Kent State : Quatre morts dans l'Ohio

p.283-4.
C'est l'éditorialiste Clayton Fritchey qui a le mieux résumé la chose, en notant qu'à chaque fois que les forces de l'ordre tirent sur une foule désarmée, un " sniper invisible " est cité comme raison.  Source : Clayton Fritchey, éditorial, Cleveland Press, 28 mai 1970.

p.275.
Presque tous les extrémistes les plus véhéments avaient quitté la ville à l'arrivée de la Garde le samedi. La Garde, de son côté, n'a pas réalisé (et ne se souciait guère) que les fauteurs de troubles étaient partis et que les étudiants qu'ils harcelaient n'avaient que peu, voire rien à voir avec les événements qui les avaient fait venir sur le campus. Il s'agit d'une erreur de plus des renseignements - la pire bourde jusqu'à ce moment.

p.258.
Le 8 mai, le maire de New York, John Lindsay, un républicain, ordonne que le drapeau qui flotte sur l'hôtel de ville soit mis en berne en mémoire des quatre morts, et notamment du New-Yorkais Jeff Miller. Des manifestants pacifistes se rassemblent devant l'hôtel de ville. Ils sont attaqués par des centaines d'ouvriers des chantiers de construction, qui les tabassent violemment à l'aide de leurs casques et de matraques, puis pénètrent dans l'hôtel de ville et remontent le drapeau. La police, sympathisante, n'intervient pas. Les porteurs de casques de chantier se rendent ensuite à l'université Pace toute proche et rouent de coups tous les étudiants qu'ils y croisent. Soixante-dix personnes sont blessées. L'événement est baptisé " l'émeute des casques de chantier ". Nixon est ravi et invite les chefs des porteurs de casques à la Maison Blanche.

p.248.
Il n'y a pas de sniper, bien sûr.
Le garde est hospitalisé après avoir été victime d'un accès de panique, c'est l'unique victime du côté de la garde ce 4 mai.
Dans l'autre camp, quatre étudiants ont été tués. Et neuf autres blessés par balle, deux d'entre eux étant estropiés à vie. Seuls huit de ces treize jeunes faisaient partie des manifestants.
La plupart ont été touchés dans le dos ou alors qu'ils se mettaient à couvert.

p.244.
La compagnie C abandonne sa position pour examiner les faits. La seule assistance que la garde propose aux morts et aux blessés... c'est leurs bottes.

p.190.
Le brigadier-général Robert Canterbury, 55 ans, est l'adjoint de l'adjudant-général de la garde nationale de l'Ohio, sélectionné par le général del Corso en personne pour être le commandant en second.
Canterbury a rejoint la garde en 1949, après avoir été gratte-papier durant la 2nd guerre mondiale dans la marine marchande et dans l'armée de terre. Il n'a jamais pris part à un combat. Il a progressivement gravi les échelons en occupant divers postes administratifs. À une époque, il supervisait le dispositif de survie de l'Ohio en cas de guerre nucléaire ! Il possédait un restaurant et travaillait dans le bâtiment jusqu'à ce qu'il soit employé à plein temps par la garde à partir de 1960.
En tant que colonel, il a mené les 2 200 hommes de la garde qui ont écrasé les émeutes de Hough au centre de Cleveland en 1966. Il a alors été promu général.
En tant qu'officier à la tête de la garde ce 4 mai... il est catastrophique.

p.163.
- Il paraît que le noyau dur du SDS responsable de tout ça a quitté la ville. C'est devenu trop chaud pour eux, ici.
- Ah ouais ? Donc la garde défonce la gueule d'étudiants innocents ?

p.162.
C'est incroyable, John. La garde a pété les plombs ! Ils gazent, ils frappent, ils blessent ! C'est de la pure répression militaire ! C'est le rêve érotique de Nixon qui se réalise ! B-bon dieu, regarde-moi ! Je... je tremble tellement je suis en colère ! Les manifestants, les passants, ils ne faisaient pas la différence. Quel cauchemar ! Je n'avais jamais vu ça.

p.147.
Ce jour-là, les instructions sont d'y aller doucement avec les étudiants, d'engager le dialogue, de leur parler, de calmer les tensions et de détendre l'atmosphère.
Le major Harry Jones n'est pas intéressé par le calme et la détente.
Jones, 43 ans, est l'officier responsable du centre de formation à temps plein du 145e, en charge des exercices du week-end. Kent est sa septième affectation. Natif du Tennessee et "cul-terreux" autoproclamé, c'est un gaillard tout sec d'un mètre 75, connu pour être un dur à cuire pragmatique.

p.137.
Dès 1969, le FBI a infiltré le SDS à tous les niveaux. Lors de la calamiteuse convention nationale, des dizaines de délégués étaient en fait des taupes du FBI qui permirent aux Weathermen de prendre le contrôle !

J. Edgard Hoover pensait que les Weathermen et leur extrémisme clownesque allaient détruire le SDS, tandis que leurs rivaux qui prêtaient allégeance au parti travailliste progressiste, un parti politique communiste bien huilé, auraient fait du SDS une organisation redoutable et disciplinée. 

En mai 1970, le plan du FBI a fonctionné à la perfection. C'en est fini du SDS.