Travailler à un livre, c’est courir la chance d’en voir d’autres jaillir à point nommé, ceux-là mêmes qu’on avait cherchés, dans les bibliothèques, sur les quais ou dans nos rêves, des livres qui éclairent et fécondent les nôtres.
Le réel serait-il sensible à nos fictions ?
Le sensible nous promet l’infini ; il arrive même qu’il nous l’offre.
Etre libre, c'est s'affranchir des biens tarifés, des plaisirs négociables, c'est réduire sa consommation, réduire ses besoins, aiguiser ses émotions.
(...)
S'affranchir, c'est courir la chance d'atteindre la joie.
Ecrire : persévérer dans une obstination déraisonnable, s'enraciner dans d'immobiles errances. L'évidence même pour Ezra Pound ...
"Immobile étais-je, arbre parmi les arbres
Sachant la vérité des choses jusqu'alors ignorées"
Le matin, j'entends les oiseaux ; le soir le silence.
J'entends aussi des fantômes. J'écris sous leur dictée.
Ecrire, pour moi, c'est vivre en paix parmi les ombres.
Comment fais-tu?
- Pour quoi donc?
- Pour avoir l'air heureuse?
- Mais je le suis vraiment!
- Toujours?
- Chaque jour m'apporte une occasion de l'être, une odeur, un sourire, un souvenir, et me voilà traversée, transportée, vivifiée... Quelle merveille tout de même!
-Prologue à la cuisine-
La littérature est devenue un tremplin social, et les livres, de vulgaires outils dans les mallettes des arrivistes.
-Les livres devraient être bâtis comme des maisons...
-Certains font encore preuve d'une humilité de rempailleur de chaise, généralement, ce sont les meilleurs. (...) Se lâcher, c'est à la portée de tous, alors qu'écrire, c'est faire preuve de contrôle, juger ses pensées, peser ses mots. Inventer un langage, son langage. Poser sa voix. Ce n'est pas si simple...
(...)-Crois-tu qu'on cesse d'écrire dès lors qu'on lâche son stylo ? Les livres ne jaillissent pas tout cuits des cervelles ! Ils procèdent de l'inespéré, de l'inattendu...(p.20-21)
-Exister contre-
Tout art est solitude (...) Ma demi-surdité m'avait ouvert la voie. Solitaire, je l'étais par décret de nature.
Le difficile ne fut donc pas d'entrer en solitude, ce fut de m'opposer à ceux qui voulaient m'en chasser, pour mon bien qui plus est. Ma mère demandant au Bon Dieu ce qu'elle avait fait pour mettre au monde une fille qui n'aimait guère s'y mêler. (...)
Le plus ardu, et je le confesse ici, ce fut de livrer bataille contre mon cœur, de faire comprendre aux quelques êtres qui le faisaient battre plus vite, que la solitude m'était source vive, qu'elle passait avant tout. (...)
Ecrire, c'est résister sans cesse. Ecrire, c'est exister contre. (p.52-53)
Je choisis l’ordre sensible contre la tyrannie sclérosante des ambitions.