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Un homme au regard acéré et bienveillant..
Quand on croise la couverture de ce livre, on est immédiatement attiré par la présence et la majesté de cette figure musulmane d'un temps passé, portant turban et Légion d'honneur.

J'ai feuilleté et je n'ai plus lâché.
L'enquête relatée par Mohammed Aïssaoui est passionnante et aussi frustrante pour le lecteur qu'elle a du être pour l'auteur. Le temps a passé, il ne reste que des fantômes, et il est bien difficile de trouver des preuves de l'aide apportée à la communauté juive par le recteur de la Grande Mosquée de Paris sous le régime de Vichy.
Kaddour Benghabrit a été cet homme là, dépassant les clivages de religion pour user de son influence d'homme de pouvoir et de réseaux dans un sauvetage humanitaire discret. Un homme complexe et controversé, brillant et cultivé, mondain et séduisant, dont la personnalité se dessine peu à peu à travers les rencontres et entretiens.

Une personnalité de premier plan aux gestes d'aide et de soutien trop discrets puisque que non reconnus. Des souvenirs épars, des traces infimes en documentation mais aucune preuve qui aurait pu permettre à un musulman de devenir "Juste parmi les nations". Le travail de recherche de l'auteur nous dessine en creux une vingtaine d'années autour de la guerre de 40, les positions peu connues des musulmans avec le contexte du conflit et la vie propre de la Grande Mosquée de Paris.

Dans notre époque si tourmentée, cette image d'un musulman aidant un juif a valeur de symbole de paix et de fraternité.

( prenez le temps visiter la Grand Mosquée, c'est un lieu insolite au coeur de Paris. Dans un coin tranquille du jardin, on y trouve la tombe de Kaddour Benghabrit)
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Pourquoi n'y-a-t-il aucun arabe ou musulman de France et du Maghreb parmi les Justes ?
Voilà la question que s'est posée Mohammed Aïssaoui et à laquelle il a tenté de répondre dans ce très court ouvrage.
Il s'intéresse alors à la figure de Si Kaddour Benghabrit fondateur de la Grande Mosquée de Paris, figure qui va lui servir de fil rouge durant toute son enquête. Car la légende prétend que la Grande Mosquée aurait servi à abriter plus de 1700 personnes durant cette période obscure de l'occupation allemande.
Documentaires vidéos, archives, témoignages sont les matériaux sur lesquels se base Mohammed Aïssaoui. Cela semble prometteur et pourtant … Les documentaires sont trop peu nombreux sur le sujet et n'ont pas suscité d'intérêt qui aurait permis des enquêtes plus approfondies. Pis ! Les témoins auxquels ils font référence sont aujourd'hui disparus. Il faut retrouver leur famille, des descendants, des proches susceptibles d'apporter leur pierre à l'édifice. Malheureusement, soit on ne trouve personne, soit elles ne savent rien, soit elles refusent de parler.

Petit à petit toutefois, Mohammed Aïssaoui glane quelques informations, quelques anecdotes, qui à défaut de prouver ce qui reste pour l'instant des rumeurs, montre que oui, Si Kaddour a aidé des juifs qui lui avaient demandé sa protection.
Par sa position de diplomate, l'homme avait le bras long et ses interventions ont été salutaires. Son entreprise de récupération de l'hôpital franco-musulman de Bobigny qui était tombé aux mains des allemands a permis de sauver nombre de gens. En effet, l'hôpital et son personnel était un maillon de la Résistance et ont délivré faux papiers et faux certificats permettant ainsi à plusieurs personnes d'échapper à la gestapo.
Mohammed Aïssaoui rencontre également des personnalités et c'est ainsi qu'il nous livre l'histoire des parents de Philippe Bouvard. On croise aussi celle du roi Mohammed V dont la volonté affichée de protéger la communauté juive de son royaume n'est plus à prouver. Et pourtant, aucune trace de lui parmi les Justes.

Pourquoi de tels « oublis » ? Et pourquoi ces réticences face à la démarche de Mohammed Aïssaoui ? Pourquoi cette minimisation de l'action de Si Kaddour par ses successeurs ? L'homme avait semble-t-il de nombreux détracteurs au point d'être accusé de collaboration.
Car, des arabes et des musulmans collabos, il y en a eu. Pour preuve la création de cette légion SS musulmane et de la Brigade nord-africaine très liée avec la Gestapo.

Voilà un petit livre utile qui m'aura appris beaucoup de choses encore une fois sur cette sombre période. Mohammed Aïssaoui rend bien compte de la difficulté du devoir de mémoire confronté à la progressive disparition des témoins, à cette obstination du silence, à ces sources qui se contredisent.
On ressort de la lecture aussi frustré que notre enquêteur. Tout comme lui, on espère trouver les preuves irréfutables, le témoin qui fera toute la lumière. Mais on doit se contenter de ce qu'on trouve.
Petit bémol : la présentation qui suit certes l'enquêteur au fil de ses rencontres mais donne une impression de fouillis. J'aurais aimé quelque chose de plus construit.




Lien : http://0z.fr/H_9Pj
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Au-delà de la vitalité de l'ouvrage, qui tient à la volonté louable de l'auteur d'accorder une place centrale aux témoignages, les recherches autour de Kaddour Benghabrit se présente sous la forme d'un «carnet de notes» s'apparentant à une sorte de «fourre-tout» mémoriel, et sensoriel. le lecteur, qui au fil des pages, suit l'enquête de M. Aïssaoui, partage avec lui ses interrogations, s'égare à son tour -et parfois, avec beaucoup de déception-, mais les transitions entre les témoignages, les pistes ne sont pas toujours claires. Les réflexions méta-textuelles sur la difficulté de la mission, et sur la conservation de la mémoire - dont on se demande si ce n'est pas là l'un des véritables sujets du livre - noient le travail d'investigation sous des confidences personnelles, parfois ingénues, souvent «anecdotiques, mais intéressantes». Se dégage de la lecture de cet ouvrage, une «impression floue» qui ne saurait satisfaire le lecteur curieux, ou tout simplement pragmatique qui referme la dernière page, constatant que sur le fond (la reconnaissance officielle d'Arabes dont Kaddour Benghabrit comme Justes parmi les nations), l'enquête n'aboutit à aucun résultat tangible. On pardonne au journaliste engagé. On comprend la faiblesse de ses moyens. On rêve même que cet ouvrage «ouvert» s'enrichisse de contributions extérieures, que celui qui le lit «devienne témoin à son tour», avant de réaliser, en toute modestie, que pour soi, l'apport de «L'étoile jaune et le croissant» (très beau titre par ailleurs) est multiple, et viscéral.

Un grand merci à Babelio, et aux éditions Gallimard pour l'envoi de ce livre dans le cadre de l'opération «Masse critique» d'octobre 2012.
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Une formidable enquête sur les traces de Kaddour Benghabrit, ancien Recteur de la Grande Mosquée de Paris. Ce Musulman aurait, selon de nombreux témoignages, protégé des Juifs pendant la Seconde Guerre Mondiale en les cachant entre les murs de cette oasis située en plein 5ème arrondissement. Et pourtant, il ne fait pas partie des 23 000 "Justes parmi les Nations" reconnus par Yad Vashem. Aucun Arabe ne figure d'ailleurs dans la liste…comment est-ce possible ?

C'est là tout l'objet de l'enquête de Mohammed Aissaoui, journaliste au Figaro Littéraire : répondre à cette question et enquêter sur Kaddour Benghabrit, cet homme au grand coeur, ambigu, qui vivait dans le faste, aimait les femmes, la culture, la musique. Qui était réellement Kaddour Benghabrit ? Un imposteur ? Un héros ?

Une entreprise difficile dans laquelle le journaliste essuie plusieurs échecs, vole d'archives en archives-qui se révèlent de véritables mines d'or, d'incroyables richesses inexploitées; les témoignages s'enchaînent, se contredisent, les pistes se brouillent, mais il reste confiant. Son enquête avance au rythme de ses découvertes, d'émouvants témoignages, comme ceux d'Elie Wiesel ou encore d'un Philippe Bouvard que nous découvrons sous un nouveau jour. Nous suivons avec intérêt cette enquête, les avancées pas à pas du journaliste, véritable détective de la mémoire, nous nous réjouissons avec lui de ses découvertes et vivons avec lui ses désillusions.

Le style journalistique se prête tout à fait à ce format.

Ce livre est également l'occasion de réfléchir à ce conflit qui déchire les Juifs et les Musulmans. Réhabiliter la mémoire de ces Musulmans qui ont sauvé les Juifs, reconnaître leur rôle pendant l'Holocauste, serait, qui sait, peut-être un premier pas vers la réconciliation.

Et au sujet du rôle de Benghabrit: s'agit-il de rumeurs ? de faits avérés? Je vous encourage à lire ce livre pour le découvrir !
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J'ai lu ce livre ,pourquoi ne pas le dire,avec souvent ,des larmes au bord des yeux , avec une émotion pour l'histoire racontée, mais aussi, pour cette émotion de l'auteur que l'on sent courir tout au au long de son texte.
Ce livre est d'abord une enquête dans un passé, pas si lointain, mais déjà difficile à cerner. J'avais moi-même ressenti exactement les m^me sentiments lors de ma plongée dans les archives de Genève et d'Aix en Provence à la recherche de l'histoire de ma famille paternelle pour l'écriture de mon premier livre : "Algérie, Algérie Que me veux-tu?"
Ce que l'auteur dit des archives:"On oublie que les archives ne sont pas que des bouts de papier, elles sont faîtes de sueurs, de larmes et, parfois, de sang. Il faudrait prendre le temps de lire en profondeur, une a une, ces vies, les raconter" comme je le comprends et comme je l'ai ressenti!
Toujours a propos des archives cette phrase que j'approuve entièrement: "Je crois que plus un pays est libre, plus sa volonté de préserver la mémoire est grande...Un pays libre n'a pas peur de son passé."
Mais ce livre n'est pas une réflexion sur les archives et le temps passé il est une enquête approfondie pour savoir si, comme cela a été souvent dit, la Grande Mosquée de Paris a aidé a sauver des juifs pendant l'occupation. La Grande Mosquée de Paris a cette époque était dirigée par le recteur Si Kaddour Benghabrit. Enquête passionnante qui nous fait faire connaissance avec ce personnage intéressant mais dont on ressort un peu frustré car aucune réelle certitude n'est établie. On se passionne (j'ai lu ce livre d'une traite a sa réception) pour cette enquête.
Enfin, en ces temps, ou une certaine forme de l'Islam donne une image tellement mauvaise, je suis sûr que beaucoup partageront le souhait très émouvant de l'auteur de voir un jour, le Mémorial de Yad Vashem consacrer un Arabe comme Juste entre les Nations:Mohamed V,Si Kaddour Benghabrit, Ahmed Somia, Abdelkader Mesli, Mohammed Benzouazou, Ali Zitouni, Ali Sakkat, Khaled Adul-Wahab, Moncef Bey
Lien : http://jpryf-actualitsvoyage..
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Merci à Babelio et aux éditions Gallimard pour l'envoi de ce livre.
Le cas de Si Kaddour Benghabrit est compliqué. Pas tant à cause de récits contradictoires sur sa personne, mais parce qu'il y a très peu d'écrits le concernant. Pas même à la Grande Mosquée de Paris dont il fut pourtant le fondateur et le recteur de 1926 à 1956, année de son décès.
Pourtant, il pourrait être le premier Arabe à figurer parmi les 23000 noms des "Justes parmi les nations", ce qui n'est pas tout à fait rien. Un dossier à son nom est ouvert à Yad Vashem, mais aucune pièce n'est venue le défendre. Alors que des témoins encore vivants peuvent être interrogés. Qu'un reportage et un film lui sont consacrés (le premier de 1991 et dure 30minutes environ ; le second, Des Hommes Libres avec Mickael Lonsdale, dont il fut moins question des Des Hommes et des Dieux). Il semble n'etre qu'une ombre en arrière-plan, malgré son statut et son poste.
Aissaoui se lance donc dans une quête, celle d'un homme du 20ème siècle avec paradoxalement moins de matière que pour l'esclave Furcy. La forme de l'ouvrage n'est donc pas la même, elle est beaucoup moins narrative, beaucoup plus personnelle.
Pour ce personnage, sur ce sujet des Justes, il a pu interroger des enfants de rescapés, d'imams résistants, voir quelques maigres archives. Il a choisi non pas de nous raconter une histoire, mais de nous montrer son journal d'enquete, les différents témoins qu'il a pu rencontrer. le ton est beaucoup plus personnel, lui-même regrettant le peu de traces qu'il a de sa famille.
La conclusion reste ouverte. Nul ne sait si Si Kaddour Benghabrit sera nommé Juste. Lui ou un autre des Arabes résistants et philosémites dont il a retrouvé la trace. Ce qui serait un geste de justice et d'amitié.
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Pourquoi n'y-a-t-il pas d'Arabes parmi ceux que l'on appelle les « Justes parmi la nation »? C'est la question que se pose l'auteur de l'étoile jaune et le croissant, Mohammed Aïssaoui.
Ce livre s'apparente à un carnet de route, de notes, celui qu'on rempli jour après jour au fil de nos découvertes. Ici, le sujet est important, même si la question de départ ne trouve pas forcément de réponse. A travers ses recherches, l'auteur propose des pistes, notamment en ce qui concerne le directeur de la Mosquée de Paris, Si Kaddour Benghabrit. Cet homme aurait en effet eu un rôle important auprès des Juifs en fuite lors de la seconde guerre mondiale. Pas à pas, on découvre des témoignages, des archives, qui attestent (ou non) de ce rôle. Plus largement, l'auteur nous propose ses réflexions autour de la question des relations ambigües entre les Arabes et les Juifs, et sur la mémoire. Celle que l'on conserve bien au chaud au sein de nos archives, mais aussi celle de chacun d'entre nous, qui parfois se perd pour nous laisser sans réponse. La France est un pays où l'on a la chance de bénéficier de nombreuses sources d'informations papiers. Mais en ce qui concerne les témoignages, ils sont souvent plus difficiles à trouver, car pourquoi parler de son histoire si personne ne vous demande de la raconter? Est-ce trop tard maintenant?
Ce sont autant de questions que se pose l'auteur. Et même si certaines ne trouvent pas de réponse, il espère, tout comme la lectrice que je suis, qu'un jour elles seront résolues, et que parmi les 23 000 « Justes parmi la nation » apparaitront des noms d'Arabes ayant oeuvré pour la survie de Juifs lors de l'Holocauste. A lire!
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La personnalité qui m'a le plus intéressé est Si Kaddour Benghabrit (c'est lui qui apparaît sur la couverture du roman), le chef de la Grande Mosquée de Paris de 1926 à 1954 qui aida plusieurs juifs à échapper à la Gestapo. Vu comme ça, on pourrait l'inscrire directement sur la liste des Juste parmi les Nations mais ce n'est pas aussi facile. L'auteur va en faire l'expérience. En France et en Israël, il va éplucher les archives de nombreuses institutions, cherchant des preuves tangibles de cette aide. Comme lui, on sent qu'il existe un papier, quelque part, qui permettrait de prouver clairement que Si Kaddour Benghabrit a aidé ses compatriotes juifs mais impossible de mettre la main dessus. On sort terriblement frustré de ce petit livre, se disant que certaines fois, les gens sont des idiots qui ne se rendent pas compte de la valeur de leurs possessions.
J'ai aussi aimé ce livre parce qu'il pose la question de la mémoire. Souvent, lorsque l'on perd un/une aïeul, on se rend compte qu'on ne sait pas grand-chose sur elle. C'est ce que fait remarquer l'auteur concernant la Shoah et l'Occupation allemande en général. Les survivants ont tellement voulu oublier, les enfants ont tellement eu peur d'en parler que maintenant, nous les petits-enfants, on se retrouve devant des murs infranchissables pour tenter de se souvenir. Les survivants meurent les uns après les autres, certains sans jamais avoir raconté leur histoire, leur horreur et si personne ne leur demande de parler, tout finira par s'oublier. Cette thématique est valable pour tous les conflits, toutes les horreurs du XXe siècle et ça m'effraie. L'auteur touche quelque chose de sensible et qu'on oublie trop facilement : quand il n'y aura plus personne pour nous « La dernière fois, ça a commencé comme ça. », qu'est-ce qui nous empêchera de refaire les mêmes erreurs ?

Un livre magnifique et terriblement frustrant qui pose une question importante pour les générations futures, celle de la mémoire.
Lien : http://leslecturesdeollie.bl..
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S'il y a bien une question que je ne me suis jamais posée, c'est de savoir si parmi les « justes parmi les nations » y figuraient des musulmans, des arabes, des japonais ou bien des inuits. A vrai dire, j'avoue que finalement jusqu'alors je ne savais pas exactement en quoi consistait cette distinction, hormis le fait qu'elle était décernée à des personnes agit de façon positive envers un ou des juifs durant la Seconde Guerre Mondiale. J'ignorais par exemple que la personne devait avoir agi au péril de sa vie. Mais là n'est pas le sujet principal de ce livre, même s'il a tout de même son importance.

Le sujet, c'est cette quête que va mener Mohammed Aïssaoui pour essayer de comprendre pourquoi aucun musulmans de France de fait partie des 23000 noms, alors que certains d'entre eux ont été d'une aide très précieuses pour des dizaines de juifs.

Cette enquête va prendre forme au coeur même de la Mosquée de Paris, qui fut dirigée à l'époque par Si Kaddour Benghabrit. de nombreux témoignages affirment que le recteur de la Mosquée aurait sauvé et protégé de nombreux juifs afin de leur éviter la déportation. Que ce soit en les cachant dans la mosquée même, en leur aidant à obtenir de faux papiers attestant qu'ils sont musulmans, ou par des actions plus… originales, pourrait-on dire.
Oui mais, quand aucun document écrit ne vient confirmer les dires, quand au coeur même de la mosquée les archives se font rares voir inexistantes, et que l'actuel Recteur hésite lui-même à parler du rôle de ce lieu en temps d'Occupation, comment corroborer tout cela ? Comment apporter un dossier afin de faire reconnaître Si Kaddour ou un autre musulman comme « juste parmi les nations » ?

Alors, Mohammed Aïssaoui va devoir chercher. Parmi les témoins encore vivants, ou plus souvent les fils ou filles de témoins. Et si certains ne se montrent pas avares en paroles, d'autres se montrent plus réticents à parler, ou tout simplement ne savent pas, car ils n'ont jamais osé ou voulu demander à leurs parents de raconter. Pour le journaliste, c'est une frustration qui va bien au-delà du simple cas de Si Kaddour, puisque ce sont autant de témoignages oubliés dans le futur. D'une certaine manière cela est vrai, mais comme il reconnait lui-même, il y a des choses qui ne peuvent pas se raconter, qu'ils n'ont pas voulu dire de peur de ne pas être compris, tant c'est douloureux. le devoir de mémoire est une chose utile, quelque chose à cultiver, mais loin d'être aussi évident que ce que l'on pourrait croire.

L'auteur va également chercher des informations dans les archives, un peu partout en France. Entre les Renseignements généraux, les archives nationales, les bibliothèques… M. Aïssaoui n'a de cesse de dénicher la moindre petite information, le moindre billet, la moindre lettre pouvant l'aider à mettre en avant les actes commis par Si Kaddour, mais également par d'autres musulmans de France. Il va se trouver confronter à des documents mettant en avant les travers de ces hommes. On découvre ainsi que la vie de SI Kaddour n'a pas été exemplaire en tout point de vue et que certains de ses faits et gestes durant la Guerre ont été controversés, notamment dans les années d'après-Guerre. le recteur s'est même vu qualifié de collabo. Or des musulmans collabo, il y en a eu quelques uns, tels que Amin al Husseini, mufti de Jerusalem qui se serait bien vu en tant que grand instigateur de la solution finale envers les juifs au Moyen-Orient (je pense que cette simple phrase démontre parfaitement l'était d'esprit de l'homme). Il y a également eu cette légion SS constituée uniquement de musulmans. A travers ces exemples de collabo et de musulmans anti-juifs, le journaliste a à coeur de mettre en avant cet antagonisme entre ces deux peuples pourtant si proches l'un de l'autre, et qu'il juge tellement abscons.

De cette enquête, M. Aïssaoui en ressort frustré car pour le moment rien de concret en est ressorti. Et on peut le comprendre. Mais le dossier est loin d'être refermé, il a même ouvert de nouvelles voies qui méritent d'être explorées, et l'on peut penser qu'un jour où l'autre figurera parmi les « justes » un musulmans de France.

Je dois avouer qu'en entamant ce livre j'avais une crainte : celle de me retrouver face à un ouvrage qui se contente de dire « c'est pas juste, nous les musulmans on a été oubliés, pourtant on a tous été exemplaires ». J'ai donc été agréablement surprise par ce petit livre.
Parce que Mohammed Aïssaoui établit un vrai travail de recherches et qu'il n'hésite pas à pointer les actions positives comme les plus néfastes.
Et parce que sa réflexion va bien au-delà du fait d'être reconnu en tant que « juste », mais aborde des sujets complexes tels que le devoir de mémoire ou encore la relation difficiles entre les peuples juifs et musulmans.
Enfin parce qu'il est instructif, tout simplement.
Lien : http://desliresdestoiles.wor..
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La démonstration que Si Kaddour ben Ghabrit fut un "juste parmi les nations" n'est pas établie dans cet ouvrage.
J'en ai effectué une lecture attentive et une critique argumentée :

http://etudescoloniales.canalblog.com/archives/2012/11/07/25527218.html

Michel Renard
professeur d'histoire, chercheur
co-auteur de "L'histoire de l'islam et des musulmans en France", Albin Michel, 2006.
Lien : http://etudescoloniales.cana..
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