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Critique de glegat


glegat
09 décembre 2022
Ce livre fait partie de la collection « Apprendre à philosopher » des éditions RBA. Une série de 60 volumes imprimés en Espagne et rédigés par un collectif d'universitaires espagnols. J'ai la chance de posséder la collection complète acquise à raison d'un volume par semaine pendant plus d'un an. Les philosophes étudiés vont de Parménide à Derrida en passant par Descartes, Montaigne, Nietzche et Sartre pour ne citer que les plus connus. Chaque volume commence par une introduction introduisant les principales notions abordées par le philosophe concerné suivi de quatre ou cinq chapitres développant les idées principales de son oeuvre sans négliger des éléments biographiques. Une courte chronologie, un lexique et une bibliographie complètent l'ouvrage résolument didactique.

J'ai lu les premières pages de chacun de ses ouvrages et j'ai choisi celui consacré à Bertrand Russell (mathématicien et philosophe Britannique 1872-1970) pour commencer une lecture exhaustive. Je suis ravi de cette lecture qui m'a permis de découvrir un philosophe libertaire et pacifiste dont les engagements politiques on fait de lui l'un des plus remarquables représentants de la tradition humaniste.

Ce qui m'a d'abord attiré vers Bertrand Russell c'est son intérêt pour l'étude du langage et ses liens avec Wittgenstein, tous deux ont voulu créer un langage idéal pour l'analyse philosophique, débarrassé des ambiguïtés du langage ordinaire, qui donne lieu à des problèmes logiques. Sans connaître ni comprendre ses théories à ce propos j'ai eu l'intuition que ses travaux pouvaient m'intéresser. Après la lecture de cet ouvrage, je ne suis pas déçu et j'ai envie d'en savoir plus. Je viens de commander son « Histoire de la philosophie occidentale » en deux volumes.

russell est mathématicien de formation et s'est d'abord intéressé aux problèmes de logique avant d'aborder tout un ensemble de questions philosophiques portant sur une large thématique (l'éducation, l'État, l'économie, la religion, le bonheur). Il n'a pas bâti de grandes théories complexes et stériles, il s'est intéressé à des problèmes de société auquel tout le monde est confronté un jour ou l'autre, et c'est ce qui fait l'intérêt de son oeuvre.

Sur le plan politique, russell serait vu par beaucoup comme un socialiste avec une profonde sympathie à l'égard de la classe ouvrière. Il préconise très tôt la création d'une organisation internationale qui obligerait à faire respecter les règles internationales quitte à recourir à la force. Il n'est ni religieux, ni nationaliste et soutient que ces deux attitudes lorsqu'elles sont réunies, ne sont que le symptôme d'un primitivisme sauvage et cruel (page 68).

En 1915 il consacre la quasi-totalité de son temps à la lutte contre la guerre. Il critique l'État qui est une institution dont la finalité est le pouvoir ; telle est l'origine du problème. de fait le pouvoir étatique se présente comme une force capable de contraindre les citoyens à ce qu'ils ne souhaitent pas. russell fustige le patriotisme. le patriote, dit-il, ne tient pas en considération le mal dont peuvent souffrir ceux qui n'appartiennent pas à sa patrie. (page 73) Pour lui, l'État doit avoir pour but de substituer la loi à la force.

Ses idées sur le plan économique sont limpides. Il propose quatre critères permettant de juger un système économique :
a) le maximum de production
b) Une répartition juste
c) Une existence tolérable pour les producteurs
d) La recherche du bonheur

D'après lui, le capitalisme favorise uniquement le premier ; le socialisme les deux suivants. Or, russell soutient que le critère le plus important est le dernier et que ni le capitalisme ni le socialisme ne mettent l'accent dessus.

Son analyse sur la surconsommation qui conduit à rendre les gens malheureux est particulièrement pertinente (page 74).

Son activité pour la paix et contre le service militaire obligatoire lui valent 6 mois de prison ferme (il sera condamné deux fois à cette peine de prison).

russell a aussi réfléchi aux problèmes de l'éducation en recommandant que l'autorité nécessaire des enseignants soit accompagnée d'une grande révérence à l'égard des éduqués. Il est reconnu comme un grand intellectuel activiste, mais il est fortement critiqué par certain notamment concernant ses opinions en matière de sexualité et de morale en avance sur son temps comme beaucoup de ses idées.

Dans son essai « La conquête du bonheur » (1930), russell identifie les causes du malheur qui sont toutes liées à une préoccupation excessive pour des problèmes superficiels propres à ceux qui jouissent d'une vie confortable.
– Le mal Byronien (c'est être désabusé)
– L'esprit de compétition
– L'envie
– La peur de l'ennui et son corollaire la recherche de l'agitation (du divertissement dirait Pascal)
– La manie de la persécution
– Le sentiment de culpabilité.

Chacune de ces causes est développée dans l'ouvrage et russell propose ses solutions. En particulier il estime que le choix d'un métier qui nous correspond est un facteur essentiel d'épanouissement et de bonheur.

En 1950, il reçoit le prix Nobel de littérature en reconnaissance de ses écrits par lesquels il s'est fait le champion des idéaux humanistes et de la liberté de penser. Sa dernière bataille sera contre la guerre nucléaire au côté d'Albert Einstein. Il se battra également contre la guerre au Vietnam et protestera contre l'exclusion de Soljenitsyne de l'Union des écrivains soviétiques en raison de ses critiques à l'égard du régime communiste.

En 1970 il condamne l'État Israélien pour ses bombardements contre l'Égypte et meurt des suites d'une grippe le 2 février 1970 à près de 98 ans !


Je cite la conclusion de ce petit ouvrage qui présente une synthèse claire de la pensée de Bertrand Russell :

« Il a lutté jusqu'au bout pour laisser le monde dans un meilleur état qu'il ne l'a trouvé. Si le monde d'aujourd'hui est réellement meilleur, on le doit en grande partie à sa pensée et à son action. »

Pour ce qui me concerne je pense avoir trouvé là un maître à penser d'une envergure exceptionnelle et dont la longévité a permis de produire une oeuvre considérable et diversifiée qui contribuera à étancher pour les années à venir ma soif de comprendre ce monde.


Voici quelques citations de russell que j'apprécie particulièrement :

« Le problème fondamental dans le monde moderne, c'est que les idiots sont sûrs de tout et que les intelligents sont emplis de doutes ».

« J'ai un credo très simple : je crois que la vie, la joie et la beauté valent mieux que la mort et la poussière ».

– « Russell, seule la logique permet de bien penser », Francisco Manuel Sauri Mercader, collection « Apprendre à philosopher », RBA (2016) 157 pages.
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