" Nous sommes en guerre", c'est pour ça que le monde s'effondre, que tout s'effondre. Parce qu'on fait la guerre par le simple fait de dire qu'on fait la guerre. Parce que dire, c'est faire. La fonction performative du langage, c'est une phrase qui exécute l'action qu'elle exprime et l'action exprimée peut être une exécution au sens littéral du terme.
Si
Chinua Achebe écrit que le monde s'effondre, le monde s'effondre ou s'effondrera, l'action est enclenchée, le processus est lancé. N'ayez pas peur ... Même si le monde s'effondre, car " Tout va bien se passer".
Si tout se passe bien à la fin ( du monde), allons-y quoi !
Chinua Achebe nous présente dans son roman les rites et les coutumes du clan d'Okonkwo le guerrier, et il nous présente entre autres personnages la prophétesse ... La guerre et les prophéties, prophétiser la guerre, la fin du monde ... Cela ne présage rien de bon ...
Il faut se méfier des mots, car les mots sont puissants. Ils permettent de convaincre, de persuader, d'impressionner, de corrompre, de maudire, de semer la peur ou le doute dans l'esprit ... Heureusement, les mots ne sont pas toujours employés à mauvais escient, car ils peuvent prévenir, avertir, nous dire, justement, de faire attention aux mots ... La magie des mots est une puissante magie et c'est une magie qui est noire et/ou blanche qu'elle soit prononcée à haute voix ou écrite sur une page ...
La prophétesse n'est pas la seule à prophétiser dans le roman car nombreux sont ceux qui pressentent le danger, qui préviennent, qui avertissent les autres, de respecter, les coutumes, les dieux, afin de ne pas offenser les dieux, les anciens, le clan. D'aucuns avertissent et préconisent la guerre, afin de se défendre, et de protéger les traditions ancestrales. D'autres avertissent et découragent la guerre, afin d'éviter le massacre. Comment la fin du monde a-t-elle été enclenchée et par qui ? Il y a plusieurs responsables, il y a des responsables individuels mais la responsabilité est également collective (surtout au sein d'un clan). La fin du monde d'Okonkwo aurait-elle pu être évitée alors même qu'elle a été prophétisée ? Si on s'intéresse au personnage principal, à Okonkwo le guerrier, aurait-il pu s'empêcher d'accomplir l'action qu'on lui a défendue, celle de porter la main sur celui qui l'appelait père ? Alors même qu'en lui défendant ce geste, on appelait, peut-être, paradoxalement, ce geste, comme si l'on savait avant qu'il ait lieu, qu'il aurait lieu ?
La tragédie peut-elle être évitée alors même qu'on écrit une tragédie ?