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sur 246 notes
Dès la première phrase, le ton est donné, le décor est planté. Immersion directe au coeur d'un quartier populaire de Casablanca où des hommes suivent des femmes dans un escalier, entrent dans une modeste chambre, s'installent rapidement sur un matelas bien souvent posé à même le sol et y consomment un acte sexuel.

Mais comment Jmiaa en est arrivée à devenir une prostituée ?
Elle a tout simplement suivi son mari qui avec tous ces plans foireux se retrouve sans un sou pour subvenir aux besoins quotidiens du couple.

Et de là, c'est la descente aux enfers. Un premier ami du couple va forcer Jmiaa à une relation non consentie, sans que son mari n'intervienne, puis, un deuxième et ainsi de suite. Jmiaa a beau crier, se disputer, se battre avec lui, se démener contre cette situation, rien n'y fait. Leur relation de couple s'envenime et s'enlise dans cette déchéance.

Un jour, Hamid a une autre brillante idée, il part tenter sa chance en passant clandestinement en Espagne, et laisse Jmiaa sur le carreau. Elle n'a plus qu'à se débrouiller toute seule pour vivre.

Jusqu'au jour où, Hamid, le gars qui travaille au garage du coin, dit à Jmiaa qu'une femme fait des recherches pour son film et souhaiterait discuter avec elle. Sans vraiment trop y croire, Jmiaa accepte cependant de la rencontrer…


Jmiaa, personnage centrale de ce roman n'a pas sa langue dans sa poche. Elle sait se défendre verbalement, utilisant à bon escient tous les mots vulgaires, grossiers qu'ils existent. Mais c'est comme ça dans le quartier, si elle veut survivre, elle n'a pas vraiment le choix.

Esclave, assouvissant le moindre désir des hommes, Jmiaa ne sait pas comment sortir de cette spirale qui l'entraine jusqu'à devenir une loque entre boire pour oublier, boire pour tenir, enchaîner cigarette sur cigarette, s'abrutir devant des téléfilms niais une bonne partie de la journée. Et pourtant, pendant le mois du Ramadan, elle trouve la force de mettre tout ça de côté en retournant chez sa mère.

Finalement, qu'est-ce qui retient Jmiaa de tout plaquer, de retourner une bonne fois pour toute chez sa mère ?
- le poids d'une société, où la femme doit accepter d'être soumise.
- le poids d'une mère qui avait prévenu sa fille : « Ne reviens pas pleurer chez moi le jour où ça se corsera avec lui. », page 67.
- le manque d'estime de soi.

« Mais pour comprendre ça, tu dois le vivre », page 72, c'est ce que pense Jmiaa. Elle se retrouve inexpérimentée, loin de son village, face à une société masculine dominante, gavée de téléfilm où tout est beau, tout est rose et où tout se finit bien à la fin.

Combien de Jmiaa sont dans ce cas là ? Et pense que c'est la normalité de proposer son corps contre de l'argent ou tout simplement de subir les violences de son mari. Je pense c'est ce que l'auteure a voulu nous montrer à travers ce roman qui ressemble parfois à un documentaire, à une immersion dans la réalité comme nous pourrions le voir dans un reportage à la télévision.

Premier roman, déjà sélectionné dans plusieurs prix littéraires, qui m'a séduit par son réalisme et par le personnage de Jmiaa touchante, poignante, incisive, drôle aussi. Elle marque les esprits c'est certain.
Lu avant sa sortie nationale, je remercie les éditions Gallimard pour le partenariat avec Babelio.
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Pourtant intriguée par ce titre " La vérité sort de la bouche du cheval ", je reste sur une sensation mitigée après cette lecture. Premier roman de Meryem Alaoui, il est paru au moment de la rentrée littéraire de septembre 2018, aux éditions Gallimard.
L'histoire démarre en 2010 où Jmiaa, la narratrice, est prostituée dans un quartier populaire de Casablanca. Dotée d'un caractère bien trempé et de courbes généreuses, elle se voit confier la responsabilité d'une nouvelle recrue, Halima.
p. 14 : " [...] j'allume une cigarette et je tire rapidement dessus pour continuer à lui raconter mes journées en insistant bien sur l'essentiel : la quantité. Parce qu'il faut en voir ,des hommes, pour vivre. Au moins six par jour. Sept ou huit, c'est mieux, mais six, c'est déjà bien. "
Mais au fur et à mesure que l'histoire avance, Jmiaa se laisse aller aux confidences. Et si elle s'est retrouvée à faire le trottoir pour gagner sa vie, c'est parce que son mari Hamid lui en a suggéré l'idée. En effet, celui-ci est prêt à toutes les magouilles pour se faire de l'argent, et ses mauvaises fréquentations vont avoir raison de leur couple.
p. 74 : " A la paranoïa, aux joints, à ses nerfs et à l'argent qui se faisait de plus en plus rare, il a ajouté l'alcool. "
Mais il a pris ses jambes à son cou lorsqu'elle lui a annoncé qu'elle était enceinte. Mouy, sa mère, l'avait pourtant prévenu : Hamid n'était pas un homme pour elle, et il allait lui créer des ennuis. Bien qu'elle est acceptée de s'occuper de sa fille pendant ses longues journées de travail, elle ne peut s'empêcher de le lui rappeler.
p. 61 : " le truc qui me parasite vraiment, c'est que chaque fois que je vais la voir, elle me cuisine pour savoir où j'en suis avec le bâtard  de mon mari. Et chaque fois, elle se fait plus insistante que la précédente. "
Sur ce chemin de vie, ou plutôt de survie, il n'y avait guère d'issue favorable, et les espoirs d'une vie meilleure ne restaient que du domaine des rêves. C'est alors que son cousin lui parle d'une femme d'origine hollandaise, venue au Maroc dans l'intention de réaliser un film. Journaliste et réalisatrice, Chadlia cherche donc des femmes issues des quartiers pauvres de Casablanca pour témoigner de leur quotidien. C'est alors que le cousin propose une rencontre entre les deux femmes.
p. 104 : " - Ce film que je veux faire, c'est mon premier long métrage. J'ai presque fini d'écrire mon histoire. Mais je voudrais m'assurer que ce n'est pas à côté de la réalité. C'est pour ça que je voulais rencontrer... "
D'un physique plutôt ingrat, Jmiaa va alors la surnommer "Bouche de cheval". Elles vont se rencontrer régulièrement, mais discrètement. Sans complexe, Jmiaa va lui parler de son histoire personnelle. Touchant de plus en plus la journaliste par son franc parler et sa spontanéité, elle va lui faire une proposition des plus surprenantes.
p. 167 : " Je veux que tu joues dans le film. Et tu as une force qui se dégage de toi qui... qui remplit la pièce. Qui remplit l'écran. "
Passée la surprise, Jmiaa se prête au jeu, et s'astreint à une hygiène de vie et à une grande conscience professionnelle, oubliant presque ses soucis avec l'alcool.
p. 173 : " Peut-être qu'il y a des choses qui arrivent pour rien dans la vie. Et peut-être aussi que tout ce qui se passe, c'est déjà prévu, planifié, tracé, tout. Comme dans un film."
Devenue une célébrité dans son quartier, les habitants lui accordent enfin le respect tant attendu. Mais le tournage du film terminé, le retour à son ancienne vie se révèle douloureux, comme si cette parenthèse étoilée n'avait été qu'illusion.
p. 216 : " Aujourd'hui, on est vendredi. Je suis dans ma chambre, en ville. Et on a fini le tournage. Ils m'ont donné mes trois millions et demi, tous les costumes qu'ils avaient faits pour moi, du maquillage, des sacs et des foulards. Ils ont bien pris soin de moi. "
Mais une surprise aussi incommensurable aux yeux de Jmiaa peut-elle en cacher une autre, toute aussi improbable... ?
Ecrit à la première personne du singulier, ce roman se fait plus proche du lecteur, telles des confidences. Meryem Alaoui utilise  le langage courant, en adéquation avec le cadre du roman,ce qui lui donne une dimension réelle. J'ai apprécié la première partie du roman qui relate le témoignage de la vie d'une femme prostituée à Casablanca, une ville riche en couleurs et en animation, elle l'est aussi de violence et de misère pour cette héroïne. En revanche, la seconde partie me semble bien idyllique, voire utopiste. Jusqu'où le lecteur est prêt à se laisser prendre dans cette happy end à l'hollywoodienne ?
Lien : https://missbook85.wordpress..
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Retenu dans la première sélection 2018 du prix Goncourt, cet ouvrage d'une fille d'un ex ministre marocain brille par sa qualité littéraire et par le souffle qui l'anime me semble-t-il. La prose est douce et aimable tout comme l'inspiration qui guide l'auteur semble n'être qu'humour, tolérance et humanisme. Quelques pages, heureusement rares, instillent l'angoisse due au péril islamisme intolérant et criminel.
A bientôt de vous relire? Madame Alaoui
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Meryem Alaoui m'a emmené en voyage.
Elle me l'avait promis.
Elle m'a donc pris par la main avec son roman et nous sommes parti à la découverte du Maroc.
Mais elle ne m'avait pas tout dit.
Parce que une fois arrivés à Casablanca, elle m'a confié à Jmiaa.
Jmiaa comme guide ?
Jmiaa, la prostituée ?
Oui, elle-même.
Avec son franc-parler, son tutoiement, sa simplicité, sa joie de vivre, même dans les moments les plus compliqués de son existence.
Jmiaa vit de ses charmes, (la phrase est belle, mais sans aucun doute sujet à polémique pour les puritains, je ne débattrai pas sur le sujet, vous pouvez fermer vos yeux et vous boucher les oreilles, ces femmes existent...) elle élève seule sa fille, enfin, avec l'aide de Mouy (mère en arabe, oui, parce que en plus, Meryem, par la voix de Jmiaa va vous apprendre quelques mots de sa langue maternelle, autant joindre l'utile à l'agréable...). C'est donc les pérégrinations de cette femme que j'ai suivie tout au long de ce roman.
Loin des idées toutes faites, loin de l'image du pays renvoyée par nos cités ou banlieues, avec Jmiaa on est loin du Maroc des touristes.
Meryem Alaoui m'a entrainé au coeur de la vie des Autochtones, dans les rues, les bars, les maisons. J'ai partagé le couscous avec Mouy. J'ai bu des bières à m'enivrer avec Jmiaa et ses amies.
Parce que dans La vérité sort de la bouche du cheval, il y a plein de personnages, qu'on croise, avec qui l'on parle, avec qui l'on se bat parfois, avec qui l'on rit.
D'ailleurs, dans ce livre, on rit beaucoup. Parce que Meryem n'a pas voulu d'un récit larmoyant.
Parce que le destin peut frapper à votre porte où que vous soyez et qui que vous soyez.
Parce qu'un jour.....Bouche de cheval s'est approché d'elle, la vie de Jmiaa va changer.
Et si Cendrillon devenait Princesse avant minuit ? ( oui, bon d'accord, baisser vos boucliers, je sais, Cendrillon n'est pas une prostituée,  Oh ! Ce que vous pouvez être susceptible, si on peut plus faire de métaphore...)
Bref, moi je vous le dis, si vous avez envie de voyager, sans vous prendre la tête avec des réservations,  des heures d'avion, des valises, etc... si vous avez surtout envie de passer un bon moment, voici un livre de cette rentrée littéraire qui vous comblera.


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La narratrice, c'est Jmiaa, prostituée à Casablanca depuis que son mari a fichu le camp vers le mirage d'une vie meilleure en Espagne. « Pour vivre, je me sers de ce que j'ai. » (p. 17) Jmiaa n'a pas sa langue sans sa poche, elle est droite dans ses bottes et débrouillarde. « Ici, tu rencontres celui qui chaque jour boit sa honte et qui – le soir venu – te fait vomir la tienne, dans les toilettes sales et l'excuse d'un vin frelaté. Mais, au fond, tu te fous bien d'eux, de leur misère et de leur crasse. Parce que tu sais que c'est comme ça. Et que sur cette terre, chacun son lot. » (p. 26) Jmiaa aime la vie, la fête, l'alcool – peut-être un peu trop. Et sa fille, à qui elle tente de cacher son activité. Elle aime aussi Chaïba, son petit ami, aussi brutal qu'inconstant. Arrive Chadhia, dite Bouche de cheval, qui veut réaliser un film dans Casablanca et lui donner tous les accents du réel. « Il faut que ce soit comme dans la vraie vie. Pour que les gens y croient. Qu'ils pensent que c'est vraiment arrivé. » (p. 166) Pour ça, elle a besoin de quelqu'un qui connaît la ville dans ce qu'elle a de plus authentique. Pour Jmiaa, c'est une proposition en or. « C'était ça mon travail avec elle : l'aider pour qu'elle puisse finir d'écrire son histoire. Plus facile que ça, il n'y a pas. » (p. 123) Jmiaa compte bien en profiter autant qu'elle pourra et tirer tous les avantages de cette situation. D'autant plus que Bouche de cheval cherche maintenant l'actrice principale de son film.

Jmiaa est le genre de personnage que je désespère de croiser plus souvent dans la littérature. Quel plaisir de l'écouter parler – à qui, cela reste un mystère – et de suivre son regard profane sur le cinéma, mais acéré sur la nature humaine ! Dotée d'un gros bon sens et d'une tête solide, elle traverse les épreuves de la vie avec majesté et détermination. À l'image de sa protagoniste, le roman est généreux, drôle par moment, profond, vivant et très humain. Et le de Meryem Alaoui est de ceux qui enchantent dès les premières lignes, à la fois musical et chantant, aussi rythmé que mesuré. Avec ce premier roman, l'autrice fait déjà preuve d'un talent certain et je vais suivre de près la suite de sa carrière littéraire.
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En septembre 2015 sortait sur les écrans français Much Loved qui racontait le quotidien de prostituées de Marrakech. Un grand film, avec une touche de romanesque, mais aux résonances politiques très fortes qui n'ont pas d'ailleurs eu l'heur de plaire aux autorités marocaines. Se plonger dans La vérité sort de la bouche du cheval est par conséquent une expérience relativement familière même si le contexte est différent ne serait-ce que parce que l'héroïne du livre, Jmiaa, exerce son métier dans les quartiers populaires de Casablanca et que c'est elle qui s'exprime, à la première personne, au fil d'une sorte de journal intime qui raconte sa vie au jour le jour, souvent sordide, avec une verve jamais prise en défaut même si dérapant parfois dans une grossièreté un peu répétitive. L'immersion est totale, dans la première partie du roman, et le regard de Jmiaa, qui a dépassé la trentaine et est mère d'une fillette, séduit par son franc parler, sa lucidité et son absence de tabous pour décrire une société où l'hypocrisie et la corruption vont très bien ensemble. Rien de très nouveau sous le soleil de Casa mais l'énergie et la vitalité de Jmiaa attirent forcément la sympathie. Cela se gâte malheureusement dans la deuxième partie du roman qui tourne au conte de fées improbable si l'on considère la volonté de réalisme de l'auteure. Ce n'est pas que l'on veuille du mal à la belle de Casa mais les péripéties que La vérité sort de la bouche du cheval décrit dans ses dernières pages souffrent d'un grand défaut de crédibilité. Il est vraiment dommage que ce premier roman en grande partie réussi ne tienne pas ses promesses jusqu'au bout.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Jmiaa prostituée à Casablanca a l'optimisme chevillé au corps.

Pourtant sa vie, n'est pas un long fleuve tranquille.

Un mari fainéant qui la "prête" aux copains moyennant finance et la voilà propulsée sur les trottoirs avec ses compagnes d'infortune.

Une simple paillasse dans une chambre miteuse ; mais un humour à toute épreuve.

Sa route va croiser une jeune réalisatrice qui la mènera en Amérique, au Mexique, jusqu'à un succès inespéré pour cette jeune femme qui gardera ses traditions et ses valeurs familiales.

J'ai adoré son franc parler et ses descriptions d'une vie tellement à l'opposé de tout ce qu'elle avait pu connaître jusqu'alors.

C'est simple, drôle parfois, intelligent et je dirais "bien joué".

You You You You You You You You You You You You !
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J'ai découvert ce premier roman de Meryem Alaoui tout à fait par hasard, mis un peu en avant par la bibliothèque que je fréquente sur l'étagère des nouveautés, coups de coeur, etc. … C'est le titre qui m'a surtout attirée : La Vérité sort de la bouche du cheval

Rien d'équestre pourtant dans ce livre, mais de beaux portraits de femmes, ciselés, magnifiques de vérité et de réalisme, attachants, hauts en couleurs et pudiques à la fois.
« Bouche de cheval » est le surnom donné à une jeune femme marocaine : « un bâton tout maigre avec, au bout, des cheveux longs et en pagaille. […] Plein de grandes dents. Bouche de cheval ! […] debout devant moi, j'ai un balai qui s'est teint les poils en marron. Elle est tellement maigre qu'on dirait qu'elle va se casser en deux ». C'est une journaliste d'origine marocaine qui vit en Hollande ; elle veut réaliser un film sur la vie dans un quartier populaire de Casablanca ou vivent des prostituées.
Ce roman est l'histoire de sa rencontre avec Jmiaa, qui n'a pas choisi la prostitution mais qui y a été contrainte par son mari pour rembourser ses dettes ; abandonnée par lui depuis, elle partage son temps entre les passes avec les clients et les séries télé ; elle boit et se drogue un peu aussi pour se donner du courage et ne se plaint jamais ; cette femme est une battante qui aborde les vicissitudes du métier avec brio, profite de tous les bons moments, même les plus éphémères, et mène vaillamment sa vie entre ses collègues de la rue, ses clients, son proxénète, son amant de coeur, sa fille et sa mère. Quand elle découvre le milieu du cinéma, son regard acéré permet de belles mises en lumière des personnalités et des situations décrites.
Cette lecture fut pour moi un total dépaysement, une immersion dans un milieu où règnent la débrouillardise et une certaine forme de solidarité entre les filles malgré les rivalités et les mesquineries. le parcours de Jmiaa est atypique et jouissif, factuel et bouleversant à la fois ; il y a du sexe, de l'alcool, de la violence, des rires et des larmes, du rêve aussi…

La narration est rythmée, sans temps morts. J'ai surtout été happée par le style oral et paradoxalement soutenu. Jmiaa, la narratrice parle à la première personne et s'adresse à un interlocuteur qu'elle interpelle parfois, à moins qu'elle ne s'adresse directement au lecteur : « va savoir ». J'avais vraiment l'impression d'être à ses côtés et de l'écouter me raconter son histoire, entre deux bières ou deux cigarettes. J'ai entendu l'auteure dire dans une interview qu'elle avait pensé en arabe et écrit en français…
Le récit est précisément daté, de juin 2010 à mai 2018, et pourtant la narration ne fait pas penser à un journal intime, mais plutôt à un journal de bord ou à un témoignage. Meryem Allaoui a l'art de mêler le parler populaire et de belles métaphores poétiques pour décrire les ressentis. Les dialogues sont savoureux, percutants, pleins de finesse et de sensibilité, sous des dehors bourrus et insultants parfois ; la langue de la rue, colorée et imagée, entre moments de franchise et non-dits, rend ce récit vivant et réaliste, au plus près de l'humain et de la vie quotidienne.
À la fin du livre, un glossaire très utile permet de situer les célébrités marocaines citées ou de comprendre le sens caché de certaines expressions.

Ce roman est une belle découverte, une pépite entre portraits de femmes, hymne à la vie et peinture de la vie quotidienne dans un quartier populaire de Casablanca.
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Il est grand, mince et fort. Elle est folle de lui, toutes les filles du quartier en sont folles. le jour de leur mariage, on a égorgé un mouton. Les joints, l'alcool et les coups qui pleuvent et la déchéance pour gagner l'argent dont son mari a besoin. Elle s'appelle Jmaiaa, elle a trente- quatre ans, une fille, et pour vivre, elle se sert de ce qu'elle a. La narratrice Jmaiaa nous raconte la vie quotidienne des prostituées, on se pose, on se raconte des histoires, on se tortille les fesses pour attirer les hommes, savoir repérer les flics, on regarde allongées des feuilletons mexicains, on boit du vin, on s'adonne aux joints, on se tape des cachets, pour faire ce travail il faut avoir des couilles. Une journaliste venue de Hollande veut rencontrer une fille du marché pour un reportage, il y a peut-être un peu d'argent à se faire. Cette rencontre va changer la vie de Jmaiaa.

Les cent cinquante premières pages sont agréables à lire grâce à l'écriture si vivante de l'auteur, un langage fleuri, imagé et parfois cru, mais qui ressemble tellement aux personnages, c'est un style qui me plait bien le lecteur se sent immergé dans ce quartier populaire haut en couleur de Casablanca. Jmaiaa est un personnage qui m'a été tout de suite sympathique, elle a du caractère, elle est débrouillarde et elle dit tout ce qu'elle pense.

« Et c'est vrai que je marche toujours vite, sauf quand je cherche un homme parce qu'il faut être attirante quand même. Quand j'y pense, je ralentis et je fais comme ça. Je me déhanche lentement, je regarde à droite et à gauche; je m'appuie sur ma jambe gauche, puis sur ma droite, comme un dromadaire. de derrière, ça fait un mouvement lent, mais nerveux. : quand mes fesses montent c'est en saccades. Et quand elles descendent, c'est pareil. C'est appétissant, comme la Danette au caramel que j'achète à ma fille. »

Mais ensuite lorsque Jmaiaa devient actrice le récit s'enlise, seule à la fin du livre la découverte de l'Amérique par Jmaiaa, les immeubles qui montent au ciel, les magasins où tout est à profusion, le gaspillage, les clochards, permet de retrouver la verve qui m'a tant plu dans la première partie du livre.

Merci aux éditions Gallimard et à Babelio pour leur confiance.

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Tout d'abord je tenais à remercier Babelio et les éditions gallimard qui m'ont permis de découvrir ce premier roman.

Que je sois claire dans mes propos avant de vous en expliquer la raison, ce roman ne m'a pas du tout convaincue. Je me suis donc plongée dans ce premier roman qui aurait pu faire la différence, mais qui n'aura fait que rester dans les travers d'un genre aussi mal écrit que banal.

Que je m'explique, loin de moi l'idée de dénigrer le travail d'une auteure qui écrit autant avec sa poigne, que son verbe, mais dans un monde où les livres sont monnaies courantes, il me semble judicieux de savoir encore faire la différence.

Dans ce roman particulièrement caricaturale, j'ai senti un inintérêt toujours plus grandissant au fil de ma lecture. Il est vraie que j'ai pu lire de nombreux romans sur de nombreux pays et mettant en scène de nombreux personnages qui me faisait penser à ce texte. Mais dans chaque nouvelle lecture on recherche ce petit grain, cette petite étincelle qui nous fera découvrir une nouvelle lecture, un nouveau monde ou tout simplement ou histoire différente. le récit que l'on découvre ici est celui d'une jeune femme marocaine de 34 ans, qui nous raconte son quotidien entre prostitution et commérage et qui, à travers une rencontre particulière, verra sa vie changer.

Je ne reviendrais pas sur la grossièreté dans l'écriture qui à mes yeux ne fait que décrédibiliser l'auteure. Car lorsque l'on veut montrer la violence d'une scène ou d'une situation, la langue française à cette beauté de pouvoir être explicite tout en restant littéraire.
Je ne m'attarderais pas non plus sur cette fin tellement attendue... Cette histoire qui souhaite montrer la vérité et démontre la brutalité de son sujet mais qui ne parvient qu'à rester dans un mièvre récit déjà vu et revu.

Vous l'aurez compris mon inintérêt pour ce récit m'aura fait passer un moment fort ennuyeux. Sortez des chemins battus et livrez nous des histoires qui changent, qui choquent et dont le récit ne me rappellera pas un simple texte qui m'aura déjà été bien trop de fois raconté.
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