Citations sur Regarder l'orage dans les yeux (34)
Je comprends enfin mon histoire boutonnée à l'envers. Ma mère la nomade, mon père toujours là pour moi. Il était le roc solide sur lequel je pouvais m'appuyer. Il était mon chauffeur, mon chasseur de bestioles avec trop de pattes, mon cuisinier, mon tisseur de bonheur, mon docteur, mon liseur d'histoires, mon paratonnerre.
On ne regarde jamais d'assez près ceux qu'on aime. On vit à leurs côtés sans être suffisamment attentifs, on s'imagine qu'ils seront là pour l'éternité et quand ce n'est plus le cas, on parvient à peine à se souvenir des détails. Leur manière de tourner la page d'un livre, d'éplucher une clémentine, d'enfiler un manteau, de défaire un papier cadeau, de lever la main pour dire au revoir, de s'endormir sur le canapé. Ces petites choses uniques qui n'appartiennent qu'à eux, on les a oubliées. Les a-t-on seulement observées ?
Le bonheur n'est pas inné, il n'est pas donné. Les gens heureux le sont malgré tout, malgré les petits manteaux de douleur et les vertiges glacés à l'intérieur. Ils se baladent sans avoir peur de tomber dans le vide, croient en la vie, prennent la lumière dans leurs bras. Cueillent les instants choisis et en font une anthologie qu'ils relisent les jours gris.
Grâce à une association, ils [des SDF] ont passé trois nuits dans un foyer la semaine dernière, mais après on leur a dit qu'il n'y avait de la place que pour un, deux à la limite. (…) Ils sont retournés dans la rue. J'ai honte d'être du bon côté, ça me noue les tripes de les voir dehors par ce froid. On recueille les chats et les chiens abandonnés, on nourrit les oiseaux, pourquoi pas les humains ?
Je vois bien qu'elle [ma petite sœur] se raconte qu'à mon âge on est comme des adultes, quelqu'un de sérieux. J'aime faire fondre cette croyance en elle, partager ce secret que je viens de découvrir : grandir, ça peut, ça doit être amusant.
Je m'extirpe de mon nid, descends en râlant jusqu'à l'entrée, déverrouille la porte, à moitié dans les vapes.
- Salut !
Adam, mèches au vent, dentition resplendissante.
Au lieu de se décomposer en découvrant ma crinière en vrac et mes yeux chassieux, il se marre allègrement.
- Oh merde, quel con ! Tu dormais ?
- Non, j'étais en train d'imprimer la marque des draps sur ma joue.
Sur l'échelle de la bonne humeur, je me situe entre Gérard Depardieu devant un Perrier et Poutine sur un char de la Gay Pride.
Tu peux pleurer, ça fait du bien au coeur et ça lave les yeux.
Une personne qui navigue en pays d'adolescence ressemble à un conglomérat végétal de cactus, de roses trémières et de coquelicots. Elle pique, pousse dans tous les sens, éblouit par ses couleurs inattendues, et sa fragilité est aussi touchante que se résistance .
La vie est une course d'obstacles. Une fois que tu auras franchi les cent premiers mètres, tu passeras aux suivants et tu finiras par sauter les haies sans efforts.