Je pense que c’est d’abord l’histoire d’une perte, mais c’est aussi une histoire qui pose la question : « Si je pouvais revivre ma vie, comment la vivrais je ? »
Izzy se trouve au seuil de la mort et il revit sa vie telle qu’il aimerait qu’elle eut été. Donc si c’est un rêve, c’est un rêve constitué d’événements dont il n’a jamais fait l’expérience, mais qu’il aurait souhaité connaître. On se demande toujours : « Si j’avais une chance de recommencer ma vie, qu’est-ce que je ferais différemment ? » En bref, c’est de cela qu’il s’agit.
Mais si on veut bien y réfléchir, il existe une affinité certaine entre le fait de jouer la comédie et celui d’écrire des romans. Dans les deux cas, l’objectif consiste à donner vie à des êtres imaginaires, à prendre quelque chose qui n’existe pas et à le rendre réel, à le rendre crédible. Un auteur se sert de son stylo, un acteur de son corps, mais tous les deux tentent de faire la même chose.
Il a reçu (Willem Dafoe) le scénario un dimanche, a accepté le rôle le lundi, et quand il est venu répéter avec Harvey (Keitel) et moi le dimanche suivant, il possédait son rôle à fond. Il connaissait chaque réplique sur le bout des doigts. Le lendemain, un lundi, nous avons tourné sa première scène. Vous vous rendez compte? Il est absolument brillant dans ce rôle, et il a tout préparé en une semaine. Willem a sauvé le film. Il est arrivé et, à lui seul, il nous a tous sauvés. C'était héroïque, ce qu'il a fait, et je lui en suis profondément reconnaissant, si profondément obligé que je peux à peine y penser sans avoir les genoux qui flanchent un peu.
On termina donc le tournage en Irlande, le 4 janvier 1998. Paul Auster s’était révélé un réalisateur extraordinaire. A présent, le moment était venu pour lui de façonner le plus beau film possible avec son monteur Tim Squyres.
En douze moi et dix jours, depuis le premier coup de téléphone que Paul m’avait adressé, Lulu avait pris tous les coups possibles et survécu. Nous avions perdu le réalisateur et la vedette féminine prévus au départ.
Nous avions attendu les fonds jusqu’au premier jour du tournage.
La SAG nous avait menacés de grève et le risque d’actes terroristes nous avait privés des services de Salman Rushdie.
Nous avions réussi à créer l’effet de luminescence de la pierre à un coût raisonnable. Nous avions même survécu à L’Irlande. Le bébé d’Auster se portait bien. Ce sera formidable de le voir grandir.