L'art des vers est sans doute le plus difficile, le plus émouvant, le plus caché aussi de tous les arts. Voltaire a écrit des milliers de vers, parmi lesquels il ne s'en trouve pas un qui soit beau.
Aucun homme ne pense jamais que sur les pensées d'un autre, et cette méthode est visible dans les plus profonds comme dans les plus ambitieux. Les premiers prennent ce qui leur est bon et poussent avant. Les autres rejettent beaucoup et quelquefois tout, par la méthode de réfutation propre aux avocats.
Il est vrai que celui qui veut instruire doit d'abord croire qu'il peut apprendre ; mais il est bien plus pressant que celui qui veut instruire croie qu'il peut instruire. Le certain regard, tout à fait sans amour, qui prononce que l'auditeur est un sot, est ce qui rend sot.
On peut chanter très bien et ne rien dire ; on peut très bien dire et ne pas chanter.
Tous les beaux vers sont réguliers. Non que le sens se plie à la règle ; mais toujours est-il que la règle n'a point cédé ; et par cette obstination même, le sens s'est montré. C'est qu'il faut deux vérités, en quelque sorte, pour en faire une, vérité de la chose, et vérité de l'homme ; et il faut que ces deux vérités n'en fassent qu'une.
L'art d'écrire précède la pensée
Le vrai langage nous prend au corps, non à l'esprit ; ou plutôt il va à l'esprit par voie indirecte. "Cela m'importe, et je n'en puis douter, car cela me remue. Mais qu'est-ce que c'est ? Que veut dire ce signe étrange, ce signe chargé de sens" ? Tout signe est énigme.
Ici naît l'attention véritable. Car, aux signes bien clairs, nul ne fait attention.
Je me défie de la prose qui dit des choses vraies. Il n'est pas difficile de dire des vérités; il s'ouvre un désert de vérités.
Et que faisons-nous d'autre, sinon d'aller toujours de trop penser à trop peu penser?
Il vaut mieux ne pas penser que penser hors de soi.