De tout ce qu'il y a d'étonnant et d'inconcevable dans la vie, rien n'est plus merveilleux que la pensée humaine. Il y a en elle un élément divin, elle est le gage de l'immortalité, et c'est une force qui n'a point de limites.
Je ne désirais pas, d’une manière générale, aller au bagne. J’aime beaucoup la vie.
J’aime voir scintiller le vin doré dans les fines coupes de verre; j’aime à m’étendre dans un lit propre lorsque je suis fatigué; j’aime à respirer l’air pur au printemps, à admirer les beaux couchers de soleil, à lire des livres intéressants et intelligemment écrits. Je m’aime moi-même, la vigueur de mes muscles, celle de ma pensée, exacte et claire. J’aime le fait que je suis seul et qu’aucun regard curieux n’a pénétré la profondeur de mon âme, mes effondrements et ses gouffres sombres, au bord desquels la tête tourne. Je n’ai jamais compris ni éprouvé ce que les gens appellent l’ennui de vivre.
Le fait d’enlever la vie a quelqu’un n’avait rien pour m’arrêter. Je savais que c’était un crime sévèrement puni par la loi, mais presque tous nos actes sont des crimes, et il faut être bien aveugle pour ne pas le voir. Pour ceux qui croient en Dieu, ce sont des crimes envers Dieu; pour les autres, ce sont des crimes envers les hommes; pour ceux qui me ressemblent, ce sont des crimes envers soi-même. Ç’aurait été un grand crime de ne pas mettre mon plan à exécution après avoir reconnu la nécessité de tuer Alexis.
Les hommes sont frappés de surprise et de ravissement lorsqu’ils contemplent les sommets neigeux des hautes montagnes ; s’ils se comprenaient eux-mêmes, ils seraient bien plus émerveillés encore de leur propre pensée que de toutes les montagnes, ou de toutes les beautés et tous les trésors du monde. Le simple acte mental de l’ouvrier qui se demande quelle est la manière la meilleure de poser une brique sur l’autre ; - voilà le grand miracle et le mystère suprême.
Et je jouissais de ma pensée. Innocente dans sa beauté, elle se donnait à moi, passionnée comme une maîtresse, elle me servait comme une esclave et me soutenait comme un ami.
Le croire-vous ? Je pleurais d’amères larmes sur « La Case ce l’Oncle Tom »…
Qu’elle est merveilleuse, cette aptitude de l’esprit flexible et affiné par la culture à pouvoir s’incarner sans fin ! Il semble qu’on vit mille vies, qu’on descend dans l’obscurité de l’enfer, ou qu’on s’élève sur les clairs sommets d’où l’on embrasse d’un seul coup d’œil l’univers infini. S’il est dans la destinée de l’homme de devenir Dieu, c’est le livre qui sera son trône…
La parole de l'écrivain doit être aiguë comme une lame et ardente comme le feu.
Monde fou, heureux dans ta folie, ton réveil sera terrible !
La folie est un jeu avec lequel il est périlleux de jouer.
Il y a tant de ténèbres dans la vie de l'humanité et elle a si grand besoin de talents pour éclairer sa voie, qu'il faut prendre soin de ceux-ci comme des gemmes les plus précieuses, afin de justifier ainsi l'existence de millions de coquins et de sots.
Cette plaisanterie déplacée et qui marquait une telle absence de tact, abrégea sa vie de toute une semaine : j'avais, en effet, d'abord décidé de ne le tuer que le 18 décembre.