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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Avec Je me souviens de Falloujah, Feurat Alani m'a embarqué pour un passionnant voyage mémoriel, sans négliger pièges, douleurs, malheurs, souffrances et moments de douceur, tout cela au travers de la vie de Rami, son père.
Ce fameux père, le 2 août 2019, a justement perdu la mémoire. Il appelle son fils « camarade » et lui propose une clope alors que celui-ci n'a jamais fumé. Ce père amnésique se meurt d'un cancer du poumon dans cette chambre 219 où l'auteur me ramène régulièrement. C'est là que cet homme avoue enfin à son fils : « - Je me souviens de Falloujah. » et que la quête de ce fils commence.
Petit à petit, la vie de Rami Ahmed ressurgit grâce aux recherches de son fils, à ses rencontres mais aussi grâce aux souvenirs éclairs de ce père qui a vécu et subi de terribles souffrances. En Irak d'où il a fui en 1972, il a laissé un passé riche de luttes, de brimades, de tortures pour le gosse qu'il fut, à Falloujah, au bord de l'Euphrate puis à Bagdad. C'est d'ailleurs en souvenir de ce fleuve, qu'il a appelé son fils Euphrate.
Dans ce premier roman parfaitement maîtrisé, Feurat Alani passe d'une époque à l'autre, revient en 2019, repart en 1952 en Irak, saute en 1988 à Paris, revient en 1953 puis en 1989…
Grand reporter, auteur de plusieurs documentaires, Feurat Alani a reçu le Prix Albert Londres en 2019 pour son livre le Parfum d'Irak (éditions Nova). S'il romance dans Je me souviens de Falloujah, il prouve sa parfaite connaissance du pays d'origine de ses parents.
Au travers du passé de son père devenu amnésique, il me permet de bien ressentir ce qu'ont vécu les Irakiens depuis le renversement de la monarchie par le général Qassem, en 1958. L'embellie apportée par la révolution dure peu. On espionne, on dénonce, on arrête, on torture, on exécute, tout cela sur fond de vengeances, de règlements de compte, ce que Rami et son grand ami, Hatem ont vécu au quotidien.
Le jeune Rami a beaucoup souffert de la mort de sa mère, Mouhja, alors qu'il n'avait que huit ans car son père s'est remarié avec Samiya dès que l'année de deuil réglementaire a été écoulée. Cette veuve, mère de trois enfants, était hautaine, sévère. Elle ignorait Rami et ne favorisait que ses propres gosses. Ce bouleversement dans la vie familiale de Rami aura des conséquences gravissimes tout au long de sa vie.
Une valise jamais ouverte, plusieurs voyages en Irak, à Bagdad mais aussi à Falloujah permettent à l'auteur de rassembler petit à petit les pièces d'un puzzle d'où émerge un impressionnant amour filial qui m'a ému de plus en plus au fil de ma lecture.
Dans Je me souviens de Falloujah, Feurat Alani, prouve une fois de plus qu'un roman peut apprendre davantage sur l'histoire d'un pays que le plus sérieux des documentaires. Surtout, en faisant appel à l'émotion, en distillant des instantanés de la vie d'un homme qui s'est battu pour un idéal, l'auteur donne envie d'en savoir plus.
Après la tragique expérience du parti Baas menée à son apogée par la dictature de Saddam Hussein, l'Irak est toujours un pays déchiré par les factions qui n'hésitent pas à éliminer ceux qui sont susceptibles de gêner. de plus, les interventions coloniales et militaires de la Grande-Bretagne et des États-Unis ont laissé des traces. Je n'oublie pas les Kurdes et les exactions menées par les djihadistes.
Enfin, je tiens à remercier très sincèrement Babelio et les éditions JC Lattès pour cette lecture qui m'a emmené sur les rives de l'Euphrate, un fleuve dans lequel les jeunes aiment plonger pour enfouir des pastèques dans la vase, au frais.
J'ajoute un clin d'oeil personnel à Feurat Alani pour ses références à l'Ardèche, département qu'il semble apprécier particulièrement, comme la Normandie d'ailleurs. Depuis la rive droite du Rhône, mon fleuve référence, pourquoi ne pas espérer qu'entre Tigre et Euphrate, berceau des civilisations, là où l'écriture est née, revienne un jour cette sagesse dont notre monde actuel semble manquer de plus en plus…

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Alors que Rami est hospitalisé pour un cancer en phase terminale, son fils Euphrate se rend compte que ce dernier a de lourdes pertes de mémoire. Irakien exilé depuis les années 1970, Rami ne se souvient pas de sa vie en France. En revanche, il se souvient de Falloujah et de sa vie en Irak. Pour Euphrate, c'est l'occasion de connaître enfin le passé que son père a toujours tu, de découvrir l'enfant qu'il était, celui qui a côtoyé la mort bien trop tôt, aussi bien que le révolutionnaire qu'il est devenu peu après. En échange, Euphrate lui raconte sa propre enfance, reconstitue la vie "à la française" de son père à travers ses propres souvenirs.

Au fil des chapitres, Euphrate, notre narrateur, nous raconte son père sur trois périodes bien distinctes : l'une qui débute à la fin des années 1950 à Falloujah, qui correspond à l'enfance de Rami jusqu'à ses choix de jeune adulte et qui aboutiront à son exil en France ; la seconde qui débute dans les années 1980, avec l'enfance d'Euphrate en région parisienne ; la dernière en 2019, au moment présent, correspondant à l'hospitalisation de Rami.

Échange de bons procédés, le père et le fils se livrent comme jamais ils ne l'avaient fait auparavant. Dans cet homme secret et taiseux, Euphrate refait connaissance avec son père. Il découvre un enfant de huit ans malheureux qui peine à trouver sa place au sein d'une famille qui le rejette, puis plus tard un jeune homme aux idées politiques à cause desquelles il goûtera à l'enfermement et à la torture avant de connaître l'exil.

Et à travers l'histoire de Rami, c'est la grande Histoire qui nous est contée, celle de l'Irak sur près d'un demi-siècle : la guerre contre l'Iran, l'invasion du Koweït, Abdel Karim Kassem, Saddam Hussein, la dictature, les arrestations, l'intervention des États-Unis, etc. Feurat Alani, en nous parlant du parcours de Rami, nous parle en fait de son pays d'origine, dont on en ressent l'attachement tout au long de notre lecture. Il remet les événements à leur place et dans leur contexte. On imagine sans peine Falloujah, sa rivière à qui Euphrate doit son prénom, les gamins qui y plongent avec leurs pastèques, son pont, les dattiers dans les jardins et qui bordent les routes... Et puis on découvre l'envers du décor : un pays fragilisé par les guerres, les coups d'État et la dictature. L'ambiance est donnée, à la fois envoûtante et inquiétante.

Mais "Je me souviens de Falloujah" n'est pas uniquement un livre qui parle de l'Irak. C'est aussi une histoire familiale, avec ses drames et ses bons moments. Il y est question d'amour, d'un fils à sa mère défunte, d'un fils à son père condamné. Il y est question de relations humaines, familiales essentiellement mais aussi d'amitié. Il y est question de résilience, d'affirmation de soi et de ses propres idées, de combats contre l'adversité, de recherche sur ses origines, des conséquences que le passé familial peut avoir sur les générations futures.

"Je me souviens de Falloujah", ce sont 288 pages très intenses, tant dans les événements qui touchent les personnages que les personnages eux-mêmes. Feurat Alani use d'une plume riche en émotions diverses, des plus belles aux plus terribles. Très peu d'éléments le concernant sont donnés sur le Net, pourtant on ressent tout au long de notre lecture que c'est une partie de lui-même et de son histoire qu'il nous livre. D'ailleurs Euphrate est né en France en 1980 de parents irakiens, exactement comme l'auteur lui-même. Il y a donc une dimension toute personnelle dans ce roman, clairement manifeste, ce qui le rend d'autant plus réaliste, percutant et touchant.

On s'attache assez rapidement à Rami et à son fils. Leur relation, souvent complexe, quelquefois distante, ne manque pourtant jamais d'amour l'un envers l'autre. Leur histoire familiale est aussi prenante qu'elle peut être douloureuse. Là encore, bien que je ne sache rien de la relation que l'auteur entretient ou a pu entretenir avec son propre père, on a pourtant l'impression qu'il ne fait qu'un avec le narrateur. C'est beau, attendrissant, émouvant.

"Je me souviens de Falloujah", c'est l'hommage d'un homme à son pays d'origine et de coeur autant qu'une déclaration d'amour d'un fils à son père. C'est ainsi que je le ressens en tout cas... Rien dans la quatrième de couverture ne l'indique pourtant, mais je me pose encore la question de savoir si je n'étais pas en fait dans une auto-fiction ?

Reçu et lu dans le cadre d'une masse critique privilégiée, je remercie Nathan de Babelio pour la sélection, ainsi que les éditions J.C. Lattès pour l'envoi de cet ouvrage. Bravo à Feurat Alani pour ce premier roman très réussi !
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2019
Hospitalisé pour un cancer à 75 ans, Rami voit sa mémoire s'effacer.
Ses seuls souvenirs se rattachent à sa jeunesse passée en Irak qu'il a quittée pour la France en 1972, pour fuir la dictature de Saddam Hussein.
Il habitait la ville de Fallujah située le long de l'Euphrate.
Ce fleuve jouait un rôle très important pour lui car les gamins se rassemblaient sur le pont vert qu'on peut voir sur le bandeau de la couverture. Ils se lançaient le défi de plonger du pont pour aller enterrer une pastèque dans la vase.
S'ils réussissaient, ils devenaient des hommes et amis pour la vie. "Pastèque" qui est représentée en tout petit sur la couverture du livre au-dessus du nom de l'éditeur .
L'Euphrate, tellement important dans les souvenirs de Rami qu'il a appelé son fils Euphrate.
Ce même fils est bien décidé à percer le secret de son père qui ne racontait jamais rien sur sa vie en Irak.
Ce ne sera pas difficile car la seule mémoire qui reste à Rami, c'est celle de ses souvenirs anciens.
le roman est magnifique avec des passages teintés d'humour, avec de l'empathie pour les petits boulots que le père enchaînait à gauche à droite, avec de la gêne aussi d'avoir des parents avec un accent étranger dont les Français se moquaient.
L'auteur est né de parents irakiens. Même si le récit est imaginé, on devine qu'il est marqué par des faits réels.
Reporter de guerre, il est bien placé pour nous retracer les évènements en Irak depuis la dictature de Saddam Hussein et les évènements dramatiques qui ont suivi bien des années plus tard.

Je remercie Nathan de Babelio pour m'avoir permis de participer à une Masse Critique privilégiée et les éditions Jean-Claude Lattès pour l'envoi de cette lecture qui nous permet d'ouvrir une fenêtre sur une autre réalité que la nôtre.
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Août 2019 : Rami, le père d'Euphrate, est hospitalisé pour un cancer du poumon, stade 4. Euphrate réalise que son père ne le reconnaît plus, qu'il a perdu la mémoire, alors qu'il a encore tant de réponses à lui donner. Des morceaux de mémoire reviennent, Rami se souvient de Falloujah.
Été 1952 : Rami, huit ans, est réveillé par les cris des pleureuses. Sa mère vient de mourir. Il fuit la maison pour aller retrouver les autres garçons qui sautent du pont, une pastèque dans les mains. Un rite de passage qui renvoie à la mort de sa mère, il est un homme maintenant (enfin, si on veut).
Automne 1987 : Euphrate a sept ans. Dans une petite valise, il découvre une photo de son père, jeune homme en militaire, ainsi qu'une carte à un nom inconnu : Amir Mullah.

Les histoires de Rami et d'Euphrate se répondent, se rapprochent, s'éloignent. L'un a quitté l'Irak en 1972 pour fuir Saddam Hussein, l'autre est né en France, immigré pas comme les autres :
« L'Irak ? C'est quoi l'Irak ? C'est arabe, ça ? Tu pouvais pas être Marocain ou Algérien comme tout le monde ? » lui demande Kader, un camarade d'école.
Bien que le narrateur fasse des aller-retour entre les époques, le récit est fluide et je n'ai jamais été perdue.
Je me souviens de Falloujah nous parle des deux guerres du Golfe. Vu de France, ça ressemblait à des jeux vidéo, là-bas, les familles vivaient sous les bombes. le livre aborde la difficulté d'être d'ici et d'ailleurs, les idéaux, l'effondrement d'un pays, la famille.

J'ai été happée dès le début et profondément émue par l'histoire de cette famille, partagée entre l'Irak et la France. Les réactions de Rami sont parfois imprévisibles, mais elles s'expliquent par son passé.

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Ce 2 août 2019, dans la chambre 219 d'une clinique parisienne, Euphrate est subitement confronté à la perte de la mémoire de son père, Rami, hospitalisé pour un cancer du poumon bien installé. Les amnésies sont multiples, pouvant occulter les souvenirs lointains ou alors ceux bien plus récents. Certaines routes prises par la mémoire s'effacent et celle-ci se perd alors on ne sait où, dans des sinuosités devenues inaccessibles. Rami a perdu la route de son existence française pour revenir sur celle qu'il a quittée depuis tant d'années, abandonnée en Irak en 1972 juste avant ses trente ans.
De cette mémoire parcellaire, Euphrate veut enfin ouvrir les zones pleines de ténèbres que son père a toujours voulu taire, celles protégées par des portes hermétiques dont, enfant, et même devenu adulte, son père lui a refusé l'accès, arguant que c'était trop compliqué. Car pour Rami, l'échec ne doit pas être dit. Mais quel est cet échec ? En est-il réellement un ? Pour répondre à ces questions Euphrate doit connaître la vie de ce père, celle d'avant sa naissance, celle passée dans son pays d'origine. Curiosité ? Reconquête de la mémoire ? Nécessité de savoir d'où il vient ? Volonté de faire enfin connaissance avec la tranche de vie irakienne que ce père mutique lui a cachée sa vie durant ?

Des parts de révélations, telles des briques, vont composer le mur des souvenirs. Rami parle de sa jeunesse en Irak tandis qu'Euphrate lui remémore leur vie en France. L'enfance de Rami court dans le labyrinthe de la mémoire et celle d'Euphrate la rejoint, dans la banlieue parisienne.

Le regard confus, les pensées de Rami le ramènent en Irak. À huit ans, transpercé par les cris de pleureuses venues honorer la mémoire de Mouhja, sa mère, il saute dans l'Euphrate, le fleuve qui borde Falloujah. En effet, du pont vert, hérité des Britanniques, les jeunes défient le courant et plongent dans un rite initiatique de passage au statut d'homme. Ce premier plongeon, sans savoir nager, le fera se mesurer à la vie elle-même et il en gardera un si profond souvenir qu'il donnera le nom de ce fleuve à son fils. Peu de temps après, avec l'arrivée d'une belle-mère, une abominable marâtre, il découvrira la méchanceté, les brimades, l'humiliation et la haine.

En fil rouge, l'histoire de l'Irak défile, saccagé, traversé par ses guerres, ses affrontements politiques, son embargo, sa dictature, son occupation. le pays où il faut murmurer par peur de la délation. Les mets irakiens s'achevant sur un thé à la cardamome accompagné de pâtisseries gorgées de sucre, de dattes ou de fruits secs ne font pas oublier toutes les meurtrissures.
Malgré tout, l'exilé a le mal du pays, assourdi dans la musique irakienne écoutée dans un Walkman et noyé dans l'ivresse.

À mesure qu'Euphrate grandit, son statut d'enfant d'immigrés le dérange. le pays inconnu est pourtant présent dans son identité «Toute ma vie, cette identité flottante, inclassable, a été un partenaire, silencieux, encombrant.»

Des ruelles de Falloujah aux cafés de Bagdad, du parvis de Notre Dame aux HLM de banlieue, de passé en présent, on ne peut que compatir aux douleurs des parcours chaotiques de ces réfugiés pour qui l'exil restera un échec quoi qu'il arrive. Feurat Alani rend ici un vibrant hommage au père déraciné, à ses blessures pudiquement cachées. C'est aussi le besoin de saisir les dernières révélations de ce père dans un contexte d'urgence en raison de son état de santé. C'est bel et bien une quête de vérité, de réponses à cette question « pourquoi s'être exilé ? » Est-ce que le poids de l'engagement politique a pu suffire à motiver cette fuite ?
À la fois premier et ultime échange intime entre père et fils, le sujet de ce roman est touchant et attendrissant, il développe la motivation de l'exil et non pas son organisation. C'est ce qui fait sa singularité vis-à-vis d'autres lectures dans lesquelles l'accent est mis sur l'exil en lui-même et ses embûches.
Je remercie sincèrement les éditions JCLattès et Masse Critique pour ce livre captivant, qui génère de multiples émotions.
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Ignorant tout ou presque du calvaire vécu par les Irakiens, j'ai pris conscience de l'envers du décor de la guerre d'Irak : les frappes sur Bagdad ont aussi anéanti des familles à l'intérieur même de cette ville meurtrie bien sûr, mais aussi par l'intermédiaire de reportages pour celles qui avaient déjà quitté le pays et qui ont vécu l'enfer par correspondance.
Euphrate, lui, affronte l'histoire des siens au pire moment de sa vie : alors qu'il accompagne son père dans la phase finale de son cancer provoquant une amnésie.
Une fois encore, la lecture permet d'accéder à l'indicible et à l'invisible, ici incarné par un vendeur de cartes postales faisant partie des décors touristiques parisiens.
J'ai été émue par ce fils qui tâche d'accéder à ce père emmuré dans sa douleur avant qu'il ne soit trop tard.
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Journaliste franco syrien , Feurat Alani dresse un portrait historique de l'Irak depuis plusieurs dizaines d'années
De la fin des années 1950, avec la chute de la monarchie , jusqu'en 2020 , c'est le récit d'une déliquescence
Qui se souvient de la Mésopotamie .Qui sait encore que l'Irak fut le berceau de grandes civilisations , un cité fastueuse et savante, un des grands centres du monde musulman , un pays riche (au sens occidental) il y a seulement quelques dizaines d'années
Feurat Alani remet son pays d'origine dans son contexte historique alors qu'il reste chez beaucoup qu'une vision de pays en guerre , quasiment dévasté et sans grand intérêt désormais pour un Occidental
Son livre est aussi une histoire père fils très riche .
Celle d'un père qui se meurt et celle d'un fils (Feurat Alani lui-même ?) qui est confortablement installé et qui culpabilise de regarder son pays d'origine de loin sans vraiment prendre de risques
Une auto fiction qui pose le problème de la double nationalité et du sentiment de culpabilité quand on est du bon côté de la barrière.Un livre qui remet aussi l'  Irak à sa place dans l'Histoire de l' humanité
En moins de 300 pages, très bien écrites, faciles à lire, Feurat Alani nous parle de l'histoire récente ( guerre Iran Irak, invasion du Koweït , grandeur et décadence de Saddam Hussein, déclin économique et politique) mais aussi d'une relation très forte entre le père amnésique et mourant et le fils , tourmenté , qui cherche à trouver un sens à son histoire familiale pour exorciser sa culpabilité de privilégié
Il a l'intelligence de reconnaître que son histoire n'est pas seulement une histoire irakienne mais qu'elle est universelle et aurait pu être la même dans bien des pays qui ont, eux aussi, connu des des destins tragiques
Passionnant de bout en bout.
Un livre très riche, très dense, très au dessus des lectures habituelles y compris de certains prix littéraires récents

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Rami, un homme hanté par son passé, se débat avec une amnésie sélective qui laisse des lacunes béantes dans sa mémoire. Il se souvient de son Irak natal... mais son exil en France reste une énigme.

Dans ce tumulte mental, surgit Euphrate, ce fils déterminé à dénouer les fils du passé, à rassembler les morceaux perdus de leur histoire familiale. Ensemble, père et fils entreprennent un voyage dans les méandres de la mémoire, une quête de souvenirs qui les mènera des rues animées de l'Irak aux rives de la France. Son fils va l'aider à se souvenir et à remonter son histoire, à remonter L Histoire.

"C'est une valise que tu ne vois pas. Elle est invisible, mais elle est là. Au cours de ton existence, cette valise va se remplir de rencontres, d'objets, de souvenirs, d'expériences [...]. Sache qu'on ne naît pas. On devient."

Dès le premier regard, la couverture du livre invite à plonger tête baissée dans des flots de souvenirs. le roman m'a tout de suite attiré. Et ce prénom, "Euphrate", résonne tel un symbole, une passerelle entre deux mondes, deux cultures, un témoignage vibrant de l'attachement et des espoirs de Rami.

Mais ce récit n'est pas qu'une promenade paisible. Non, c'est un tumulte d'émotions et de révélations. Rami a traversé des épreuves et il est toujours vivant. Il porte encore les cicatrices invisibles de la violence, de la torture, de la guerre, de la misère. Pourtant, au milieu de ce chaos, surgissent des éclats de bonheur démontrant la force des souvenirs, des liens humains, de l'espoir et du pardon.

"Ne te contente pas de ce qu'on te dit d'être. Essaie de faire ce que tu ne sais pas faire."

Au fil des pages, nous sommes transportés dans un monde où les frontières entre passé et présent s'estompent, où la vérité se dévoile. À travers les voix de Rami et d'Euphrate, nous découvrons un récit bouleversant de courage, de résilience et d'amour filial.

"La mémoire est un art choisi, un canevas blanc sur lequel on fait courir des pinceaux de couleurs, pour un résultat bien loin de la représentation exacte de la réalité...".
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Une lecture puissante sur la transmission, (pour « vivre éternellement à travers celui qui se souvient » conclue l'auteur.) et une lecture bouleversante humainement (Le lien père fils, le sort de l'Irak et de son peuple.)
Merci babelio pour le privilège d'avoir reçu cette lecture, dont je n'imaginais pas la portée jusqu'à son premier tiers.

Je démarre le roman avec le plaisir de découvrir sa construction : un père qui perd la mémoire et un fils qui rapportent leurs souvenirs réciproques. Construction qui cimente à merveille le rôle du va et vient de la mémoire, du temps qui passe, des faits qui changent la portée de leur sens. (La photographie qui fige mais ne dit pas tout) La construction du roman donc et ce regard complètement innocent que porte l'enfant sur la découverte de l'Irak, (le pays de son père, le fils lui qui est né Français.) font de mon début de lecture un plaisir purement naïf de ce que je lis.
Puis je comprends qu'il s'agit là d'un engagement très personnel, Feurat Alani est ce personnage à la première personne, c'est le narrateur et l'auteur, c'est un témoin du monde, un journaliste de guerre et ce qu'il nous présente à lire là sont bien plus que des faits historiques. C'est le rapport à son pays, aux questionnements de l' enfance, à son père en exil, aux injustices, à la guerre, au poids du renoncement.
La lecture me meurtrie d'autant que je me rappelle très bien de l'angoisse partagée des années 90, l'Irak qu'on voyait à la télé, l'impression de ne pas bien comprendre ce qui se passait là bas, qu'il se jouait quelque chose qui ne semblait pas être à notre portée mais se disputait entre grandes puissances armées…
Je termine la dernière moitié du livre complètement en empathie avec les mots lus, quelqu'ils soient. Ceux d'hier ou ceux de 2019, ou même les mots de la fin. Tout résonne.
Je m'en vais ouvrir Falloujah, ma campagne perdue. Totalement confiante dans les regards que posent Feurat Alani, quand je constate la justesse de son premier roman.

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Quelle déclaration d'amour ! Je suis encore émue par ce roman, vibrant hommage d'un fils à son père. Rami est un père taiseux qui ne parlera jamais de son passé durant sa vie et qui voit peu à peu sa mémoire le quitter sur son lit de mort. Euphrate, son fils, aimerait l'aider à remonter le fil du temps pour reconstituer son histoire. Père et fils vont alors peu à peu assembler les pièces de ce puzzle qui nous plonge dans l'extraordinaire destin de Rami. Ce dernier se souvient de son enfance à Falloujah, petite ville d'Irak, où très jeune il perd sa mère et doit apprendre à vivre avec sa belle-mère malaimante et ses nouveaux frères qui le martyrisent. Il se souvient de sa tristesse, de son humiliation puis de son engagement, de son militantisme. Après son exil en France, il ne se souvient plus... Alors Euphrate lui raconte lui aussi son enfance. Il raconte ses parents dont il a parfois un peu honte, leur pauvreté et leur français mal maîtrisé. Il raconte cette grande famille irakienne découverte sur le tard, ces voyages dans ce pays qui l'attire puis le rebute. Puis, il raconte cette guerre que l'on observe à distance, cette Irak qui s'effondre. J'ai adoré parcourir leurs souvenirs à leurs côtés, découvrir l'Histoire d'une Irak révolutionnaire, totalitaire et meurtrie. le récit alterne entre les époques et les souvenirs d'Euphrate et de Rami. L'écriture est belle et immersive, avec poésie et tendresse l'auteur brosse le portrait d'un pays détruit par de nombreux conflits. Il aborde avec justesse les thèmes de la transmission, de la réconciliation, de ces souvenirs et secrets que l'on préfère taire toute une vie. C'est un roman bouleversant, une déclaration d'amour qui m'a profondément touchée et dont je suis ressortie les larmes aux yeux.
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