Aujourd'hui, tout se passe comme s'il était quasiment impossible de concilier deux objectifs : d'une part, combattre l'amalgame entre islam et terrorisme, et pour cela dissocier la foi musulmane de sa perversion islamiste; d'autre part, prendre pleinement en compte la dimension religieuse de la violence djihadiste.
La foi ne constitue pas une doctrine abstraite, c’est un ensemble de sentiments qui engagent toute la personne du fidèle dans sa quête du divin, et qui déterminent un certain rapport au monde. (…) Ce qui est en jeu, c’est une polarisation du sacré et du profane, du vrai et du faux, du bien et du mal, du pur et de l’impur. (p . 28-29)
En 1962 comme en 2016, la génération FLN ne peut envisager l'islam autrement que comme la religion des dominés, l'instrument politique que les pauvres se sont trouvé pour mener le combat de l'émancipation.
(citant Derrida dans une lettre à Pierre Nora en 1961)
"Si, à un moment ou à un autre, une argumentation "ultra" utilise tel ou tel élément objectif, celui-ci devient "tabou", quelle que soit sa valeur intrinsèque, sa vérité propre, et il ne faudra plus y toucher, ni le regarder, sous peine de contamination et de "complicité objective", crime de lèse-révolution. Tous les dogmatismes et tous les sectarismes commencent là, les révolutionnaires et les autres..."
Ce qui est en jeu, c’est la réticence qui est la nôtre à envisager la croyance religieuse comme causalité spécifique, et d’abord comme puissance politique. On adhère spontanément aux explications; mais la foi, personne n’y croit. (p. 23)