Citations sur Back in the Sixties (en français) (6)
Un anthropologue américain, Marshall Sahlins, rappelait qu'il y a deux manière d'être riche : travailler beaucoup, désirer peu. Je ne suis pas loin de regarder comme un luxe suprême de rester une matinée entière, assis parmi mes emblables, dans le vent tiède, à ne rien faire que laisser le temps passer.
Les tenants de la redistribution ont rendu les armes, ceux du partage inégal – c'est la doctrine néo-libérale – triomphé sur les cinq continents. Tout homme se regarde désormais comme un agent économique dont la fin consciente ne va plus qu'à optimiser la vente et l'achat de services et de biens tarifés sur le marché global. Cette figure succède à d'autres qui occupèrent, quand ce fut le moment, le devant de la scène – latifundiaires, patriciens, barons, maîtres de jurande, bourgeois manufacturiers de la grande industrie et de la finance… -, pour reprendre l'énumération fulgurante du jeune Marx dans son Manifeste. Il y a une différence capitale toutefois. C'est qu'elles avaient pour répondant les esclaves, les serfs, les compagnons, les salariés agricoles, les prolétaires. Elles allaient par couples, dont la querelle fut l'histoire même. Puis le monde entier semble avoir migré d'un seul et même côté. La contradiction, le principe moteur se sont évanouis, le fleuve impétueux du devenir perdu dans les marécages. Des voix ont déjà proclamé que l'histoire est finie. On en est là
D’autres, par bonheur, brillant d’un éclat juvénile, conservent la fraîcheur étourdissante du printemps. Parmi eux, les tribulations d’une poignée de jeunes hommes dans la Sierra Maestra, leur entrée, quelque temps après, dans La Havane, la réforme agraire et la Baie des Cochons, l’exemple, la liesse communicative dont une île des Caraïbes devient, un beau jour, le foyer. Cuba.
Partout les Dinky Toys grandis avec l’enfant qui a refusé les reniements de l’âge, la fin des temps, et puis, l’absence, d’abord désolante, ensuite réjouissante, au deuxième et au troisième degré, de la couche de peinture qui rendrait supportables, sinon agréables, les pâtés de béton qu’on dirait transplantés de la moyenne Sibérie sous les cocotiers.
Il suffit, on le sait, d'un imperceptible détail, de la plus petite contradiction dans la somme des attributs qui constituent ce qu'on baptise du nom de réel pour qu'il vole en éclats. La littérature est coutumière de ce procédé, dont les conséquences sont incalculables. Prenons l'histoire la plus prosaïque qui soit, le héros le plus terne, un employé de bureau sérieux, scrupuleux, qui se lève à la même heure, chaque jour, enfile ses habits bon marché mais propres, boit son café et quitte sa famille pour être ponctuel au travail. Un matin, au réveil, il découvre qu'il s'est métamorphosé en cafard. A cela, rien d'extraordinaire. La Belle, au bois dormant, les histoires de bonne femme, les contes pour enfants nous ont habitués à ces prodiges faciles.
Sur le Malecon, qui est l'équivalent de la promenade des Anglais, de la 5e Avenue ou des Champs-Elysées, il n'y a pas un lampadaire sur dix qui marche, plus une bouche d'égout munie de son couvercle, une bordure de trottoir qui ne soit effondrée, emportée. Et ça aussi, c'est normal. C'est l'effet du temps lorsqu'on a décrété qu'on n'en tiendrait pas compte parce qu'on en voulait pas. Il n'apportait rien de bon. On patientera jusqu'à ce qu'il se décide à prolonger, plus exactement à dépasser en conservant, selon la formule célèbre, celui d'avant, lequel, pour n'avoir pas passé, restevivant quoique poli, passablementécaillé, décati. C'est la rançon à payer quand on dit non.