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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Pourquoi écrire un roman ?
Feurat Alani est un journaliste spécialiste du Moyen-Orient, il est d'ailleurs né en Irak où se situe la majeure partie de ce livre.
Il existe une bonne réponse à cette question : les Français lisent des romans. Si on veut faire partager un sujet qui tient à coeur, il n'y a guère d'autre solution que d'en écrire un.
Et, effectivement, « Je me souviens de Falloujah » permet d'apprendre un certain nombre de choses sur l'Irak, de comprendre comment le Baas est arrivé au pouvoir, comment les adversaires de Saddam Hussein ont été réduits au silence, comment le pays a été étouffé par un Voldemort sans charisme mais dont il était interdit de prononcer le nom.
Mais il existe aussi une mauvaise raison d'écrire un roman, l'idée qu'un certain nombre de passages obligés doivent être empruntés pour fournir un objet conforme et romanesquement irréprochable. D'où :
- une mise en abyme : le lecteur doit avoir un double à l'intérieur de l'histoire, un candide qui découvre progressivement ce qu'il ignorait.
- une situation d'apprentissage : un héros digne de ce nom passe par plusieurs épreuves qu'il surmonte; et son statut d'élu doit être posé d'emblée dans une scène forte et si possible symbolique (genre fleuve = liquide amniotique) d'où le personnage, de falot et emprunté, se sort, devenu victorieux et transcendé.
- un secret de famille: dévoilé in extremis, il jette une lumière nouvelle sur le personnage principal dont l'apparente froideur n'était qu'une façon de masquer la douleur et l'intégrité.
- de la pâte humaine: le lecteur, peu familier de l'Irak, demeure en territoire connu grâce au couple père/fils qui lui rappelle opportunément que nous sommes bien tous pareils et que les problématiques familiales sont identiques sous toutes les latitudes.
Bref, littérairement parlant, ce livre n'a pas grand intérêt. Mais il donne envie d'en apprendre plus sur l'Irak et sa diaspora et de suivre son auteur dans ses récits et dans ses reportages, sans détour maladroit par la fiction. Un roman naît de l'impossibilité de dire les choses autrement, ce n'est ni une cerise on the cake ni un enjoliveur de jante.
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Merci à Masse critique privilégiée et aux éditions JC Lattes pour la lecture de ce roman autobiographique.
Ce récit de vie croise le parcours de deux hommes, un père et son fils.
Un père né en Irak, à Falloujah, en 1943. Un fils né en 1980 en banlieue parisienne.
Après avoir choisi l'exil en France et fondé une famille, Rami refuse d'évoquer l'Irak mais donne à son fils le prénom d'Euphrate, en hommage au fleuve au bord duquel il a grandi.
Mais de son passé, Rami ne veut pas parler «Trop compliqué», répondait-il inlassablement son fils qui le questionnait depuis qu'il avait découvert une mystérieuse carte militaire.
Lorsqu'il devient amnésique suite à un cancer, Euphrate essaie de reconstruire le passé.

Pour assembler le puzzle, l'auteur mélange ses souvenirs d'enfance, l'histoire politique de son pays et des fragments de la mémoire de son père.
Dans les dernières pages, l' auteur s'interroge sur les mécanismes de la mémoire : "La mémoire est un art choisi, un canevas blanc sur lequel on fait courir des pinceaux de couleurs, pour un résultat bien loin de la représentation exacte de la réalité, mais proche d'une vérité subjective, celle qui nous habite à l'instant où nous la vivons. La mémoire n'est pas forcément une reproduction fidèle de ce qui s'est réellement passé. Elle retient aussi bien ce qu'elle désire que ce qu'elle abhorre. "

Ainsi donc l'entreprise autobiographique est vouée à l'échec dans sa relation au réel. Mais peu importe à celui qui en fait la démarche en assumant la subjectivité de son récit. Cette subjectivité est d'autant plus grande qu'il s'agit ici des relations entre un fils et son père.
On retrouvera donc ici l'image complexe d'un père qui est à la fois un héros et un homme malheureux.
Pendant l'enfance d'Euphrate, le père incarne la figure de l'immigré, celui qui vend des cartes postales dans la rue pour nourrir sa famille, celui qui ne maîtrise pas parfaitement la langue, celui dont on a honte.
Plus tard, le père devient exilé politique, un héros trotskiste qui s'est battu pour ses idées et qui a été torturé pendant des mois, celui dont on est fier.

Les deux représentations cohabitent parfaitement dans ce roman, non seulement parce qu'elles sont liées à l'affect familial , mais en raison de la situation particulière des exilés. D'autant plus lorsqu'ils ne veulent pas parler du passé, comme le fait Rami.
Le poids du silence, c'est pour Euphrate le sentiment d'avoir une " identité flottante, inclassable". Quoi de plus normal pour cet enfant qui voulait faire de la "décalcomanie identitaire", que de mener la recherche du roman familial.

Ce roman intéressera ceux qui aiment l'autofiction ou les romans de l'exil, avec une mention pour la scène dans le magasin de jeux vidéo qui donne à voir l'humiliation d'une famille immigrée.
L'écriture est assez ordinaire, plus journalistique que littéraire.
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Chambre 219 d'un service de soins palliatifs. le père en fin de vie. Son fils a besoin, désespérément besoin, de renouer un lien avec lui. Même si ce dernier est toujours resté mutique sur son passé, depuis son arrivée en France.

Rami, le père, a quitté l'Irak lors de l'arrivée au pouvoir de Saddam Hussein. Depuis, il se terre dans le silence et refuse de répondre aux questions de son fils, Euphrate, au sujet des raisons de son exil volontaire.

La maladie efface inéluctablement la mémoire de son père. Euphrate veut la faire ressurgir par une succession d'anecdotes et d'évènement dans lesquels Rami fut impliqué. Il se veut la mémoire vivante de son géniteur. Mais c'est également l'occasion pour le fils, de présenter ses propres souvenirs à son père.

Ainsi, le roman va énumérer, sans chronologie, différentes parties de leur vie. Ce livre ressemble à une série d'articles journalistiques tant par le style que par la construction. Rappelons que Fleurat Alani est journaliste et grand reporter.

Mais le lecteur reste sur sa fin. le manque de chronologie (même s'il est vrai que les souvenirs ressurgissent sans se soucier de la logique !) ainsi que le croisement des réminiscences du père et du fils, peuvent gêner la lecture et surtout la fluidité du récit.

Peut-être aussi, y-a-t'il trop de sujets abordés… L'exil, la fin de vie, l'incompréhension père/fils, la genèse de la dictature irakienne, les différences entre la vie à Bagdad et celle dans les villes plus reculées comme Falloujah, la place des enfants d'émigrés, etc.
L'ennui, c'est que chaque sujet n'est pas assez approfondi. On est souvent frustré par ce survol des évènements.

Et c'est bien dommage…

Lu dans le cadre du Grand prix des Lecteurs 2024.
Merci au livre de Poche de m'avoir permis de découvrir cet auteur.

Instagram : commelaplume


Lien : https://commelaplume.blogspo..
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Encore un roman sur un père exilé en France qui tait à son fils son passé empêchant celui-ci, faute de connaître ses racines, de se construire, c'est ce que m'a inspirée la lecture de « Je me souviens de Falloujah ».
La différence est que le pays quitté par le patriarche est l'Irak, un endroit peu abordé dans la littérature et connu surtout pour être un terrain de guerres alors qu'il fut l'un des berceaux de la civilisation et sa capitale, Bagdad, une ville au rayonnement culturel immense.
Rami, le père, se meurt d'un cancer dans un hôpital parisien. Partiellement amnésique, ses souvenirs concernent la période qu'il vécut avant son arrivée en France en 1972, près de trente années sur lesquelles Euphrate, le narrateur, ne sait rien.
Sa perte de mémoire va offrir la possibilité de rattraper le temps perdu et de réunir le père et le fils dont les destins vont se répondre.
« Je me souviens de Falloujah » commence le père avant de raconter son histoire sur laquelle je ne m'étendrai pas pour ne pas la déflorer et enlever au lecteur le plaisir de la découverte.
Au-delà du récit plutôt convenu de la relation entre un père et son fils, ce premier roman vaut surtout pour le portrait d'un pays passé du raffinement à la sauvagerie.

Lien : http://papivore.net/litterat..
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La mort livre ses derniers secrets et le pays qu'un fils ne connaît pas. L'enfance succède à la révolution puis l'exil.
La mort livre la grande histoire et la fragilité des hommes.
La mort conte l'hommage au pays d'origine d'accueil à la transmission la famille l'amour.
Un premier roman réussi
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Un livre sur l'exil, la relation père-fils, les origines, la famille, l'immigration. Feurat Alani nous livre l'histoire d'Euphrate et de son père Rami. L'histoire d'un irakien né en France qui essaie de retrouver ses origines, et d'un père taiseux, enfermé dans son histoire qui ne livre rien.

Un livre émouvant sur la relation père-fils, la construction sans connaître sa terre natale, les questions qui restent sans réponse. Et puis, le père atteint d'un cancer, devient en partie amnésique et enfin le fils à ses réponses.

J'ai aimé la plongée dans l'histoire irakienne d'avant puis après Saddam, l'émotion que peut ressentir un enfant né en France de parents étrangers, la vie de Rami en Irak avant son départ. Un roman multiple, qui nous prend par la main pour nous montrer une histoire différente de celle montrée par les médias.

Ce livre a reçu le prix du roman version Fémina et il le mérite.
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« le roman est un mensonge qui dit toujours la vérité ». Jean Cocteau.
Avec cette citation d'ouverture, le voile sur le contenu est levé.
Un « roman » qui restitue la mémoire du père, Rami, né en 1944 à Falloujah dans un Irak monarchique, par son fils, Euphrate, né en 1980 à Paris, dans une république, la Vème du nom.
Depuis son arrivée en France en 1972, ce père maintenait cadenassées les 28 années de son parcours de vie dans son Irak natal et jamais une bribe de son enfance, de sa famille, de ses amis, de ses convictions politiques ou religieuses et de ses activités ne furent confiées à ses enfants : « c'est trop compliqué », ainsi se justifiait-il.
De France, il suivait les diverses convulsions qui martyrisait le pays lointain ; nombreuses, rapprochées, sanglantes et dévastatrices. Durant la guerre contre l'Iran, il dira des belligérants Khomeini et Saddam Hussein : « Abna el kilab, fils de chiens ». En 1991, suite au bombardement massif du pays par l'opération « tempête du désert » pour mettre fin à l'occupation du Koweït, Rami commencera à boire de façon excessive : « mon père se mit à boire une bouteille de vin tous le soirs ». Dès 1995, l'embargo a isolé le pays et ses habitants dans la misère et la débrouille jusqu'à la catastrophe (jamais punie) du mensonge américain en 2003 et la neurasthénie de Rami.
Arrive alors le questionnement de l'enfant sur son identité. D'où suis-je, où est-on chez soi ? Cette recherche d'identité est intrinsèque à l'humain. Pour les déracinés, les immigrés, les hors-sols, la quête est souvent leur chemin de croix, jusqu'à transmettre à leurs enfants une empreinte d'appartenance au pays, comme si l'imprégnation était atavique et indélébile. Etrangement, les descendants se ressentent étrangers dans leur pays de naissance et la souhaiteraient là bas, s'exprimant de la sorte : « dans mon pays », celui quitté par le parent. Ainsi réfléchit Euphrate, malgré tout déchiré par une fragmentation de sa personnalité en devenir : l'admiration inconditionnelle au père, et la honte qu'il porte à ses différences. La honte du mal parler, la honte de l'emploi instable, le mensonge sur le questionnaire identité-emploi des parents demandé à l'école… page 78 « aussi loin que je m'en souvienne, trois sentiments étroitement liés m'accompagnèrent dès mon plus jeune âge : l'anormalité, le mensonge et la solitude ».
Et puis, un peu de stabilité en Irak permettra aux enfants et à leur mère (sans Rami), d'aller visiter la famille en 1989. Un choc culturel et social pour l'enfant de 9 ans qui déambule avec ses baskets Reebook pump dans les rues d'un pays exsangue après 8 années de guerre contre l'Iran. Euphrate s'imprégnera de la matrice paternelle. Il ira chercher les informations à la source, là-bas, à Falloujah et à Bagdad car d'autres voyages suivront. Nous apprendrons ainsi sous la plume du fils devenu narrateur que Rami était un enfant timide et solitaire qui a souffert de la perte de sa mère aimante à 8 ans, puis subira les humiliations d'une belle-mère cruelle et malveillante dans le silence absolu du père, démissionnaire et soumis. Il connaitra les différents soubresauts politiques du pays. Une première fois le 14 juillet 1958 quand le général Qassem et ses partisans mobilisent des troupes de l'armée irakienne pour déclencher un coup d'État qui va renverser la monarchie hachémite et instaurer une république, tendance communiste. Une deuxième fois, lorsque ce même général sera assassiné en février 1963, après un coup d'état fomenté par le parti Baas. Ce parti qui prend le pouvoir, devient tyrannique, interdit le parti communiste, pourchasse ses membres, les emprisonne et les supprime. Militant trotskiste, Rami rejoindra la France après un passage par les geôles irakiennes du régime répressif de Saddam Hussein.
1972-2019, français sans l'être vraiment, Rami se meurt d'un cancer des poumons, et, de façon simultanée, il perd la mémoire, celle qui le relie à sa vie d'immigré en France. Alors, une conversation en miroir s'établit entre le père et le fils, chacun déroulant à l'autre sa partie du parcours, solitaire ou commun pour opérer la jonction, celle qui unit l'ensemble.
La construction du livre ressemble à celle d'un puzzle que l'on assemble. le contenu d'un paragraphe correspond à une époque, en France ou en Irak, sans chronologie, ce qui induit parfois de la confusion pour la compréhension.
Cependant, retenir de ce livre le récit-hommage à un père exilé, banni, humilié, qui porte la charge permanente des affronts subis, jusqu'à s'oublier ! Un ouvrage qui me rappelle l'émouvant témoignage de François Cavanna dans son livre : « les Ritals », magistral !
Livre offert par Babelio masse critique.

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Ce récit commence en 2019 dans une chambre d'hôpital occupée par un homme âgé, Rami, arrivé en France en 1970, réfugié politique irakien, atteint d'un cancer avancé. Un taiseux qui a systématiquement éludé les questions sur sa vie antérieure par un « trop compliqué » que son fils Euphrate, né en 1980 dans la banlieue parisienne, lui posait.

Le fils tente d'approcher enfin de la vérité de ce père énigmatique, à la faveur de l'hospitalisation de Rami, alors qu'une amnésie sévère s'est installée et que le vieil homme se vit à Falloujah.

Au fil des chapitres le narrateur déroule les éléments qu'il connaît de son père et tous ceux que celui-ci a pris un malin plaisir à garder pour lui car sans doute trop douloureux. Ceci avec en toile de fond l'histoire de l'Irak depuis les années 50.

J'ai eu du mal à suivre la narration qui m'est apparue confuse, le fait qu'Euphrate, né en France, ayant suivi toute sa scolarité dans ce pays, parle de l'Irak comme étant son pays d'origine, a participé à ma confusion.
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Il se souvient de Falloujah.
C'est tout ce qu'il reste de lui.
Tout entier contenu dans ce mot.
Ce village.
Là-bas, en Irak.

Rami est à l'hôpital.
Il va mourir bientôt. Et sa mémoire décide de le devancer.
De l'exiler d'une partie sa vie.
Tu es né à Falloujah, Rami. Tu as grandi près de l'Euphrate, tu l'as défié le jour du décès de ta mère. Sans savoir nager. Tu te souviens, Rami ? Tu te souviens de Falloujah ?

De l'exil, du départ d'Irak jusqu'en France, le néant.
De sa femme et de ses enfants, pas le moindre souvenir.
Pas même de son fils, nommé Euphrate, ce fils qui est là tous les jours.
Qui va mettre des mots sur une histoire en puzzle.
Qui va dire la culpabilité de l'enfant d'émigrés, la culpabilité d'être d'un pays mais de ne pas être de ses guerres.

La relation entre Rami et Euphrate se décline toute en pudeur, dans les gestes et dans les mots. Mise en abime de l'amour d'un père et de son fils. Infiniment émouvant.

Une ode à la transmission. Aux racines profondes que l'exil ne saurait trancher. Ni même la mémoire partie devant.

J'ai aimé découvrir l'histoire de Rami. La partager avec son fils.
Je me souviendrai de Falloujah
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