Orgueil et préjugés

Il y avait aussi dans cette galerie des portraits de famille, mais qui n'avaient rien de bien attirant pour des étrangers. Elizabeth errait à la recherche de la seule figure dont les traits lui fussent connus. À la fin, elle tomba en arrêt devant ce qu'elle cherchait ; la ressemblance avec le modèle était frappante, avec un sourire sur la figure qu'elle se rappelait avoir quelquefois vu à Mr Darcy lorsqu'il tournait ses regards vers elle. Elle s'arrêta quelques minutes devant la toile, perdue dans une profonde contemplation, et y revint encore avant de quitter la galerie.

Comment pourrais-je m'engager à être plus sage que tant d'autres de mes semblables, si je venais à être tentée ? Ou comment savoir si je serais assez raisonnable pour résister ? Tout ce que je puis vous promettre, en somme, c'est de ne rien précipiter. Je ne me presserai pas de croire que j'occupe la première place dans ses pensées. Je ne chercherai pas à l'accaparer quand nous nous retrouverons en compagnie. Bref, je ferai de mon mieux.

Il restera, dans mon souvenir, comme l'homme le plus digne d'être aimé que j'ai rencontré, mais c'est tout. Je n'ai rien à espérer ni à craindre et rien à lui reprocher.

-Arrivez ici, ma fille, s'écria son père, dès qu'elle eut fait son apparition. Je vous ai envoyé chercher pour une affaire importante. J'apprends que Mr Collins vous a fait une offre de mariage. Est-ce vrai ?
Elizabeth répondit que oui.
-Très bien ; et cette offre de mariage, vous l'avez refusée ?
-Je l'ai refusée.
-Très bien. Arrivons maintenant au fait. Votre mère insiste pour que vous l'acceptiez. C'est bien cela, Mrs Bennett?
-Oui, ou je ne la reverrai jamais.
-Ainsi, vous avez une fâcheuse alternative devant vous, Elizabeth. À partir d'aujourd'hui vous allez être étrangère à l'un de vos deux parents. Votre mère ne vous reverra jamais si vous n'épousez pas Mr Collins, et moi, je ne vous reverrai jamais si vous l'épousez.

Mr Wickham était l'homme heureux vers qui se tournaient les regards de toutes les femmes, et Elizabeth fut l'heureuse femme près de laquelle il vint finalement s'asseoir ; l'agréable façon dont il entama immédiatement la conversation, bien qu'il ne fût question que de l'humidité de la nuit et de la probabilité d'une saison pluvieuse, fit admettre à la jeune fille que les banalités les plus communes, les plus usées, les plus vides, peuvent être rendues passionnantes par l'esprit du causeur

Pour Mr Darcy, il en fut heureux. Elizabeth était demeurée à Netherfield assez longtemps. Elle l'attirait plus qu'il n'aurait voulu et miss Bingley était impolie vis-à-vis d'elle et plus agaçante que jamais envers lui. Prudemment, il décida de prendre particulièrement garde à ne laisser échapper, désormais, aucun signe d'admiration pour elle ni rien qui pût lui suggérer la pensée qu'elle avait une influence sur son bonheur, conscient que si pareille idée avait pu lui venir, sa conduite pendant ce dernier jour aurait un poids décisif pour la confirmer dans cette idée ou pour l'en détourner. Fermé dans sa résolution, il ne lui dit pas dix mots pendant toute la journée du samedi et, bien qu'ils se fussent trouvés une fois seuls ensemble une demi-heure, il resta consciencieusement plongé dans son livre, sans même lever les yeux sur elle.

Elle est tolérable, mais pas assez jolie pour me tenter, et je ne suis pas d'humeur à prêter de l'intérêt aux demoiselles que les autres hommes dédaignent. [déclaration de guerre de Darcy à Elizabeth!]

A ceux qui ne changent jamais d'opinion, il incombe particulièrement de bien juger du premier coup.

-Elles sont sottes et ignorantes comme les autres jeunes filles, mais Lizzy est un peu plus vive que ses sœurs.
-Mr Bennet, comment pouvez-vous parler ainsi de vos propres enfants ? Vous prenez plaisir à me contrarier. Vous n’avez aucune pitié de mes pauvres nerfs.
-Vous vous méprenez, ma chère. J’ai pour vos nerfs la plus haute estime. Ce sont de vieux amis. Cela fait au moins vingt ans que vous en parlez avec considération.
-Ah ! Vous ne savez pas ce que j’endure.

Je n’aime véritablement que peu de gens et en estime moins encore. Plus j’en connais le monde et moins j’en suis satisfaite