Citations sur De la séduction (37)
Au fond ,rien ne s'oppose à ce que les choses puissent être séduites comme les êtres -il suffit de trouver la règle du jeu.
La séduction est toujours plus singulière et plus sublime que le sexe ,et c'est à elle que nous attachons le plus de prix.
On dit que le sommeil peut alourdir une paupière jusqu’à la fermer : ce regard pourrait avoir un pouvoir semblable. Les yeux se ferment, et pourtant des puissances obscures s’agitent en elle, Elle ne voit pas que je la regarde, mais elle le sent, tout son corps le sent, Les yeux se ferment, et c’est la nuit ; mais en elle il fait grand jour. »
Le désir n’est qu’un référent comme un autre, la séduction lui est immédiatement transcendante, et l’emporte par l’esprit justement. La séduction est un trait, elle court-circuite ici les deux figures destinataires dans une sorte de sur-impression imaginaire, où peut-être en effet le désir les confond, en tout cas ce trait provoque la confusion du désir, le renvoie à une indistinction et à un léger vertige, fait de l’émanation subtile d’une indifférence supérieure, d’un rire qui vient effacer son implication trop sérieuse encore.
Jamais la séduction ne se joue sur le désir ou la propension amoureuse – tout cela est vulgaire mécanique et physique charnelle : inintéressant. Il faut que tout se réponde par allusion subtile, et que tous les signes soient pris nu piège. Ainsi les artifices du séducteur sont le reflet de l’essence séductrice de la jeune fille, et celle-ci est comme démultipliée dans une mise en scène ironique, un leurre exact de sa propre nature, auquel elle viendra se prendre sans effort.
Le séducteur a pour vocation d’exterminer cette puissance naturelle de la femme ou de la jeune fille par une entreprise délibérée qui égalera ou dépassera l’autre, qui contrebalancera par une puissance artificielle égale ou supérieure la puissance naturelle à laquelle, contre toutes les apparences qui font de lui le séducteur, il a succombé dès le départ.
Comme les étoiles, les stars ou les actes terroristes « clignotent » : ils n’éclairent pas, ils ne rayonnent pas d’une lumière blanche et continue, mais froide et intermittente, ils déçoivent en même temps qu’ils exaltent, ils fascinent par la soudaineté de leur apparition et l’imminence de leur disparition. Ils s’éclipsent eux-mêmes, dans une perpétuelle surenchère.
« La Féminité est l’être aliéné de la femme. » « La Féminité apparaît comme une totalité abstraite, vide de toute réalité qui lui appartienne en propre, totalité de l’ordre du discours et de la rhétorique publicitaire. » « La femme éperdue de masques de beauté et de lèvres immuablement fraîches n’est plus productrice de sa vie réelle », etc., etc.
C’est par le défi qu’on suscite et ressuscite les puissances du monde, y compris les dieux, c’est par le défi qu’on les exorcise, qu’on les séduit, qu’on les capte, qu’on ressuscite le jeu et la règle du jeu. Pour cela il faut une surenchère artificielle, c’est-à-dire une simulation systématique qui ne tienne compte ni d’un état préétabli du monde ni d’une physique ou d’une anatomie des corps.
Ce qui caractérise en effet l’animal comme l’être le moins naturel du monde, c’est que c’est chez lui que l’artifice, que l’effet de mascarade et de parure est Le plus naïf. C’est au cœur de ce paradoxe, là où s’abolit la distinction de la nature et de la culture dans le concept de parure, que joue l’analogie entre féminité et animalité.