisatrice » !).
Le célèbre roman de Chinua Achebe décrit ici un épisode similaire de la colonisation, en pays Igbo, au Nigéria, et qu'il a choisi de nommer, sans exotisme cette fois, « Le monde s'effondre ».
Le monde qui s'effondre, la fin du monde, voilà la sempiternelle conclusion de la rencontre entre les si gentils missionnaires et soldats envoyés de l'Europe, et ces communautés villageoises de paysans et d'artisans disséminés alors sur la planète. Mais pour les colonisateurs, pour ces officiers qui deviendront généraux (aussi bien un monarchiste comme Lyautey qu'un républicain comme Gallieni, décrivirent de ce point de vue la colonisation, dans de nombreux rapports et mémoires), on parle plutôt de « pacification des tribus primitives » !
Alors, certes, la vie de ces communautés villageoises n'était pas rose, vivant selon des coutumes tribales parfois violentes et injustes, rythmées par des croyances magiques sinon religieuses, en tous cas irrationnelles, ce qui n'est pas toujours idéal pour les hommes, et encore moins pour les femmes. Ces sociétés étaient rarement « pacifiques », certes, mais cela donne-t-il le droit à une société technologiquement plus avancée et politiquement plus structurée, d'imposer sa religion toute aussi intolérante, sa civilisation toute aussi violente, et son économie, beaucoup plus spoliatrice et exploiteuse ?
Chinua Achebe montre un peu tout cela, en filigrane. L'essentiel du roman est la description de la vie au village d'Umuofia, les histoires qu'on se raconte, les relations entre les villages, jusqu'à l'arrivée de ces européens. Ces européens qui ne font pas partie de la fraternité humaine, non, car ils sont manipulateurs, dominateurs, deviennent vite des ennemis, mais un ennemi si puissant qu'on ne peut rien contre lui, ni le raisonner, ni le chasser.
[C'est précisément le cauchemar décrit par tant d'auteurs de science-fiction : la rencontre avec une civilisation venue d'ailleurs, technologiquement surpuissante, mais qui ne vient pas pour être amis, non, ils ne sont pas là pour boire un coup et manger quelques amuse-gueules, pour causer, jouer ou écouter de la musique, chanter et rire, non pas du tout.]
Ceux qui viendront auront de plus en plus des rêves de fortune (même si certains des premiers arrivant « blancs » étaient parfois de gentils explorateurs inoffensifs, hommes de science ou curés bienveillants), et ils viendront pour dominer, asservir, piller, et tuer ceux qui résistent.
Le cauchemar des romans et des films d'anticipation n'a pas été une fiction pour des millions d'êtres humains, ce fut le quotidien de la colonisation, et c'est peut-être la raison du succès mondial de ce roman d'Achebe.
Cependant, à mon avis, ce n'est pas le meilleur que j'ai lu sur ce thème, et j'ai trouvé quelques défauts au roman. Par exemple, à partir de l'arrivée des européens, Achebe dit des choses, là où je préférerais qu'il les montre. (Par exemple, il dit que les blancs ont amené avec eux un gouvernement, mais cela reste abstrait, il ne montre pas concrètement ce qu'est ce gouvernement). Alors que la vie des africains était montrée de manière très concrète dans la première partie, soudain tout cela devient très vague à partir du moment où les européens sont là. Et les considérations sur ces colons sont vagues, générales, il n'y a rien de concret, ou si peu. Ce livre est présenté comme un chef-d'oeuvre, d'où peut-être ma légère déception sur la fin.
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D'emblée, le style évoque une ambiance de conte. Une fable transmise par la tradition orale, telle qu'un griot aurait pu en égayer une assemblée au cours d'une veillée. le héros se dresse au coeur du récit, droit, puissant, courageux, figé dans ses certitudes d'autant plus ancrées en lui qu'il est le fils d'un homme peu méritant, à l'aune des valeurs des tribus nigérianes de l'époque que l'on situe au début de la colonisation.

Les coutumes tiennent lieu d'armature sociale, les luttes tribales réaffirment si besoin la suprématie de tel ou tel groupe, l'animisme tient la population captive sans qu'une quelconque remise en cause ne vienne troubler les traditions. Mariage, justice, maladie, obsèques, tous ces temps forts d'une assemblée sont décrites avec précision , conférant une dimension ethnologique au récit.


Il en va autrement dans la dernière partie du roman, lorsque les blancs viennent troubler l'ordre établi, brandissant le vrai dieu, incompatible avec les croyances jugées primitives.

Le style simple est en accord avec le message passé et donne une couleur authentique au récit. Mais il n'empêche pas une réflexion argumentée sur la religion lors de la confrontation des idées.

C'est le premier volet d'une trilogie dont hélas les tomes 2 et 3 ne sont pas traduits. Il est tentant de les lire en anglais tant on a envie de découvrir la suite et les conséquences de l'invasion des colonisateurs. Ou de supplier Actes sud de donner une chance à ces romans.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Dépaysant. Factuel. Dérangeant.

Je viens de refermer le livre de Chinua Achebe, dégusté à petites goulées comme un vin de palme un peu fort. J'en ai encore la tête qui tourne.

Lentement, je me suis imprégnée de la vie d'un clan nigérian, régie par des règles et des traditions tout à fait étrangères à notre mode de vie et de pensée, et évoquées avec une grande clarté, un souci de la réalité quotidienne, un détachement objectif qui, curieusement, leur confère une étrangeté plus grande encore.

Okonkwo, le chef de clan, le héros – ou plutôt le « sujet »- de ce livre, est un homme dur et intransigeant, brutal avec ses femmes, sévère avec ses enfants, et vétilleux sur l'observation des règles et des codes d'honneur auxquels doit se plier, s'il veut rester respecté , un homme « titré « comme lui de trois bracelets à la cheville.

Il lutte contre toute faiblesse : celle de la tolérance envers un père jouisseur et bon à rien auquel il ne veut en aucun cas ressembler, celle de la tendresse pour un enfant pris en otage à une autre tribu, auquel il s'est attaché comme à un fils et qu'il lui faudra exécuter, celle de la préférence pour une de ses filles, fragile et forte à la fois, qui lui ressemble et qui est le fils qu'il aurait voulu avoir, celle, enfin, de la clémence envers ces missionnaires blancs, venus implanter leur église au sein de leur village, et qu'il soupçonne d'être les signes avant-coureurs d'une sujétion et d'un anéantissement de tout ce à quoi il croit et obéit.

Ce n'est pas un homme sympathique. J'allais dire : il n'est pas là pour ça.

Jamais Achebe ne tire sur la corde sensible, ni même sur celle du récit romanesque qui nous permettrait une quelconque identification. Tout au plus quelques figures moins entières, plus humanistes s'attachent à nous quelque temps comme les grattons des fleurs de coton à une étoffe : des vieux qui ne craignent plus rien et voient la mort venir avec sagesse, des jeunes hommes en plein désarroi et surtout de belles figures de femmes- la première épouse d'Okonkwo, qui a perdu tous ses enfants sauf une, et cette enfant rescapée, justement, sa fille, Ezinma.

Okonkwo, lui, est là comme un jalon rigide - terrible et pathétique, sur la route inexorable du basculement, de l'effondrement total d'un monde.

Celui du monde tribal, avec ses rites, ses dieux, sa magie, ses superstitions, ses codes, sa cruauté parfois, face à la prise de pouvoir insidieuse, d'abord, et faussement joviale d'un Dieu qui accueille les jumeaux au lieu de les exposer aux bêtes sauvages, qui ouvre ses bras aux exclus , les « osus », et les traite humainement, bref qui sape allègrement, au nom de l'humanisme, tout ce qui faisait le tissu social millénaire de la vie tribale…pour laisser la place, bientôt, à des missionnaires moins tolérants, à une administration britannique autoritaire avec ses lois, ses codes, ses prisons, ses châtiments, ses exécutions…

A tout l'appareil colonisateur, sorte de machine à broyer l'Autre. Tous les autres. Ceux qui ne nous ressemblent pas.

Sans argumenter, sans plaider, sans trancher, simplement en laissant, pour une fois, le lion parler de la chasse et non le chasseur, Achebe nous fait toucher du doigt le saccage de la colonisation.

Même si nous trouvons les rites barbares, les superstitions ineptes, le machisme et le patriarcat insupportables, la longue et patiente première partie nous fait sentir et comprendre que ce monde tribal avait tout en lui pour évoluer à sa mode, sans fracas, et pour corriger lui-même ce qui nous paraît, en lui, injuste ou cruel.

Et que provoquer son effondrement en lui imposant des lois et des règles qu'il ne comprend pas, en lui prenant ses terres, en bafouant ses croyances et en ridiculisant ses dignitaires, ce n'est pas civiliser, c'est ajouter la violence à la violence, ce n'est pas éduquer, c'est vouer un peuple à se perdre en perdant ce qui fait le sel de sa vie : sa culture.

Un très beau livre. Qui n'a pas fini de m'interroger et de me faire réfléchir..
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« Tant que les lions n'auront pas leurs propres historiens, l'histoire de la chasse glorifiera toujours le chasseur ».

Avec Chinua Achebe, les « lions » du Nigeria pré-colonial ont trouvé leur historien. le lion, en l'occurrence, c'est Okonkwo, habitant du village ibo d'Umuofia. Valeureux guerrier dans sa jeunesse, il est aujourd'hui un homme mûr, bien établi, comptant trois épouses, huit enfants et une plantation d'ignames prospère. Dur à la tâche, machiste et brutal, il n'apparaît pas fort sympathique mais, respectueux des traditions, du culte des dieux et des ancêtres, il est autant écouté des sages du clan qu'il obéit lui-même envers et contre tout à la parole sacrée de l'oracle. Et lorsque celui-ci lui ordonne de tuer son fils adoptif bien-aimé, aucun commandement divin ni aucun scrupule n'arrêtera le bras exécuteur d'Okonkwo. Même si celui-ci ne paraît pas autrement affecté, ce drame semble bien être le premier grain de sable dans la dynamique séculaire des us et coutumes de la tribu, le premier des soubresauts qui mèneront à l'effondrement. En effet, quelque temps après cet épisode, Okonkwo tue accidentellement un jeune homme et est contraint à un exil de sept ans avec toute sa famille. A son retour au village après ces années de bannissement, les choses ont changé : les missionnaires et les colons britanniques posent les jalons du christianisme et de la bureaucratie de Sa Majesté. Un véritable choc des cultures, qui semblent vouées à ne pas se comprendre. Pourtant, peu à peu, certains se laissent convaincre par ces sirènes de la « civilisation ». D'autres sont indifférents ou se moquent de ces « albinos », et quelques-uns tentent de s'y opposer. Parmi eux – évidemment – Okonkwo qui, seul et jusqu'au bout, refusera de se soumettre. Et les derniers mots de son père prononcés des années plus tôt résonnent alors comme un présage : « Un coeur fier ne se laisse pas abattre quand tout s'effondre, car un tel échec ne l'atteint pas dans son orgueil. C'est beaucoup plus difficile et beaucoup plus douloureux quand on est seul à échouer ».

La première partie (les 2/3 du livre) ne comporte que peu d'action et consiste essentiellement en un récit à haute valeur ethnographique, où l'on en apprend beaucoup sur la vie quotidienne et les croyances des Ibos du Nigeria, à travers l'histoire d'Okonkwo, de son enfance à l'épisode qui cause son exil. La deuxième partie, beaucoup plus courte, porte sur la période transitoire pendant laquelle Okonkwo se reconstruit lui-même, ainsi que sa fortune. Dans la troisième partie, alors qu'il croit rentrer au village en quasi-héros, il s'aperçoit que les valeurs ont commencé à glisser. Les existences sont bouleversées, les traditions balayées par le rouleau compresseur de la colonisation, tout s'est accéléré, la catastrophe est imminente et la lutte vaine.

Tout s'effondre, un conte cruel, remarquable de par le point de vue à partir duquel il est raconté. Et, chose encore plus remarquable, écrit sans parti pris ni victimisation, dans une langue simple et imagée. Ce qui n'empêche pas de rester avec la question : de quel droit, de quelle légitimité une civilisation prétend-elle s'imposer à une autre ?
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Court roman qui montre l'effondrement de la culture ibo à l'arrivée des colons blancs à la fin du 19ème siècle. le lecteur suit Okonkwo, qui s'est construit dans l'opposition à son père, paresseux, imprévoyant et même, selon lui, lâche ; Okonkwo est promis à un bel avenir et à devenir un membre important d'un clan. Avec lui nous découvrons un peuple dont l'existence est régie par un ensemble de rites et de croyances rigides. Il est travailleur, courageux, et il suit les règles aveuglément, sans jamais les remettre en cause.... On sent la solidarité et la chaleur de cette société, malgré des éléments épouvantables selon nos critères actuels et une misogynie archaïque (à peine atténuée par le rôle des mères). le lecteur comprend le personnage d'Okonkwo, peut même parfois le trouver touchant, mais de là à pouvoir s'identifier à lui, c'est difficile tant il a un côté froid et distant en apparence, tant il peut être dur, violent et colérique. La peinture de cette société à la veille de la colonisation occupe les trois-quart du roman, elle est riche, détaillée et très fine, avec ce personnage à la personnalité complexes. C'est un témoignage inestimable (l'auteur parle d'une époque qui est probablement celle de ses grands-parents) Et la brièveté du récit consacré à l'arrivée et l'implantation des blancs accentue la rapidité avec laquelle ce monde s'effondre, en quelques années, sous les yeux effarés d'Okonkwo, réduit à l'impuissance devant la destruction des croyances et des traditions culturelles des siens. le lecteur voit littéralement un monde s'effriter, se déliter sous ses yeux dans les dernières pages. Certes, le monde détruit n'était pas un paradis (ou en tout cas pas pour tous ses membres), mais de quel droit le détruire de l'extérieur ? Qui sommes-nous pour imposer nos croyances ou porter des jugements sans rien connaître du contexte ?
Un roman très efficace pour montrer le choc culturel, bien plus parlant qu'un essai historique sur la colonisation.
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Nous sommes quelque part dans le sud est du Nigeria, juste avant la présence coloniale britannique. Nous suivons le parcours de Okonkwo, un chef de clan. A travers les rites tribaux d'un village Ibo. Toute la vie se déroule selon ces schémas pérennisés par les Anciens. On ne revient pas sur les traditions ancestrales. Les Dieux et l'Homme Médecine ont défini les lois. Certaines choses se font, d'autres pas. Et tout le monde s'y plie. Et la vie s'écoule tranquillement à travers les histoires de guerriers, d'épouses, de préparation des repas, de réunions d'anciens, l'exil... Cela pendant à peu près les deux tiers du roman. C'est une vision réaliste de l'Afrique pré coloniale. Puis arrivent « les Blancs ». Ils occupent déjà le delta du Niger et remontent peu à peu le fleuve. Il finissent par arriver dans les villages les plus reculés avec les missionnaires et les administrateurs. Sans vraiment toujours s'en apercevoir les villageois vont être progressivement acculturés et adopter les coutumes des « Blancs ». Seul, Okonkwo s'en rend compte et veut éradiquer la présence anglaise du village. Mais sa proposition ne fait pas consensus.
C'est un livre très documenté sur les coutumes traditionnelles de la société Ibo. On peut le voir également comme un document ethnographique. Et l'auteur sait magnifiquement et tragiquement nous faire assister au grignotage des terres et des traditions Africaines par les Européens.
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Très bien écrit, on est immergé dans ce village africain et on est témoins impuissants de l'injustice.
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« Tout s'effondre » se déroule dans un village d'une ethnie du Nigeria, les ibos, à la veille de la colonisation britanniques, à la fin du XIXème siècle. Okonkwo est le personnage principal de ce roman. A l'opposé de son père, un fainéant qui profitait de ses proches, Okonkwo se montre ambitieux et courageux. Son travail porte ses fruits. Il construit une ferme importante, prend trois épouses et arbore plusieurs titres de son clan. Lutteur redoutable dans sa jeunesse, il a gardé un esprit fier, épris de dignité, ne laissant aucune place au sentimentalisme. C'est un homme respecté qui participe à l'assemblée qui rend justice. Mais ce monde au sein duquel il a oeuvré si dur pour se faire une place est ébranlé par l'arrivée de missionnaires chrétiens. Si le dieu des Blancs est d'abord accueilli avec scepticisme et raillerie, l'Eglise s'installe progressivement et accueille ses premiers disciples.

C'est l'histoire d'un monde ancestral qui s'éteint. Si Okonkwo se révolte pour empêcher ce changement, la plupart des siens se résignent. Une civilisation en chasse une autre, sa religion remplace les anciennes superstitions, ses magasins importent des produits encore inconnus, son gouvernement impose des lois étrangères. L'ancien monde n'était pas sans défaut. Mais si certaines traditions étaient cruelles (des familles étaient bannies du village et si l'oracle condamnait un enfant, le petit se prenait deux coups de machette derrière les oreille), les clans formaient malgré tout une société patriarcale équilibrée reposant sur un socle de règles et de croyances.

Mon ressenti à la lecture de ce roman est plutôt neutre mais je lui reconnais trois mérites. Premièrement, c'est pour moi un éclairage sur une culture dont j'ignore tout, notamment du côté des cuisines où j'ai découvert l'igname, le vin de palme, le foufou et la noix de cola. Ensuite, j'ai apprécié les contes tirés de la culture orale, comme celui expliquant la présence d'aspérités sur la carapace de la tortue. J'ai enfin trouvé l'angle d'approche utile, la colonisation étant rendue du point de vue de l'autochtone. La perspective est appréciable quand on sait qu'en règle générale, « l'histoire est écrite par les vainqueurs. » Ici, une civilisation en supplante une autre en partie grâce à la violence armée mais aussi par des voies plus insidieuses. le Christianisme séduit par ses chants et les Européens par l'import de nouveaux produits. Des principes toujours valables de nos jours où notre monde s'universalise par le commerce, la culture et le divertissement.
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Okonkwo est un homme puissant du village ibo d'Umuofia : vaillant, sage et prospère, il pourvoit aux besoins de ses trois femmes et huit enfants et sa parole est respectée par la communauté. le monde dans lequel il vit est régi par des règles très strictes auxquelles chacun et chacune se soumet de son plein gré, c'est un ensemble cohérent ancré dans de profondes traditions et qui paraît immuable. Et pourtant, l'arrivée de missionnaires et des colons britanniques va mettre à mal cette société millénaire.

De sa plume, Chinua Achebe rend hommage à une Afrique précoloniale parfois cruelle mais autonome. Son style pourtant sobre rappelle celui des contes, dans chaque phrase revient le rythme d'une oralité qui fait échos aux propos de l'auteur. Aucun jugement dans sa prose, il ne s'agit pas de prendre position pour ou contre les systèmes qui régissaient la vie du peuple ibo avant l'arrivée du christianisme, mais de faire état de bouleversements traumatiques pour des peuples et des individus et de reconnaître la légitimité d'une histoire qui n'est que peu écrite et racontée. Alors à la suite d'Okonkwo on bat les sentiers, en étant tour à tour agacé, impressionné ou heurté, et l'on se fait lecteur d'un monde révolu à la réalité pourtant encore palpable.
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