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4.19/5 (sur 242 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Paris , le 05/12/1980
Biographie :

Feurat Alani est journaliste, grand reporter franco-irakien et auteur.

Il est né de parents irakiens. Il a été le correspondant à Bagdad entre 2003 et 2008 de I Télé, Ouest France, La Croix et Le Point. De retour à Paris en 2008, il rejoint l’équipe de l’Effet Papillon et réalise des reportages de l’Irak aux États-Unis en passant par l’Égypte et l’Algérie.

En 2010, il fonde avec deux autres journalistes la société de production Baozi Prod, où il réalisera entre autres une enquête sur la ville de Falloujah, primée dans plusieurs festivals.

Il collabore régulièrement avec le journal Le Monde Diplomatique, le site web Orient XXI et la revue Géo.

Installé à Dubaï depuis 2012, il y a créé l’agence de production In Sight Films. Reporter et producteur, il collabore régulièrement avec Arte, France 24 et Canal+.

Il a évoqué ses souvenirs du pays de ses parents dans des centaines de tweets, devenus, en 2018, un roman graphique et une série web, "Le parfum d'Irak".

Feurat Alani a remporté le Prix Albert-Londres du livre 2019 pour son roman graphique "Le parfum d’Irak".

Twitter : https://twitter.com/feurat?lang=fr
Instagram : https://www.instagram.com/feurat/?hl=fr
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Source : Wikipedia Arte Editions / Editions Nova
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Bibliographie de Feurat Alani   (3)Voir plus


Entretien avec Feurat Alani, à propos de son ouvrage Le Parfum d’Irak


Roman graphique d`un genre singulier, Parfum d`Irak est constitué des 1000 tweets que Feurat Alani a postés sur Twitter durant l`été 2016, poussé par la nécessité de raconter "son Irak". L’auteur nous livre ses souvenirs avec émotion, depuis son premier séjour en Irak à l`âge de 9 ans jusqu`à sa décision de devenir journaliste pour couvrir la guerre sur place.


A plusieurs reprises dans le Parfum d`Irak, vous faites état d`une urgence à vous rendre sur place, à voir vos proches, à témoigner. Ce récit ressort-il lui aussi d`une urgence, d`un déclic particulier ?


J`ai effectivement ressenti le besoin de parler de mon Irak de toute urgence à l`été 2016. Une urgence certainement conséquente aux nombreuses sottises que je lisais sur l`Irak, en particulier sur Twitter. Un réseau social devenu média incontournable avec l`expertise que confère Twitter à certains margoulins des mots en -isme, comme djihadisme, terrorisme ou islamisme. Ce n`est vraiment pas par animosité envers ces personnes qui, après tout, ont le droit de s`exprimer. Mais j`avais envie de rééquilibrer l`information sur l`Irak, en l`humanisant. Et vite.


Pour décrire une histoire et un pays particulièrement complexes, vous avez fait le choix du medium le plus souvent taxé de simplification : Twitter. Qu`est-ce qui a motivé ce choix ?


C`est justement la raison pour laquelle j`ai choisi Twitter. Je n`ai jamais cru que la complexité était compliquée. Il faut juste du temps et de la longueur. C`est ce que j`ai essayé de faire en imposant une chronologie, un récit au temps long, en prenant le temps de raconter des choses du quotidien qui ont du sens. C`est ce que l`on appelle « raconter la petite histoire pour raconter la grande ». La deuxième raison est l`accessibilité sur Twitter. Tout le monde peut lire tout et n`importe quoi. J`ai misé sur un temps long pour « fidéliser » une communauté. Et ainsi livrer un témoignage brut, accessible et simple.


Ce livre est un témoignage, mais aussi un travail sur la mémoire. Comment se replonge-t-on dans des souvenirs qui ont pour certains près de 30 ans ?

 

Si j`ai beaucoup de défauts, j`ai au moins une qualité, c`est la mémoire. Je me souviens des détails, des visages, des odeurs, des lieux, même après plusieurs décennies. Peut être parce que j`ai moi même le souci du détail. Et certains évènements, notamment en Irak, m`ont marqué depuis tout petit. Et puis avec ma soeur, on aimait bien se remémorer nos histoires irakiennes que l`on ressassait autour de photos de famille. Ensuite, il y a aussi un effort de reconstitution. Un petit souvenir va en entraîner un autre, puis un autre, jusqu`à reconstituer le jour, l`heure, ou le moment où se déroule un chapitre de cette histoire.


Le regard que vous portez sur l`Irak est tour à tour celui d`un enfant, d`un adolescent, d`un journaliste, d`un Français, d`un Irakien. Comment conjuguez-vous ces points de vue complémentaires ?


J`ai toujours pris ces différences comme d`utiles compléments à mon identité. Certes, l`identité est complexe et se construit à travers des expériences, mais la culture familiale est tout aussi importante. Cela paraît bateau, mais savoir d`où l`on vient est le socle pour construire son être. Que l`on soit d`origine irakienne ou bretonne, je pense qu`il y a le même besoin de prendre en considération son origine, et tout simplement essayer de prendre ce qu`il y a de meilleur. C`est un atout, j`en suis persuadé. Je me sens aujourd`hui à l`aise dans différentes situations sociales ou culturelles. Aussi bien à une tablée de membres de tribu à Ramadi que dans un restaurant parisien. Pour revenir à l`Irak, tous ces points de vue, de l`enfance à l`âge adulte, ma vision de petit français qui découvre le pays de ses parents, sont non seulement essentiels mais je crois apportent une richesse à mon regard. On dit que comparaison n`est pas raison. C`est vrai. Il ne faut pas comparer, il faut inclure.


Le titre fait référence au parfum, et de manière générale les sensations (odeurs, bruits, cuisine) sont au coeur de votre portrait de l`Irak. Etait-il important pour vous de choisir cette palette-là ?

Au départ, je n`ai honnêtement pas vraiment réfléchi à la structure. Ma mémoire est d`abord olfactive. Quand je pense à l`Irak de mon enfance, j`ai le goût de cette glace à l`abricot dégustée à Bagdad qui me revient. C`est ma madeleine de Proust. Elle m`aide à m`approprier le récit, à étendre le fil de l`histoire. C`est aussi un moyen pour les lecteurs de s`approprier cette histoire, de la même façon. Avoir des références gustatives, olfactives, visuelles, auditives permet d`entrer dans l`histoire comme au cinéma. Je ne sais pas si c`est réussi, mais c`était l`objectif.


Vous êtes reporter, homme d`images filmées et photographiées. Mais dans le parfum d`Irak, ce sont les illustrations de Léonard Cohen qui mettent vos tweets en images. Comment avez-vous été amenés à collaborer ? Son travail permet-il des choses qu`une camera n`aurait pu rendre ?

Léonard Cohen et moi nous sommes rencontrés à l`agence Capa où nous travaillions pour la même émission, L`Effet papillon. J`étais reporter, il était illustrateur et avait brillamment réussi à mettre des chiffres en image. Cette rubrique s`appelait le chiffroscope. Pour l`Irak, c`est surtout des chiffres que nous voyons circuler. le nombre de morts suite à des attentats. Mais derrière ces chiffres mortuaires, il y a des vies. Et comme il s`agit de ma propre histoire, hormis quelques photos de famille et des souvenirs, je n`ai pas d`autres moyens d`illustrer tout ça. C`est là où Léonard apporte sa créativité artistique et visuelle. Léonard ne connaît pas l`Irak. Son regard extérieur fait du bien au récit. Il équilibre la réalité et l`imaginaire. Ces histoires sont vraies mais elles ont besoin aussi d`un miroir, non pas déformant, mais fantasmagorique à certains moments. Que l`on puisse aussi se projeter avec son imagination dans cette réalité qu`est mon expérience en Irak.

A qui pensiez-vous en écrivant ces tweets ? Qui aimeriez-vous voir les lire ou les regarder en série animée ?

En écrivant cette histoire, j`ai d`abord pensé aux Irakiens. Ma famille bien sûr, mais aussi tous ceux que j`ai rencontrés là-bas, enfant, adolescent puis adulte. J`ai une dette envers eux. J`ai une dette envers ma famille qui m`a accueilli les bras ouverts malgré les circonstances, dans les moments de joie comme dans les périodes troubles. Je leur dois mon identité. J`ai bien sûr beaucoup pensé à mon père, à ma mère, à ma soeur, mes compagnons de route. J`ai aussi pensé à ceux qui ne connaissent pas l`Irak, et qui peut être sont à tel point abreuvés de dépêches froides et chiffrées qu`ils refusent désormais de les lire et d`en apprendre plus sur l`Irak. J`ai cherché à sensibiliser et à rendre la complexité de l`Irak plus lisible, de manière presque pédagogique. Enfin, j`aimerais que les Irakiens puissent voir cette série en arabe, qu`ils puissent lire ce livre, qu`ils puissent me comprendre.




Quelques questions à propos de vos lectures

Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Des livres de voyageurs comme Nicolas Bouvier, ou plus anciens encore, Henry de Monfreid et ses aventures en mer rouge. Les voyageurs ont tous en commun d`avoir quitté une vie, un système, de se confronter au monde. Cela m`a donné envie d`écrire. Dans un autre registre, Agatha Christie, aussi a contribué à mon envie d`écrire.

Quel est le livre que vous auriez rêvé d`écrire ?

1984. Je suis fasciné par George Orwell. (on retrouve un cadre dystopique dans le parfum d`Irak au début du récit sur le régime de Saddam Hussein).


J`ai par ailleurs adoré son livre autobiographique, qui a précédé 1984, et qui s`intitule Dans la dèche à Paris et à Londres.

Quelle est votre première grande découverte littéraire ?


Le vieil Homme et la mer. C`est le premier roman « sérieux » que j`ai lu.

Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Au risque de surprendre, le seigneur des anneaux de Tolkien. Et L`alchimiste de Paulo Coelho. J`ai dû les relire 4 ou 5 fois.

Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

L`Iliade   . Homère.

Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs?

Frankenstein à Bagdad. Ahmed Saadawi. Écrivain irakien talentueux.


Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Le Procès  de Franz Kafka. Je n`ai pas réussi à rentrer dans l`absurde de l`histoire. J`ai trouvé ça long.


Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« La guerre c`est la paix. La liberté c`est l`esclavage. L`ignorance c`est la force » - George Orwell.

Et en ce moment que lisez-vous ?

Je lis trois livres à différents moments de la journée. D`abord, Villes de sel : L`errance  d`Abdul Rahman Mounif, écrivain saoudien qui raconte le passage de l`ère désertique à l`ère pétrolière en Arabie Saoudite et toutes les conséquences que cela a engendré sur les plans économique, social et politique. Tellement de notre époque et d`actualité…

Je lis aussi un livre sur le journalisme constructif à l`ère des « fake news ».

Et enfin le livre autobiographique de Costa Gavras, Va où il est impossible d`aller. J`ai eu l`occasion de le rencontrer. Nous nous sommes échangés nos livres respectifs et avons beaucoup parlé de l`Irak.



Découvrez Le Parfum d’Irak de Feurat Alani, une coédition Arte Editions et Editions Nova :




Entretien réalisé par Guillaume Teisseire.






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Feurat Alani vous présente son ouvrage "Je me souviens de Falloujah" aux éditions JC Lattès. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2762935/feurat-alani-je-me-souviens-de-falloujah Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube. Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Vimeo : https://vimeo.com/mollat
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Citations et extraits (108) Voir plus Ajouter une citation
Les gouttes qui ruisselaient sur mon front se mêlaient à mes larmes, le cercueil de mon père ballottait entre le Tigre et l'Euphrate qui s'épousaient pour former le Shatt Al Arab avant de se jeter dans une mer de tristesse. Un déluge pour les yeux des hommes, pour les yeux de ceux qui ne pleuraient plus, pour les yeux des absents, un hommage du ciel rythmé par les cliquetis secs des pelles, aussi constants et réguliers qu'une horloge. L'horloge implacable de la vie.
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Surtout pas, mon fils, surtout pas. Ne sois pas comme les autres. Ne te contente pas de ce qu'on te dit d'être. Essaie de faire ce que tu ne sais pas faire. Essaie d'aller là où on ne t'attend pas. Être normal, ce n'est pas vouloir être comme les autres. C'est seulement faire ce que tu sais faire. C'est ne pas prendre de risque. Ce qui compte, c'est d'être toi. Je travaille dur pour que tu sois toi. Un jour, tu comprendras.
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La ville (Bagdad) mêlait exotisme et familiarité, modernisme et tradition. Si le Tigre qui serpentait dans la capitale était aussi large et majestueux que l’Euphrate, il roulait plus lentement ses eaux noires et silencieuses entre les jardins d’un luxe à faire pâlir les anges. En suivant le fleuve, les deux amis découvrirent un foisonnement opaque et massif d’eucalyptus, d’orangers et de dattiers dont les cimes élégantes ondulaient gracieusement au gré du vent.
(page 148)
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Falloujah était une ville de l’entre-deux, une jolie petite bourgade pleine de contradictions et de paradoxes. Située dans une vallée fertile, bordée par l’Euphrate, elle était aussi entourée de sable pourpre, l’été. Une cité tantôt paisible, tantôt bruyante, ni trop près ni trop loin des trépidations de Bagdad, où flottait un parfum floral qui laissait souvent place aux effluves de crottin de mulet au détour d’une rue.
(page 59)
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Aujourd’hui, je le sais. La mémoire est un art choisi, un canevas blanc sur lequel on fait courir des pinceaux de couleurs, pour un résultat bien loin de la représentation exacte de la réalité, mais proche d’une vérité subjective, celle qui nous habite à l’instant où nous la vivons. La mémoire n’est pas forcément une reproduction fidèle de ce qui s’est réellement passé. Elle retient aussi bien ce qu’elle désire que ce qu’elle abhorre.
(page 282)
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1989 fut une année de paix. Falloujah était devenue ma Normandie. Bagdad mon Ardèche. Je revins en France avec ce bout de pays. Je retrouvai mon père, mes amis, la rue des peupliers dansants, la gare, les trains de marchandises, mon lit secoué, les ombres au plafond. Je n’avais qu’une hâte : faire ma rentrée scolaire, pour, enfin, raconter des histoires de grandes vacances à mes amis. À Kader en particulier.
(page 128)
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Alors, pour moi, si tu décides d’arrêter tes conneries, c’est que tu es devenu un homme. La connerie est contagieuse, mais ce n’est pas un virus, il n’y a pas de vaccin.
(page 215)
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Sous l’influence de Saddam Hussein, l’Irak se muait peu à peu en une société autoritaire. Les gens étaient devenus paranoïaques. Tout le monde espionnait tout le monde. Les policiers étaient surveillés, les agents du renseignement l’étaient également par le contre-espionnage. La sécurité de régime virait à l’obsession.
(page 199)
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Et s’il lui fallait mourir pour des idées, alors, forcément, cette mort serait belle, aussi belle que ces mots qui avaient illuminé sa sombre vie – Thawra, Houria, Ishtirakiya ; Révolution, Liberté, Socialisme. Aussi belle que ce nouveau verbe apparu dans le langage commun : Militer.
(page 183)
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- Je dois murmurer. L’Irak, "ma" fils, c’est pas seulement un pays. L’Irak, c’est la société du murmure. C’est un pays où on ne peut survivre sans mentir. Et je n’ai jamais aimé mentir.
(page 85)
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— Il s’en est fallu d’un cheveu ! Sans son regard rapide, sans ses yeux de lynx, XXX XXXX, en ce moment, ne serait peut-être plus de ce monde ! Quel désastre pour l’humanité ! Sans parler de vous, Hastings ! Qu’auriez-vous fait sans moi dans la vie, mon pauvre ami ? Je vous félicite de m’avoir encore à vos côtés ! Vous-même d’ailleurs, auriez pu être tué. Mais cela, au moins, ce ne serait pas un deuil national ! Héros de Agatha Christie

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