Parfois on tombe

Il n’y a d’arc-en-ciel que lorsqu’il pleut.
Et je répète cette phrase comme on chuchote une prière.

La vie, soudain, me saute aux yeux, la formidable nécessité de vivre, qui balaie tout et qui reste, quoi qu’on en dise, toujours la plus forte. Le pouvoir de la vie, de la vie sur la mort, de la vie sur l’anéantissement, de la vie comme un grand coup de grisou. Le souffle, impérial, gigantesque qui donne aux hommes la force et l’envie d’y croire éternellement en dépit de tout. Et l’équilibre d’une nature où chaque être vient compléter l’autre, dans laquelle le moindre brin d’herbe, l’insecte le plus minuscule a sa raison d’être, son avant et son après, son passé et son devenir.

Ce qu’on cherche est souvent beaucoup plus près de nous que ce qu’on croit.

Je n’ai pas écouté ce vieux monsieur qui, un matin d’octobre, m’entendant pester contre ma Louise qui refusait de marcher quand j’aurais eu besoin qu’elle coure, lui envoyant des « dépêche-toi » à n’en plus finir, me posa une main sur l’épaule en me disant :
- Mais, Madame, votre fille est fatiguée. Portez-la, embrassez-la. Elle vous suivra, vous verrez. Et ne vous en faites pas, on n’est jamais en retard.

La graine doit accepter de tomber et de s'enfoncer si elle veut un jour espérer donner naissance à un arbre

Un sentiment de mission menée à bien m'envahit. j'ai réussi à le rendre presque heureux. Et je contemple mon oeuvre avec la satisfaction du devoir accompli et la joie, surtout, de voir cet être perdu rendu à la vie.

— Sarah, la graine doit accepter de tomber et de s'enfoncer si elle veut un jour espérer donner naissance à un arbre.

Je vais aller recoller des morceaux, des petits bouts de moi.

Parfois on tombe. Et puis on se relève, un peu plus fort. C'est ça, la morale.

Ce qu'on cherche est souvent beaucoup plus près de nous que ce qu'on croit. Il dit que, quand on met tout dans la balance, l confort et tout le reste, l'exil est toujours une déchirure, une plaie qu'on pommade comme on peut, que même si on n'est pas trop mal dans le lieu dans lequel on a choisi de s'établir, il y a une partie de nous qui n'est jamais du voyage et qu'on laisse derrière, quoi qu'on fasse. Il dit qu'il a choisi, qu'il a vu, qu'il en est revenu. Il dit qu'on aura beau faire le tour du monde une ou cinquante fois, celui-ci sera toujours rond et la face cachée de la lune toujours cachée. Il dit que le comble , c'est que pour réaliser tout ça, réaliser tout l'amour qu'on porte à sa propre terre, il faut la quitter, sa terre, souffrir de son manque et avoir peur de mourir sans la revoir, parce que sinon, il dit, on ne peut pas s'en rendre compte vraiment.