AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,86

sur 36 notes
5
4 avis
4
3 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une interdépendance étroite entre les économies
-
Il s'agit d'un ouvrage de vulgarisation sur la mondialisation qui ne nécessite pas de connaissance préalable. Sa première édition date de 2021. Il a été réalisé par Isabelle Bensidoun (DEA d'économie mathématique et d'économétrie) & Sébastien Jean (doctorat d'économie) pour le scénario, Enzo pour les dessins et Sandrine Bonini & Élise Follin pour les couleurs. Les coscénaristes sont membres du CEPII : le Centre d'études prospectives et d'informations internationales, spécialisé dans la recherche et l'expertise en économie mondiale. Il comporte 234 pages en couleurs. L'ouvrage est structuré en trois partie, la première comprenant 6 chapitres, la seconde 5, et la troisième 8, avec un prologue, un épilogue et quatre pages explicitant les sources des chiffres et des informations.

Comment raconter la mondialisation en BD ? le bédéaste Enzo se rend à un café où il a rendez-vous avec les deux économistes Isabelle et Sébastien. Ils s'interrogent sur la manière de traiter leur sujet, qu'ils estiment très abstrait. Enzo fait observer que la perte d'emploi qui accompagne une usine qui délocalise sa production à l'étranger, c'est très concret. Ils font le constat que la mondialisation englobe aussi bien la destruction d'emplois à certains endroits que la création dans d'autres, qu'il y a des gagnants et des perdants, que les consommateurs apprécient les prix bas mais que les salariés se sentent menacés. Enzo leur demande de définir la mondialisation d'un point de vue personnel.

Isabelle répond la première : ce qui est positif pour elle, c'est la possibilité, avec la mondialisation, d'avoir un plus grand accès à l'Ailleurs, à ce qui est différent, à ce qui est au départ étranger. En quelque sorte, la mondialisation est un vecteur d'altérité. C'est la possibilité d'avoir chez soi, avec soi, des choses que l'on ne pouvait, auparavant, avoir qu'à l'étranger. Malgré tout, ce n'était pas mal ce temps où il fallait se déplacer physiquement pour y accéder, mais l'avantage, c'est qu'avec la mondialisation, c'est disponible pour un plus grand nombre. C'est-à-dire aussi à ceux qui n'ont pas les moyens de se déplacer. Donc la mondialisation, c'est plus d'ouverture, pas seulement commerciale, financière, mais aussi plus d'ouverture à l'autre. Revers de la médaille, quand on se déplace, on retrouve, davantage aujourd'hui qu'hier, la même chose que chez soi. Pas facile de trouver encore de l'exotisme ! Donc plus de diversité chez soi, mais plus d'homogénéité globalement. Et la mondialisation telle qu'elle s'est développée jusqu'ici a eu pas mal d'effets négatifs. Elle a pesé sur l'emploi et sur les salaires des moins bien lotis dont on s'est peu préoccupé. Sans oublier que la finance, quand elle n'est pas suffisamment encadrée, porte en elle les germes de crises aux effets dévastateurs sur l'économie réelle. L'ouvrage se compose ensuite de trois grandes parties, la première sur l'état de la mondialisation au temps présent, la seconde sur son historique en deux temps, et la troisième répond aux questions polémiques.

Dès la couverture, le lecteur s'interroge sur la forme narrative que les auteurs vont adopter. C'est un véritable défi que de parler d'un sujet aussi abstrait en bande dessinée, de vulgariser des connaissances conceptuelles en images. S'il a lu plusieurs ouvrages de la collection La petite bédéthèque des savoirs (Le Lombard) ou d'autres du même genre, le lecteur connaît les possibilités de mise en scène. Ici, les auteurs ont choisi de se mettre en scène, s'interrogeant et se répondant, et aussi d'avoir des pages d'explications avec des illustrations, et d'autres mettant en scène une personnalité en train d'expliquer, soit en s'adressant à des interlocuteurs invisibles, soit en les mettant en scène dans une situation. Il se produit donc assez vite la sensation de découvrir un texte prérédigé sous la forme d'un exposé, avec un dessinateur qui fait de son mieux pour apporter des éléments visuels supplémentaires, parfois donnant l'impression d'être déconnectés du texte. Au fil des séquences, le lecteur peut voir les trois auteurs discuter ensemble dans un café, chez l'un des auteurs, ou régulièrement sur un fond uni dépourvu de tout arrière-plan. Cela apporte une forme d'animation à la discussion, même si parfois le lecteur se dit que tel propos pourrait être tenu par n'importe lequel des trois sans que cela ne change rien au déroulement de la discussion, comme si leur identité était interchangeable.

Dès la fin du prologue, le lecteur prend la mesure du savoir-faire de l'artiste avec un traveling arrière prenant de la hauteur sur le quartier de la ville où se trouve le bar, montrant une vue du ciel très soignée. Il a également pu apprécier le naturel des personnages, dans leur langage corporel et les expressions de leur visage. le premier chapitre débute par une mise en situation : un monsieur qui frappe aux portes réalisant un sondage où les gens répondent à la question : qu'est-ce que vous évoque la mondialisation ? de séquence en séquence, le lecteur peut ainsi regarder une femme parcourant les rayons d'un supermarché avec son caddie, une vue éclatée d'une machine à laver, une chaîne de montage de voitures, le cheminement d'un container d'un poids-lourds à un navire, des pipelines, une ville industrielle dont l'usine a fermé, le Citarum pas très loin de Djakarta, la capitale indonésienne, l'un des fleuves les plus pollués au monde, et beaucoup d'autres choses encore. Ces images viennent illustrer l'exposé, parfois en reprenant ce qui dit la phrase qui les accompagne, parfois en suivant une idée parallèle pour montrer concrètement un élément (par exemple le parcours d'un container). Elles apportent une diversité visuelle, même si le lecteur s'aperçoit qu'à quelques reprises il a oublié de regarder les dessins, entièrement focalisé sur le texte qui est autosuffisant dans ces passages.

Dans la mesure où il s'agit d'un ouvrage avec une forte composante historique, l'artiste réalise également des reconstitutions d'époque : Paris au milieu du XIXe siècle, la traversée de l'Atlantique en bateau à vapeur, l'évolution des modèles de téléphones. Très régulièrement, il représente également des personnalités historiques des siècles passés ou des contemporains : Arnaud Montebourg, Serge Tehuruk (Alcatel), Stan Shih (Acer), Donald Trump, Xi Jinping, Édouard Philippe, Emmanuel Macron, Dominique Strauss-Kahn, Margaret Thatcher, Ronald Reagan, Boris Johnson, Malcom McLean, Karl Polanyl, Robert Mundell, Pascal Lamy, Milton Friedman, Anton Brender, Paul Krugman, et encore de nombreux autres économistes. le lecteur reconnaît aisément plusieurs d'entre eux, par exemple Mick Jagger, et constate que leur portrait est ressemblant, et que le dessinateur passe dans un mode plus réaliste et moins simplifié pour les représenter. Au fil de l'exposé, les auteurs utilisent également la richesse des possibilités visuelles pour des images parlantes, ce qui fait mettre en oeuvre encore d'autres facettes du talent d'Enzo. Ces schémas et infographies sont de nature diverse : patron de chemise, détails des parties d'une chaussette, éclaté d'une machine à laver le linge, cartographie des chaînes de valeur d'un jean, courbe d'évolution du nombre d'automobiles produites en France en million de véhicules, plateau de Monopoly, histogrammes cumulés, chaîne de prise de risques des crédits accordés aux ménages américains, etc.

En commençant, le lecteur part avec l'a priori d'un ouvrage ardu, et d'une lecture lente pour pouvoir assimiler toutes les informations. Il constate que les auteurs ont effectué un impressionnant travail de structuration de leur propos en 3 parties, chacune comprenant des chapitres courts, et que le rythme de la lecture est assez soutenu. Cela traduit un gros travail de conceptualisation pour rendre un tel propos aussi accessible et facile à lire et à assimiler, en introduisant des termes techniques précis (par exemple le trilemme de Robert Mundell, ou les inoubliables zinzins = les investisseurs institutionnels). La progression de l'exposé est très claire : commencer par expliquer la mondialisation par des exemples, en particulier la confection d'un jean, puis raconter les deux phases de la mondialisation, et enfin répondre aux questions polémiques, en s'appuyant sur les deux parties précédentes. La mondialisation favorise-telle la croissance ? La mondialisation améliore-t-elle le pouvoir d'achat des Français ? La mondialisation fait-elle davantage de perdants que de gagnants ? Faut-il relocaliser la production ? Peut-on dompter la finance ? La mondialisation est-elle compatible avec l'environnement ? La mondialisation, terreau du populisme ? Faut-il jeter le bébé avec l'eau du bain ? Lors des deux premières parties, les auteurs adoptent un positionnement factuel parvenant à ordonner des événements et des prises de décisions pour faire apparaître les paramètres de la mondialisation et sa nature, ainsi que le degré auquel elle est parvenue, à l'échelle mondiale, sur la base d'exemple partant de la France. Dans la dernière partie, ils portent des jugements de valeurs, répondant de manière explicite à ces questions, sans parti pris politique, ou même économique. Pour reprendre leur formulation, la troisième saison de la mondialisation s'annonce toujours plus complexe, et pas forcément jouée d'avance, l'omni-libéralisme économique se heurtant encore à des obstacles, les États n'ayant pas totalement perdu leur pouvoir.

Le titre de l'ouvrage promet une présentation de l'histoire de la mondialisation, et un rapide feuilletage révèle ce qui ressemble à un exposé dense, richement illustré. du point de vue BD, les auteurs n'ont pas réussi à échapper aux têtes qui parlent, et à l'impression de certains passages où le texte est livré clé en main, et bonne chance au dessinateur pour y accoler des visuels. Globalement, la lecture fait apparaître un ouvrage très soigneusement conçu, à la fois dans sa structure, et dans l'utilisation de la richesse visuelle que permet la bande dessinée. Les pages se tournent rapidement, les notions sont claires et faciles à assimiler, et les auteurs tiennent leurs promesses : retracer l'histoire de la mondialisation et faire un bilan sur ses aspects les plus polémiques, en creusant les questions plus loin d'une simple vulgarisation.
Commenter  J’apprécie          180
La BD "La folle histoire de la mondialisation" est un essai de vulgarisation visant à nous expliquer les origines de la mondialisation, à la définir et à nous donner les clés pour mieux débattre sur ce vaste sujet.

La mondialisation n'est ni vertueuse ni totalement mauvaise. Seulement les bénéfices valent-ils le coup face aux problematiques et destructions qu'elle cause (dans la sphère humaine mais aussi bien au-delà) ?

Ce que j'ai retenu, par exemple, c'est que la mondialisation s'est accéléré dans les années 1990 à 2000 (quand j'étais gamine), que de nombreux pays en développement sont devenus des acteurs de la mondialisation en misant sur la production et les exportations.
La mondialisation donne le vertige au fil des exemples fournis par les auteurs. Peut-être est-ce naïf de ma part, mais je ne pensais pas que le système pouvait être aussi complexe.
La problématique de re-localisation de l'industrie est également abordé, ainsi que la crise du Covid, qui a permis de montrer l'interdépendance des Etats sur des secteurs sensibles (médical, alimentaire par ex). Bref, une tonne d'information, pas toujours simple à digérer, lorsqu'on n'a pas vraiment de notions d'économie. Une dose de curiosité suffit à surmonter cela.

La force de cette BD est que les auteurs ne prennent pas parti pour ou contre la mondialisation.
C'est une lecture nécessaire et accessible pour qui veut cerner notre monde et notre époque.
Commenter  J’apprécie          30
Cette BD est découpée en 3 grands chapitres :
- Tout le monde dans le même bateau, pour prendre conscience de la forte dépendance aussi bien pour les marchandises, que pour la finance, les services et les personnes. Après avoir abordé la perception de la mondialisation par les Français, les auteurs illustrent la complexité de ce concept à travers des exemples concrets tels que le "made in France" ou encore les multinationales.
- Il était une fois la mondialisation, qui nous propose de revenir sur les origines de ce phénomène, avec un état des lieux du début du XIXème siècle jusqu'à nos jours. La mondialisation est d'abord cantonnée aux pays développés avant de s'étendre dans les années 1990 aux pays en développement et de permettre dans les années 200 une ouverture commerciale et financière sans précédent.
- La grande défiance, qui montre les apports et les limites de la mondialisation sur la croissance, l'emploi, le pouvoir d'achat, l'environnement ainsi que les excès de la finance. La crise financière de 2008 et la crise sanitaire actuelle ont révélé la nécessité de se coordonner au niveau international et d'organiser différemment les interdépendances.
Très complète, cette bande dessinée fait le tour du sujet de la mondialisation en répondant à différentes questions que nous pouvons nous poser, en décryptant les excès et en apportant un éclairage sur les enjeux majeurs à venir... sans tomber dans le pessimisme exacerbé. A la fin, nous pouvons retrouver les sources et des références pour approfondir un sujet si nous le souhaitons. Un ouvrage incontournable pour bien appréhender le monde qui nous entoure et se donner les moyens de rééquilibrer le modèle économique en fonction de nos priorités.



Lien : https://www.carnetsdeweekend..
Commenter  J’apprécie          30
Une synthèse des grandes étapes de la mondialisation , avec dates et concepts clés expliqués pour tenter de prendre du recul sur les débats actuels liés à la mondialisation.
A mon sens le contrat est rempli : le livre donne une vision plutôt complète et haute des origines de la mondialisation, aux alentours de 1820, jusqu'aux événements récents et leurs implications futures possibles.

Certains points restent complexes à comprendre et m'ont nécessité une relecture des passages concernés pour bien saisir les notions , mais l'ensemble reste synthétique, digeste et très utile !
Commenter  J’apprécie          00

Lecteurs (125) Voir plus



Quiz Voir plus

Les personnages de Tintin

Je suis un physicien tête-en-l'air et un peu dur d'oreille. J'apparais pour la première fois dans "Le Trésor de Rackham le Rouge". Mon personnage est inspiré d'Auguste Piccard (un physicien suisse concepteur du bathyscaphe) à qui je ressemble physiquement, mais j'ai fait mieux que mon modèle : je suis à l'origine d'un ambitieux programme d'exploration lunaire.

Tintin
Milou
Le Capitaine Haddock
Le Professeur Tournesol
Dupond et Dupont
Le Général Alcazar
L'émir Ben Kalish Ezab
La Castafiore
Oliveira da Figueira
Séraphin Lampion
Le docteur Müller
Nestor
Rastapopoulos
Le colonel Sponsz
Tchang

15 questions
5256 lecteurs ont répondu
Thèmes : bd franco-belge , bande dessinée , bd jeunesse , bd belge , bande dessinée aventure , aventure jeunesse , tintinophile , ligne claire , personnages , Personnages fictifsCréer un quiz sur ce livre

{* *}