« Le lendemain, je me sens de bien meilleure humeur.
Mes problèmes sont restés au placard et même les cours deviennent des récréations. En anglais, toute la classe est prise d'un fou rire incontrôlable, à cause du double sens cochon d'un mot. Même le prof rigole. Quand il m'interroge, je suffoque quasiment et je n'arrive même plus à émettre un son. Il insiste avec bonne humeur :
- « Oh ! We've lost Yanis ! Shall I call a doctor, Yanis ? »
J'arrive tout juste à souffler un minuscule « No » en m 'étranglant. Je me sens bien. S'il n'y avait pas les cours, ça serait cool, le lycée. Pourquoi je ne découvre que maintenant l'importance de mes amis ? Avec eux, je pourrais oublier. Je m'aperçois que depuis trois ans, je ne vis qu'en fonction de Camille, dans une attente perpétuelle. J'ai passé mes jours et mes nuits à attendre le moment où on serait ensemble pour de vrai. Et maintenant, il ne me reste rien. Je suis peut-être nul de ne pas avoir osé le premier pas, mais j'ai peur que ce que Camille a fait ne puisse jamais s'effacer. La confiance, ça ne se perd qu'une fois.
Je vais essayer de vivre sas penser à elle. Toujours avoir un truc à faire pour ne pas retomber dans cette déprime mortelle. Un jour, elle m 'avait dit que je ne profitais pas assez de la vie. Je vais en profiter maintenant tu vas voir ! »
(citation relevée par Myriam)
J'ai vraiment cru que j'allais le lui dire. Je m'étais préparé. Je l'aimais comme un fou, je n'avais plus de raison de douter. Mais quand je l'ai vue, au lieu de me lancer, j'ai freiné des quatre fers. Et plus j'attendais, plus ça devenait une montagne. Elle, elle devait stresser comme une malade, se demander si j'allais lui faire le coup du "restons amis". Jamais, je n'aurais imaginé que c'était si dur à dire...
"Je suis peut-être nul de ne pas avoir osé le premier pas, mais j'ai peur que ce que Camille a fait ne puisse jamais s'effacer. La confiance ça ne se perd qu'une fois."
"Pour les autres, on était déjà mariés. Mais pour nous ces petits gestes étaient juste un aveu. On ne s'était encore rien dit. On était potes depuis trop longtemps. Et puis, comment être sûr ? Comment savoir si elle aussi pensait à moi comme ça? Pourtant c'était forcément à moi d'agir."
Normalement, je sais que je devrais attaquer. C’est écrit comme ça : sauter sur tout ce qui bouge et qui ne dit pas « non ». Je ne devrais pas penser à Camille. Ou alors, penser à elle pour me venger d’elle. Je devrais être désinhibé par la danse, l’alcool, la nuit…et foncer ! Je donnerais beaucoup pour être comme ces chiens de chasse qui rôdent dans la salle, gouvernés par leurs pulsions. Mais je n’arrive même pas à me forcer.
Honnêtement, j’ai d’autres problèmes en tête. Et je préfère qu’elle pense que je me fous de sa vie, que je suis un petit con, plutôt que de devoir lui parler de moi