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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« La vie c'est le bordel, personne n'y comprend rien. »
Cette phrase de Jean Bourrel (1919-2012) mise en exergue du nouveau roman d'Anne Bourrel résume en partie ce dernier. Pour ce qu'elle dit mais aussi de par l'auteur de la citation dont le lecteur peut légitimement penser qu'il appartient à la famille de l'auteur.
Car c'est de cela dont nous parle L'invention de la neige, roman noir intime à l'atmosphère pesante. du sacré bordel que peut-être la vie et que chaque histoire familiale vient un peu plus aggraver :
« Dans toute la chaîne de vos ancêtres, ces gens auxquels vous tenez tant, vous là, regardez : il y aura au moins un mensonge. Minimum. Comptez deux chaque cent ans et votre généalogie, elle vole en éclats. Et vos certitudes. Et votre aplomb. Et votre envie, que je lis si clairement dans vos yeux, de me jeter la première pierre. »
C'est la mère de Laure qui nous parle. Elle n'a rien vu, ou presque, mais c'est elle qui nous raconte. Antoine est mort à 93 ans. C'est lui qui a élevé Laure, sa petite-fille. Antoine qui a connu la guerre civile en Espagne et la Retirada, les camps d'Argelès et de Bram, et un amour que cette guerre a détruit. Laure ne se remet pas de cette perte et son mari, Ferrans, a décidé de l'amener quelques jours à la montagne, dans les Cévennes. C'est l'hiver, il fait un froid de gueux, mais à Camprieux, près du mont Aigoual, il n'y a pas un flocon. Sous un ciel plombé, dans le froid et les brumes d'un deuil qui lui a fait perdre le sommeil depuis près d'une semaine, Laure erre dans l'auberge du Bonheur et devient le pivot d'un drame prêt à se nouer… ou à se dénouer.
Gran Madam's, précédent roman d'Anne Bourrel, était campé dans une station-service écrasée de chaleur. C'est cette fois le froid, tout aussi pesant, qui enserre les personnages. Et cette absence de neige, qui empêche toute activité en dehors de l'auberge, qui les contraint et fait émerger les mêmes motifs : les relations qui se nouent par force, souvent biaisées par la méfiance, ou au contraire l'espoir de pouvoir s'accrocher a quelqu'un qui ne vous connait pas et peut donc vous entendre sans a priori, la complexité des liens affectifs que l'on choisit ou que l'on subit, le poids de l'héritage et de ses mensonges. Alors que peu à peu se dessinent trois histoires, celle d'Antoine, celle de Laure et celle que conte la narratrice, des écheveaux se démêlent et d'autres, au contraire, ne cessent de s'emmêler. Car une vérité qui émerge est bien souvent compensée par un mensonge, y compris ceux que l'on se réserve à soi-même.
Il ressort de tout cela, une tension constante, une pression psychologique qui jamais ne se relâche jusqu'à un dénouement aussi attendu que craint et finalement déroutant. Émouvant portrait d'une femme seule, d'une relation unique, roman sur la transmission de la mémoire dans tout ce qu'elle peut avoir de biaisé, d'enrichissant ou de traumatisant – et l'on pense sur le thème de cette mémoire de la guerre d'Espagne, au beau Quelqu'un à tuer, d'Olivier Martinelli L'invention de la neige, touche au coeur, dérange, donne à penser. C'est un livre dans lequel la neige ne tombe pas, où elle ne peut recouvrir la saleté ou la noirceur, où son absence pousse à la révélation d'une réalité sans fard qu'il faut bien regarder en face pour pouvoir avancer.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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« Dans toute la chaîne de vos ancêtres, ces gens auxquels vous tenez tant, vous là, regardez : il y aura au moins un mensonge. Minimum. Comptez deux chaque cent ans et votre généalogie, elle vole en éclats. Et vos certitudes. Et votre aplomb. Et votre envie, que je lis si clairement dans vos yeux, de me jeter la première pierre. »

Laure ne peut s'arrêter de pleurer, totalement ravagée par la mort d'Antonio Bernon de Casares, décédé à plus de 90 ans dans sa maison de retraite. Selon Ferrans, son mari, elle en fait un peu beaucoup, il avait bien vécu, non ? le voilà qui commence à s'agacer un peu et, pour lui changer les idées, il décide de l'emmener « à la neige », dans les Cévennes, pas très loin de Ganges. Sauf que de neige, rien ! le ciel reste désespérément gris, l'auberge « du Bonheur » (du nom de la rivière toute proche) est à pleurer, l'aubergiste une bonne grosse jeune femme fait ce qu'elle peut mais que faire dans ce trou perdu avec deux gamines – les filles de Ferrans - et une femme qui passe ses nuits à pleurer, ne mange rien, ne veut rien ? le médecin local, citadin égaré par là et qui fait surtout de la course, lui prescrit des remèdes pour dormir. Il se passe quelque chose entre ces deux-là, en dehors du regard du mari. Connivence, reconnaissance mutuelle, désir de. Et soudain, le remède fait effet : Laure ne peut plus sortir du sommeil. Ferrans a des choses à faire chez lui, il part, confiant (trop confiant?) son épouse aux bons soins du docteur Ali Talib (dont Ferrans parle avec des « le rebeu », le « bicot », il a décidément tout bon celui-là).

Mais un second discours se superpose à celui de l'auteur-narrateur, une narratrice cachée, qui observe et qui juge : la mère de Laure. Elle et son mari étaient des forains auparavant, vie de nomades qui transportent leur manège et leur stand de tir, impossible d'élever une petite fille. Ils la confient donc à Antonio, le grand-père (Gp, dans le livre) et se coupent plus ou moins de leur fille. Et l'histoire de ce grand-père nous est contée, depuis l'enrôlement dans les troupes républicaines à la demande d'une mère prostituée qui ne veut plus le nourrir, la découverte de l'amour avec Gabriel, petit Catalan en fuite lui aussi et disparu, les camps d'Argelès puis de Bram quui laisseront un souvenir douloureux au jeune homme, la prostitution à son tour et enfin, la constitution d'une famille avec une camarade de lutte, Maria de las Nieves ou Theodora avec laquelle il aura la mère de Laure.

Les récits s'entrecroisent, guerre civile espagnole et vie dans les camps français, séjour glacial dans une auberge morose à peine animée par les rares habitants qui viennent y boire pour passer le temps. Avec un iguane barbu qui terrifie Laure !

On se demande bien comment tout cela pourra finir, on imagine déjà une bluette, le retour à la vie de Laure, mais les explications finales sont inattendues et douloureuses, bien amenées et dans une logique parfaite. Un bon livre, riche quant à l'arrière-plan (village des Cévennes, guerre civile), touchant et bien vu quant aux personnages. La parole donnée successivement à la mère de Laure, au grand-père Antonio et au narrateur est une idée intéressante qui croise les points devue.

Je ne connaissais pas la « manufacture de livres,com » mais ce choix me donne envie de la fréquenter encore.
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On retrouve avec plaisir la plume de cette auteur. Un roman magnifique avec une fin à couper le souffle
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le Gp (grand-père) de Laure est décédé, et elle ne s'en remet pas, plus proche de lui qu'elle ne l'était de ses propres parents et peut-être aussi parce qu'elle l'aurait aidé avec quelques pilules de morphine. Elle n'en dort plus et Ferrans (dont on ne connaîtra pas le prénom), son mari, commence à s'agacer : la virée en Cévennes pour lui changer les idées conjuguée au manque de neige (pas moyen de skier), aux larmes de Laure et à la drôle d'auberge où la famille séjourne (et le lézard dans sa boîte), ça commence à faire beaucoup.
L'ambiance est pesante, très très...il s'agit d'ailleurs plus d'un roman noir, à la tension croissante et à l'atmosphère étouffante, qu'un polar, d'autant que le crime n'a réellement lieu qu'à la fin du roman et permet de comprendre le choix narratif.
Cette narration prend la voix de la mère de Laure, belle-fille du Gp, propriétaire d'un stand de foire qui n'a pas élevé sa fille...Et alors qu'elle n'était pas présente dans le village perdu des Cévennes, c'est elle qui raconte (c'est d'ailleurs assez déroutant puisque pendant une bonne partie du roman, j'ai d'abord cru que c'était la patronne de l'auberge !).
Elle se mêle aux souvenirs du Gp, espagnol républicain réfugié au camp de Bram (à côté de Carcassonne) pour échapper au régime franquiste.
La neige dans tout ça ? Absente, désespérément ! Elle cristallise le malaise, elle est le catalyseur des tensions et on finit par l'attendre pour que l'histoire enfin se dénoue !
J'ai beaucoup aimé ;o) et je me suis rendue compte ensuite que ce roman avait d'abord été publié à la Manufacture de Livres : ça ne m'étonne pas !
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Voici une lecture singulière, dans son style tout d'abord, une belle écriture instillant une atmosphère noire de laquelle émerge parfois une pointe de burlesque, mais aussi dans son histoire et son traitement.

En effet, les chapitres alternent le passé et le présent mais aussi les narrateurs. Nous plongeons dans ce récit de deuil et d'histoire passée, puis un élément bouscule le fil de notre lecture et nous emporte au plus profond des relations et des liens entre les personnages, au sein des secrets de leur famille. C'est un huis-clos glacial, sombre et mystérieux, presque étouffant, que nous livre Anne Bourrel. La neige que l'on attend et qui ne vient pas, cette neige que certains désirent mais que d'autres détestent est omniprésente dans le roman. le sentiment de solitude pèse également beaucoup dans le décor et sur les personnages. L'écriture tourmentée et sensitive de l'auteure accentue la noirceur et la sensibilité du récit.

Le roman joue avec le tempo, souvent lancinant, à l'étouffée, puis de plus en plus dans la lignée d'un thriller noir. C'est réellement un roman d'ambiance axé sur la psychologie des protagonistes et sur les relations familiales et humaines en règle générale. Je l'ai lu en période de canicule, mais je pense qu'il se déguste davantage l'hiver afin de s'en imprégner mieux encore.

« C'était la première fois depuis la mort d'Antoine qu'elle parvenait à parler de lui. Et qu'elle ne pleurait pas. Les larmes coulaient à l'intérieur, rivière souterraine qui désormais pour toujours l'habiterait. »

La mère de Laure, discrète une bonne partie du récit même si elle en est un des narrateurs, se révèle complètement sous un autre jour en fin de roman. Et c'est à travers elle que le dénouement presque fou fait le lien avec Laure mais aussi son grand-père tant regretté. Laure est noyée par le chagrin et ce n'est pas son mari qui arrangera la situation. Je n'ai d'ailleurs pas tellement apprécié ce personnage. Son manque de soutien m'a agacée.
Si l'état quasi comateux de Laure peut apporter une petite lourdeur, les chapitres courts défilent malgré tout. L'écriture de l'auteure y est pour beaucoup.
Parallèlement se déroule un pan intéressant de l'histoire hispano-française en temps de guerre. Les thématiques abordées sont donc, comme vous pouvez le constater, terribles mais rudement réalistes.

« Plusieurs fois par jour. Il faut avaler la mort. Ça passe lentement dans la gorge. C'est plein d'épines. À chaque fois que ça revient, il faut avaler encore. Les épines de la mort déchirent la gorge. La gorge est pleine de mort. La gorge est un boyau plein de mort. La gorge devient boa constrictor. La mort passe dans la gorge. L'effort est à chaque fois impossible, les yeux pleurent, on se dit qu'on n'y arrivera pas et puis, si, ça passe. Ça passe. Jusqu'à la prochaine fois. »

En bref, c'est un roman noir dans lequel les drames se succèdent en quasi huis-clos. Les liens familiaux et la psychologie de ses membres constituent la toile de fond de ce récit à l'atmosphère pesante, sans oublier le côté historique ici largement développé. Nous avons l'impression de vivre aux côtés des personnages, l'écriture de l'auteure et sa capacité à immerger son lecteur sont de réels points forts. Un roman singulier à découvrir en période de grand froid, enroulé(e) dans la couette !
Lien : https://ducalmelucette.wordp..
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Je vous annonce un très gros coup de coeur pour le tout nouveau roman d'Anne Bourrel.
Une construction et un choix de narration audacieux
Alternance entre passé et présent. L'Histoire de la Guerre d'Espagne en toile de fond.
La plume d'Anne, parfois très poétique, sublime ce récit emplit de deuil, de mensonges, de culpabilité et de vengeance.

Lien : http://www.librairie-renaiss..
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J'ai lu ce livre dans le cadre du groupe de lecture auquel je participe. Je ne connaissais pas du tout l'autrice, mais le titre et la couverture, ainsi que le quatrième de couverture, tout cela était intrigant et j'avais vraiment envie de le lire.
C'est chose faites.

Voilà l'histoire de Laure dont le grand-père vient de mourir et qui n'arrive pas à se remettre de cette perte. Son mari Ferrans décide de l'emmener en vacances au ski, et ils se retrouvent dans un coin paumé sans neige. Tout est raconté par la mère de Laure, même si la plupart du temps elle n'est même pas là. En parallèle on a la vie d'Antoine, le grand-père de Laure. Sa vie pendant la guerre, son histoire d'amour, sa fuite en France.

Cette histoire est emplie d'ombres, c'est assez sombre parce que Laure est malheureuse depuis la mort d'Antoine. Parce qu'on sent le froid. Parce que la neige manque, et que rien ne semble aller. C'est très mélancolique, mais tellement bien écrit, terriblement poétique même, que ça se lit comme du flan aux oeufs. C'est super agréable. Même si certaines remarques de la mère font grincer des dents, on comprends mieux ensuite. La fin m'a surprise, je ne m'attendais pas du tout à ça.

C'était une très belle histoire, sombre mais un peu douce, un peu amer également. J'ai beaucoup aimé.
Lien : https://jetulis.wordpress.co..
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C'est un roman noir à l'atmosphère pesante; un huis-clos sombre, psychologique et mystérieux. Une histoire de famille avec ses secrets et ses horreurs !
Laure a du mal à se remettre du décès de son grand-père Antoine. Alors Férans son époux l'emmène skier quelques jours dans les Cévennes.
Mais voilà, malgré un froid hors du commun, pas de neige ! Ils se retrouvent cloîtrés à " l'auberge du Bonheur ".
L'auteure utilise une narration originale par le biais d'une mystérieuse personne qui se révèle au cour du récit.
Le rythme de l'histoire se fait par des chapitres historiques sur la vie du GP (grand-père) pendant la guerre d'Espagne, qui s'entrecroisent avec ceux des protagonistes qui sont toujours sans neige.
Au fil des chapitres, je me suis demandée où l'auteure voulait m'entraîner. Laure va de plus en plus mal, le grand-père déraciné espère retrouver son grand amour et les personnages qui évoluent dans l'hôtel me paraissent de plus en plus douteux.
Le suspense est latent, la neige ne tombe toujours pas...
Mais le dénouement me surprend et me laisse KO !
Lien : https://imagesderomans.blogs..
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Cévennes. Il a besoin de décompresser et puis les gosses vont adorer la neige et puis il va inaugurer sa Porsche Cayenne bleu nuit et puis son épouse est dans un tel état... Ferrans est chef d'entreprise, il a divorcé, a deux jeunes filles, il vit avec Laure qui vient de perdre son grand-père qui l'a élevée avec son épouse. Trois ou quatre jours à s'éclater sur les skis derniers cris, les gamines sur la luge et hop, c'est le bien-être garanti ! Alors, que rêver de mieux que l'Auberge du Bonheur. Parfois, il suffit d'y croire pour que tout s'écroule.

Avec Gran Madam's (chronique) elle avait marqué, avec quelques fulgurances de noir, d'une pierre blanche le pas si tapageur territoire hexagonal du polar. Ah, l'écriture de Anne Bourrel ne laisse pas indifférent ! A vrai dire, elle asticote allègrement. Elle fait des crocs-en-jambe aux hypocrisies récurrentes. Elle tarabuste pour secouer le cocotier des mensonges. Elle titille les mécanismes du déni. Et pourquoi n'importunerait-elle pas, hein, en exposant en pleine lumière les non-dits qui font si mal ? Il faut du talent pour parvenir à faire vaciller ces faux-semblants, pour lutter contre la cécité familiale. Anne Bourrel s'y emploie avec une évidente détermination.

Les voilà ! le « Cayenne » est dans les lacets. L'auteure a lâché ses personnages. le narrateur raconte. Cette famille va se retrouver dans un contexte compliqué. Premièrement, il n'y a pas de neige. le conducteur rumine, il va ruminer longtemps. Laure, sa compagne, est en deuil de son grand-père. Elle sombre dans la dépression. Les enfants vont s'adapter. Deuxièmement, il n'y a toujours pas de neige. Laure ne dort plus. Qui est ce narrateur qui semble très intime ? On va connaître le parcours d'Antoine, le grand-père, la guerre civile en Espagne puis les camps en France et celui qu'il ne retrouvera pas. Et Laure si attachée à ce grand-père. Dans cet univers sombre où la neige n'est plus là pour planquer les imperfections de l'existence la chute est inéluctable, on met le feu aux artifices, « La vie, c'est le bordel... » comme le précise l'épigraphe de Jean Bourrel. Troisièmement, il n'y aura jamais de neige et avant de toucher le fond Laure tente de s'agripper, ses sentiments sont à vif, des affinités naissent de cet épuisement, dans cette bulle de vide qu'est l'Auberge du Bonheur, dans cet environnement sans âme.
La suite sur : http://bobpolarexpress.over-blog.com/2016/09/si-maman-si-l-invention-de-la-neige-anne-bourrel.html
Lien : http://bobpolarexpress.over-..
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