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Milena Agus,romancière,et Luciana Castellina,essayiste et figure de la gauche italienne,raconte tour à tour un drame réellement survenu le 7 Mars 1946 à Adriana,dans la région des Pouilles en Italie,dans un roman publié tête-bêche.
Agus raconte l'histoire des soeurs Porro se glissant dans la voix de leur unique amie(?)qui les fréquente.Les soeurs Porro,riches propriétaires terriens vivent cachées dans leur "palazzo" au coeur de la ville d'Adriana.Alors que dehors,au lendemain de la guerre,le chômage et la misère atteignent des niveaux désespérants,les soeurs y restent indifférentes,n'entendent rien de la politique,ni de la famine.Le 7 mars 1946,sur la place centrale d'Adriana se tient un meeting communiste d'ouvriers.La foule rassemblée attend le chef syndical.Un coup de feu qui part du toit du Palazzo Porro va déclencher le drame,l'irréparable.
Luciana Castellina,elle,parcoure l'histoire de ces années-là,en insérant la mort dramatique des soeurs Porro dans le contexte de ce qu'il faudrait appeler "la guerre civile dans Les Pouilles,1943-1948".Une histoire quasiment inconnue dans le reste de l'Italie.
Le roman et l'histoire sont bouleversantes,d'autant plus que le drame des soeurs Porro n'était pas unique de son temps:"les massacres dans les Pouilles étaient aussi naturels que les grosses averses,mais juste un peu plus fréquent".Mais celle des soeurs Porro apparut comme la plus terrible,la plus incompréhensible.Ce mouvement de folie collective me rappelle le livre D'Elias Canetti,"Masse et Puissance",où il pose de multiples questions:Poussée d'irrationnel?Explosion d'un fond primitif mal avoué?Resurgence d'une panique collective jamais analysé?.C'est probablement tout ca à la fois.
J'ai d'abord lu le roman,l'histoire ensuite.Je ne sais pas si c'est la meilleure façon de le lire,mais en tout cas c'est un livre trés fort,trés réussi.
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Ce livre original comprend deux parties.
La moitié est un roman écrit par Milena Agus , à partir d'un fait divers dans la petite ville d'Andria. Quatre femmes, les soeurs Porro, vivent dans une somptueuse demeure, d'où elles ne sortent pratiquement jamais. Elles sont riches, très riches, mais "comme il faut", elles ont de bonnes manières, ne sont pas dépensières," il faut préserver le patrimoine", suivent les règles de leur classe sociale et font des dons pour les pauvres.
Et des pauvres, dans les Pouilles, à la fin de la seconde guerre mondiale, il n'y a pratiquement que ça! Des pauvres sans avenir, qui manifestent un soir sur la place devant la demeure des soeurs Porro. Un coup de feu éclate et l'inimaginable arrive. "C'était terrible, mais ça n'a pas duré plus d'une heure".

L'autre moitié du livre, écrite par Luciana Castellani décrit le fait divers du 7 mars 1946 à Andria en moins de sept pages. Elle développe par la suite, la situation des Pouilles à la fin de la guerre, " à l'époque du débarquement des alliés en Italie du Sud et de la dissolution du partie fasciste", quand des réfugiés affamés déferlent dans la région avec la faim qui se transforme en violence. "L'histoire de la région resta à part. Ici, la paix n'était pas arrivée, ici se poursuivait une guerre civile plus cruelle que la précédente".

Ce livre , très bien écrit, a le mérite de faire connaître la situation de cette région d'Italie à la fin de la seconde guerre.
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Pour une fois dans l'oeuvre de Milena Agus ce roman ne se déroule pas en Sardaigne mais dans les Pouilles. Cette originalité pour L'auteure est doublée par le fait que ce livre offre aux lecteurs une double lecture. Il y a le roman, et si l'on retourne le livre,on découvre un documentaire très complet écrit par Luciana Castellina, journaliste et écrivaine " figure de la gauche italienne". J'ai choisi de commencer par le documentaire pour bien m'imprégner du climat social et politique de cette région d'Italie en 1946 et avoir ainsi des éléments objectifs sur l'évènement qui fait l'objet du roman. Mais,chacun son choix! Tout est possible. Ainsi que le souligne M.Agus,la complexité de cette période où se mêlent les cicatrices de la guerre,la déception de ce qui en suit, la pauvreté extrême du peuple, l'émergence d'une révolte paysanne face aux propriétaires terriens,aurait pu donner matière à mille sujets de fiction. Elle a choisi l'intime en se penchant sur le microcosme des soeurs Porro,presqu'imperméables au chaos social qui les entoure. La narratrice est l'amie ambiguë de ces soeurs. Elle fait la chronique d'un drame prévisible... Bien qu'elle interroge l'injustice et la violence tout autant que les normes ridicules et alienantes, Milena Agus, à travers cette femme,prend plaisir une fois encore , à mettre en valeur un personnage à la marge qui vit davantage de ses rêves que dans l'acceptation d'un monde qui ne lui correspond pas. Lorsque le drame arrivé,il agit comme un révélateur pour cette femme : il faut agir,il n'est pas tolérable d'être simple spectateur,on doit contribuer à changer le monde.
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L'originalité de ce livre réside dans sa double entrée. Deux auteures italiennes ont travaillé sur un sujet commun, un fait divers ayant eu lieu dans les Pouilles en 1946. L'une est romancière, l'autre journaliste et figure de la gauche italienne. Il est possible de retourner le livre et de choisir par quelle partie l'on souhaite débuter sa lecture. Personnellement, j'ai commencé par le roman de Milena Agus car c'est son nom qui m'a fait acheté ce livre.

La partie de Milena Agus m'a vraiment emballée. L'ambiance du roman m'a beaucoup plu. Basé sur un fait réel que l'auteure a alimenté par son imagination, nous entrons dans la demeure des soeurs Porro située à Andria dans les Pouilles. le récit retrace le portrait de quatre soeurs cinquantenaires et sexagénaires. Luisa, Vincenza et Carolina sont restées ce que l'on appelait des "vieilles filles". Seule leur soeur Stefania fait figure d'exception en s'étant mariée sur le tard. Les quatres soeurs ne disent jamais de mal des autres, elles sont très à cheval sur la bienséance, charitables avec leur église, mais ne s'intéressent pas le moins du monde à ce qui se passe en dehors de leur villa.

Pourtant, l'Italie du sud est dévastée. Les soldats démobilisés meurent de faim dans les vignes des Pouilles et sur la place Catúma, chaque jour se dresse un véritable "marché de bras" où les journaliers s'amassent pour espérer trouver un travail à la journée. Un autre personnage féminin est présent dans le quotidien bien rangé des soeurs Porro. "Elle" leur rend visite régulièrement, ce sont ses amies. Mais "elle" a des convictions, elle est révoltée bien qu'elle n'agisse pas.

Le 7 mars 1946, sur la place d'Andria, un coup de feu est tiré alors que l'on attend le discours de Giuseppe di Vittorio, ouvrier agricole devenu secrétaire général de la CGIL (Confederazione italiana del lavoro). Tout semble indiquer que le coup de feu a été tiré de la villa des Porro. La partie de Lucia Castellina inscrit ce fait divers dans l'histoire générale de cette région italienne. Elle parle de guerre civile dans les Pouilles dès 1943 évoquant les différents conflits sociaux. Puis, elle nous informe sur les arrestations et sur le procès qui eut lieu deux ans plus tard en 1948. Plus d'une centaine de personnes arrêtées, pour la plupart analphabètes. L'exposé de Lucia Castellina était intéressant mais plus difficile d'accès pour moi, notamment en ce qui concerne la gauche et les différents événements politiques.

Pour résumer, j'ai beaucoup apprécié la première partie : le roman. Mon intérêt a ensuite été éveillé par l'explication qui replace dans le contexte historique général de l'époque. Mais ce passage purement historique m'a un peu perdue faute de connaissances personnelles sur le sujet.
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Nous sommes dans les années 1943-46 à Adria dans les Pouilles.
Milena Agus déroule dans la première partie du livre qui est un roman la vie dans leur Palais des soeurs Porro, une famille de riches propriétaires terriens.Elles vivent chichement, absolument fermées à ce qui se passe au dehors, au mécontentement qui monte chez les journaliers agricoles.Vincenza est leur amie, riche comme elles, mais rebelle, rêvant d'amour, sensible à la cause des travailleurs pauvres.
Dans une seconde partie,Luciana Castellena, journaliste et auteure, fait une lecture politique et historique des troubles qui secouent les Pouilles.
Le fait divers tragique qui frappe Andria en 1946 s'inscrit dans la lutte des classes .Avec la fin de la guerre et du fascisme , un immense espoir de justice naît dans la tête des ouvriers agricoles…
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J'ai longuement hésité : que faut-il lire en premier ? le roman ou l'histoire brute ? J'ai opté pour le roman. Et c'est la partie que j'ai préférée.

L'histoire brute est trop succincte, traitée froidement, et avec des références politiques locales qui m'ont échappées.

Le roman, qui s'attache aux personnages des soeurs, m'a plu. Leur enferment dans un autre siècle, leur appartenance à une lignée qui ne fait rêver plus qu'elles, leur aveuglément sur ce qui se passe dans le village.

Les deux auteurs ne s'attardent pas sur la violence déchainée ce soir-là et le sort réservé à deux des soeurs.

L'image que je retiendrai :

Celle des draps et des affaires stockés dans les innombrables placards de la propriété et qui ne servent jamais.
Lien : http://alexmotamots.fr/?p=1908
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La narratrice appartient à une famille aisée et a dû faire un mariage de raison avec un homme âgé de plus de 30 ans qu'elle. A 50 ans passé, elle regrette n'avoir pas su dire non, n'avoir pu se rebeller contre ses parents et n'avoir pas connu l'amour qu'elle n'a vécu qu'en imagination. Sa révolte, elle la crie cependant aux soeurs Porro, du même milieu qu'elle, mais restées vieilles filles et ne vivant que pour Dieu, jamais ne se rebellant. La population affamée n'aura pourtant pas pitié d'elles... Un roman très court et bien écrit, retraçant la condition de la femme au début du 20ème siècle et qui permet de poser des questions. Peut-on réellement changer les choses ? Les inverser peut-être mais sans pourtant vivre dans un monde idéal...
Dans une deuxième partie du livre, on a le récit purement historique de ce qu'il s'est passé.
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C'est une idée originale et intéressante : le livre se compose en fait de deux opus disposés tête bêche, qui se complètent et s'illustrent mutuellement. L'un, article de 79 pages est écrit par une journaliste italienne, communiste entre 1947 et 1969, parlementaire en Italie et au Parlement européen. Elle relate avec méticulosité et mise en perspective des faits qui se sont passés dans les Pouilles après la chute de Mussolini. Les mouvements sociaux qui opposèrent grands propriétaires et ouvriers agricoles, syndicalistes, s'accompagnèrent de violences. Un fait divers tragique se produisit sur la place de la ville d'Andria le 7 mars 1946. L'historienne analyse les faits et les replace dans leur contexte post-mussolinien,, alors que les partis politiques (PCI, PSI) et les syndicats se reconstituent.

De son côté, la romancière, Milena Angus, raconte l'épisode sanglant vu par « Elle », personnage inventé, témoin de son époque. « Elle », la rebelle, voudrait que le pape considère comme hérétique toute personne qui ne refuserait pas de devenir soldat... Elle assiste aux événements tragiques qui se produisent lors du meeting de di Vittorio, antifasciste très écouté. Trois vieilles filles vivent repliées dans leur palais historique, entre serviteurs dévoués et activités paisibles et religieuses. Elles font des dons substantiels à l'Église pour les pauvres. Mais il ne leur viendrait pas à l'idée de « donner » au syndicat, aux ouvriers. Elles suivent la tradition de leurs pères, figées dans une société et des pratiques traditionnelles, totalement étrangères à l'évolution du monde. Généreuses, bienveillantes, enfermées, elles ne peuvent imaginer ce qui va se produire quand, alors qu'une émeute naît sur la place de la ville, un coup de feu part, soi-disant du haut de leurs toits, en direction des manifestants.

Le roman, tout en s'appuyant sur le contexte social de l'époque, donne chair aux événements de ce jour de violences inutiles, en brossant le portrait de femmes inoffensives qui font les frais d'une lutte des classes renaissante.
Une idée intéressante que celle de croiser les regards portés sur une même période et les mêmes faits, celui de l'historienne et celui de la romancière engagée.
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Deux livres en un, un roman et un essai historique. Au coeur de tout cela, les Pouilles dans les années 40, à la chute du fascisme. La pauvreté, la faim et l'injustice, vecteurs de pics de violence extrême. Luciana Castellina raconte cette Guerre des Pouilles, méconnue, oubliée, tandis que Milena Agus raconte un fait divers fou, exemplaire de cette période sous tension. Deux textes complémentaires.
Lien : http://appuyezsurlatouchelec..
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Le titre original de ce livre à double figure parle de lui-même : « Prends garde à ma faim » (traduction toute personnelle !). En 1946, l'Italie et en particulier la région des Pouilles, a du mal à se sortir de la guerre. Les ouvriers agricoles n'ont plus de travail, leurs familles meurent de faim, les propriétaires terriens retranchés dans leurs villas ne leur prêtent pas attention.
Sans doute en est-il un peu de même pour les soeurs Porro, trois vieilles filles et une quatrième qui s'est finalement mariée à l'approche de la quarantaine. Elles donnent pour les bonnes oeuvres de l'église, ont donc la conscience assez tranquille, et elles n'imaginent pas vraiment, tout à leur souci d'économie domestique, que les pauvres habitants de leur village n'ont absolument plus rien pour subsister. Elles seront victimes de cet aveuglement inoffensif.
Le principe, très original, de ce livre, est de donner la parole sur un même sujet, à deux auteurs : une romancière, Milena Agus, imagine ce que l'histoire n'a pas rapporté de la vie des soeurs Porro. Elle choisit le point de vue d'une de leurs amies. C'est peut-être ce point qui me paraît le plus discutable, et à la fois le plus intéressant, d'avoir choisi de se focaliser sur une personne que l'histoire n'a pas retenue, qui est sensiblement différente dans sa psychologie, plus délurée que les victimes, et assez naïve pour ressentir un besoin d'explication aux événements. J'imagine que cet éclairage de l'histoire porte bien la marque de Milena Agus, mais ce sera à vérifier car c'est la première fois que je lis cette auteure. J'ai suivi avec intérêt ce versant de l'histoire, celui par lequel j'ai commencé.
La deuxième face du livre comporte le texte de Luciana Castellina, une historienne qui replace la dramatique journée de mars 1946 dans son contexte historique. Bien souvent, à la fin d'un roman, je cherche à en savoir plus sur les tenants et les aboutissants exacts de faits relatés par un auteur de fiction. Pourtant, ce prolongement attendu ne m'a pas enthousiasmée outre mesure, et j'avoue l'avoir terminé en diagonale. Mon co-lecteur pour ce livre a d'ailleurs fait la même chose, alors qu'il est, plus que moi, porté sur la lecture d'essais historiques.
Finalement, j'ai été surtout intriguée par l'écriture du roman, par la manière dont on prend un fait réel pour en faire de la fiction. Je pense lire à l'occasion un autre texte de Milena Agus, pour voir si son univers me convient. Je viens de lire plusieurs romans italiens contemporains, deux dont je vous parlerai bientôt, et je compte bien continuer ainsi la découverte !
Lien : https://lettresexpres.wordpr..
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