Citations sur Trilogie new-yorkaise, tome 3 : La Chambre dérobée (29)
Ce que j'ai écrit jusqu'ici n'est qu'un prélude, une esquisse rapide de ce qui précède l'histoire que j'ai à raconter. S'il n'y avait pas autre chose il n'y aurait rien du tout - car rien ne m'aurait obligé à commencer. Seule l'obscurité a le pouvoir d'ouvrir au monde le coeur d'un homme, et l'obscurité est ce qui m'entoure dès que je pense à ce qui est arrivé.
Les histoires n'arrivent qu'à ceux qui sont capables de les raconter, a déclaré quelqu'un. De même, les expériences ne se présentent qu'à ceux qui peuvent les vivre.
Dès que je pense à mon enfance, à présent, je vois Fanshawe. C'était lui qui était avec moi, celui qui partageait mes pensées, celui qui m'apparaissait chaque fois que j'élevais mes regards au-dessus de moi.
Mais c'était il y a longtemps. Nous avons grandi, nous sommes partis pour des lieux différents, nous avons dérivé loin l'un de l'autre. Il n'y a là rien de très étrange, me semble-t-il. Nos vies nous emportent selon des modes que nous ne pouvons maîtriser, et presque rien ne nous reste.
On ne passe pas son temps à se cacher du monde sans s'assurer de recouvrir ses traces.
Après avoir tant monopolisé l'attention pendant son enfance, après s'être toujours placé au centre exact des choses, Fanshawe, avait presque disparu au moment où nous entrions au lycée et il évitait les lumières de la rampe, leur préférant une marginalité obstinée.
On ne peut pas ne pas être dépassé par les choses qui se produisent. On ne peut même pas les imaginer.
S'intéresser aux mots, s'investir dans ce qui est écrit, croire au pouvoir des livres - voilà qui submerge tout le reste, et en comparaison notre propre vie se rapetisse considérablement.
Les vies n'ont pas de sens. Quelqu'un vit, puis il meurt, et ce qui se passe entre les deux n'a pas de sens.
Les histoires n'arrivent qu'à ceux qui sont capables de les raconter, a déclaré quelqu'un. De même, les expériences ne se présentent qu'à ceux qui peuvent les vivre.
Nul ne peut franchir la frontière qui le sépare d'autrui et cela simplement parce que nul ne peut avoir accès à lui même. ( P 70)