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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ecrit épuré, chavirant, sur le deuil de l'Etre aimé, présenté sous forme de journal intime...où l'auteur cherche à rester en fusion avec la femme de sa
vie, tout en trouvant des solutions pour dépasser sa souffrance-chagrin...et magnifier toutes leurs complicités, richesses vécues en chorus....

"15 décembre. Il suffit que j'entende quelques mesures d'une musique que nous aimions pour que notre bonheur commun s'empare de moi et me bouleverse. (...)
18 déc. M'en sortirai-je par le récit ? Sera-ce le moyen de recréer un tout, après la perte ? "(p. 27)

Après le coup de coeur d' "Une rencontre à Pékin " qui m'a fait faire connaissance avec ce brillant essayiste- sinologue, ma curiosité fut largement piquée ...!
Je poursuis donc avec un texte plus délicat, infiniment personnel, mais empreint d'une extrême pudeur ...hommage absolu à la femme aimée, morte trop tôt..

Récit bouleversant qui dit la perte de l'épouse, après près de cinq décennies d'une aventure commune... Il exprime à sa manière son souhait d'honorer la personnalité unique de sa femme, sa détermination à vivre pour rester à la hauteur de tout ce qu'ils ont vécu ensemble...
Il formule également avec calme son agacement vis à vis de la gêne, d'une sorte d''hypocrisie sociale des proches, qui évitent de parler, de nommer "la disparue"...

"Cette mort subite a mis fin à une aventure de quarante-huit ans. (...) Ma pensée était à l'arrêt, j'avais en moi un jour blanc. (...)
Quand on perd son conjoint, les autres vous mettent à part des vivants." (p. 12)

L'homme est peu banal, se refuse catégoriquement de s'apitoyer sur lui-même, se montre "volontariste", rejette larmoiements, pitié et tuti quanti...
Ce mari aimant et toujours "amoureux", du fond de sa douleur, ne veut surtout pas geindre... Il a un besoin vital et une exigence intime de transformer ce deuil, en "cadeau de mémoire et d'action" pour l'épouse vénérée....

Je pense ce texte bouleversant à plus d'un titre, mais directement compréhensible par des personnes ayant traversé cette même épreuve; j'ai retrouvé intensément quelques interrogations, angoisses personnelles vécues lors de la disparition de mon compagnon....

Cet écrit intime reste différent, atypique, car il y a un refus absolu de la complainte et une volonté hors-norme, même dans cette épreuve qui reste insupportable... L'auteur veut continuer à travailler, à faire des recherches; une exigence intellectuelle démultipliée , pour lui-même, certes, mais aussi
une exigence qui se veut un cadeau offert à son épouse, Wen....


"Quand on perd son conjoint, les autres vous mettent à part des vivants. Voyant à côté de vous une place vide, ils en déduisent que vous n'êtes plus qu'à demi et que vous vivez dans le manque - alors qu'au contraire la vie n'a jamais été aussi intense.
Supportes-tu la solitude ? me demandaient certains. Cette question me sidérait, car Wen était extraordinairement présente - mais d'une présence devenue changeante et imprévisible. Cette instabilité nouvelle m'occupait tant qu'il m'importait peu d'être incompris des autres."

Curieusement, ce petit texte dense peut offrir aide et courage à d'autres , blessés par la mort d'un conjoint...
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Jean-François Billeter est un universitaire suisse de langue française, spécialiste de la Chine. Il a publié plusieurs ouvrages sur l'écriture, la philosophie, la culture chinoise, mais s'est aussi intéressé à l'hypnose et autres matières proches de la psychanalyse. Parti jeune à la découverte de l'empire du milieu, il va y rencontrer l'amour de sa vie, Wen. Il raconte ces années-là dans "Une rencontre à Pékin" dont j'ai prévu la lecture très prochaine...

D'habitude, je ne suis pas fan des récits autobiographiques, et j'avoue que j'ignorais totalement qui était Jean-François Billeter au moment de craquer instantanément à la vue de ses deux petits ouvrages et leur couverture représentant cette gracieuse femme asiatique. Cette femme n'est autre que Wen. Le présent opus, lu en premier, "Une autre Aurélia" est une sorte d'ovni littéraire, qui comporte une forte charge émotionnelle.

Alors que le couple de septuagénaires est inséparable depuis près d'un demi-siècle, Wen après un malaise nocturne plonge dans un coma d'une semaine et finit par s'éteindre. Jean-François est hébété de chagrin et de douleur, et va décider de coucher sur le papier ce qu'il ressent, au fil des jours.

Ce carnet de bord commence ainsi le 12 novembre 2012, quelques jours après la mort de sa femme, et s'achève le 16 avril 2017. Saisi par cette disparition subite, il va concevoir ce journal évidemment comme une thérapie, un moyen de surmonter le deuil par un travail de résilience, mais c'est peut-être aussi et surtout son approche analytique, quasi-clinique de son propre sentiment, qui va peu à peu l'aider à surmonter l'épreuve et retrouver une forme de sérénité.

Les jours s'enchaînent comme des montagnes russes, l'auteur est un jour bien, un jour mal, sans cesse à la recherche d'une forme de distanciation, mais pas trop (surtout ne pas l'oublier, Elle !), sorte de funambule sur le fil du souvenir : tantôt il maîtrise l'émotion qui menace de le submerger, tantôt il lâche-prise et se laisse envahir par le chagrin. On a le sentiment que l'homme qui s'est passionné pour l'hypnose et autres matières spirituelles se livre à une expérience grandeur nature, sur lui-même, afin d'appréhender les mécanismes qui permettent de guérir de son deuil.

Le lecteur vit littéralement les sensations de cet homme, et perçoit des instantanés. Il est le témoin direct de l'humeur, du ressenti du survivant, qui concentre souvent ses impressions en une phrase, parfois un peu plus. Parfois, avec l'émotion, une tension intérieure le pousse à intervenir deux ou trois fois par jour. Cependant au fil du temps, on sent que les réflexions s'espacent, signe qu'un calme intérieur commence à se frayer un chemin dans le coeur et l'esprit de cet homme. Wen devient peu à peu une sorte d'icône, irréelle, évanescente, dont les traits restent souvent flous et l'image difficile à convoquer la journée...alors qu'elle apparaît de plus en plus régulièrement dans les rêves nocturnes de Jean-François, dans des "aventures" qu'il prend petit à petit un certain plaisir à retrouver pour la nouveauté, l'imprévu qu'ils apportent...Wen ainsi sublimée, l'auteur en vient à comparer son expérience à l'Aurélia de Gérard de Nerval, constatant que le poète n'est pas parvenu à surmonter son deuil, le rêve l'emportant sur la vie. Jean-François, lui, a fait triomphé la vie.

Une belle lecture sur le deuil, un témoignage utile sur les chemins de la résilience, qui comporte quelques très beaux passages d'écriture. On ne peut être qu'admiratif devant cet amour immense, si profond et durable, dont on a l'impression d'être imprégné peu à peu ainsi que de l'image de Wen, cette si charmante femme chinoise. Cela donne envie de remonter le temps et de découvrir la genèse et les belles années de ce couple uni et original, dans "Une rencontre à Pékin".



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J'espère ne pas devoir un jour néfaste tenir chronique après le départ de l'être aimé.
Difficile à lire si l'on ne fait pas abstraction de ce qui pourrait m'arriver.
Utile à ceux devenus seuls au monde à souffrir da la disparition de sa moitié.
D'une grande pudeur et d'une honnêteté constante envers les sentiments, émotions et effrois qui traversent l'endeuillé.
Lu en apnée.
Merci Jean François.
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Une autre Aurélia de Jean-François Billeter est un court texte initié par le roman inachevé de Gérard de Nerval Aurélia et la perte de sa femme Wen. Jean-François Billeter s'inspire de ce texte surréaliste pour nous faire découvrir ce carnet intime, il ouvre son être à une approche de voyeurisme sincère, une acceptation de devenir le témoin malheureux en proie à la solitude de l'être aimée mort.
Jean-François Billeter est un sinologue suisse, oeuvrant vers la culture chinoise, écrivant un nombre certain de livres sur l'art chinois, il fût titulaire de la chaire d'études chinoises dés sa création en 1987 jusqu'en 1999, prenant sa retraite académique. A la perte de sa femme il écrivit deux récits Une rencontre à Pékin puis Une autre Aurélia, une continuité amoureuse d'une vie de couple de 45 ans, même invisible à son regard, la présence de sa femme habite son âme, son corps, son être sa vie.
Ce récit amorce avec beaucoup de grâce, de tendresse, d'amour, de pudeur et de vie le passage assez complexe d'un être humain à se retrouver seul après la perte de son partenaire. Les aphorismes gravés au jour le jour sur le carnet de notre auteur sur ses sentiments inextricables le happant dans un tourbillon inconnu, ces mots peints avec beaucoup de pudeur et de sincérité, éclairent ce passage délicat, cette transition douloureuse, attisent en nous une vraie émotion tendre, pour découvrir un amour pur, une ode incroyable, une continuité amoureuse différente, comme une immuabilité de l'amour, une intemporalité des sentiments venant bercer les méandres ombrageux de la nouvelle solitude de notre auteur.
Les pleurs sont un moyen de libération, au début ces pleurs sont comme une libération, pourvu qu'ils durent à l'avenir, il faut être seul pour le faire, ces pleurs sont comme un don de Dieu, une consolation du souvenirs qui enveloppe t'esprit et le corps, puis cette émotion d'être seul l'engloutit par moment, le bonheur reçu de sa femme dans sa vie continue de couler encore, seul la vie cesse, il y a ce manque de la personne à qui, il racontait tout. Puis l'effroi le prend de cette séparation définitive.
Les rêves l'assaillent, surtout les plus pénibles, à son réveil il se trouble accablé encore prisonnier par ces cauchemars, de la fuite, rupture de sa femme, ou des mélopées douces venant adoucir sa solitude du réveil au petit matin.
Les lieus aussi refont revivre sa femme, à travers les souvenirs, sa présence enveloppe l'atmosphère, l'auteur n'oublie pas l'espièglerie de sa douce aimée venant le retrouver au café absorbé par son travail.
La musique, les livres, les tableaux et la solitude sont des empreintes de réminiscences, les images se troublent, s'effacent, se recherchent, s'estompent pour devenir illusions, mirages, souvenirs, songes, cauchemars, réalités…..
Le leitmotiv surprenant de l'idée du retour de sa femme et de sa réaction face à elle, comme si sa mort était juste un départ, l'auteur se pose cette question troublante comme une réalité.
Cette tendresse de carnet est une belle découverte, cette façon de se livrer dans la douleur de la perte de sa femme et de suivre les méandres de ses émotions au jour le jour, couché sur un carnet, gravé à la pointe de son stylo cette sculpture des mystères de l'esprit.
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Jean François Billeter nous partage son journal, les jours, les mois, les années de vie, après le décès de sa femme. Ce texte tourne autour de la présence de sa femme, sa mémoire, ses souvenirs.
Un texte doux, intime qui se lit avec pudeur.
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