Qu'est-ce qu'un citoyen aujourd'hui? Un automate qui vote puis disparaît. Le citoyen n'existe plus. L'individualisme, la concurrence, l'argent, tels que nous les vivons, ont engendré une situation dévastatrice. On ne se sent plus appartenant à une communauté, participant d'une unité, celle qui nous fait dépasser l'instant égoïste pour nous projeter dans un ensemble permanent qui vit au-delà de nous-mêmes, qui donnerait du sens à notre présence momentanée, ici-bas, de la naissance à la mort. Nous avons égaré le désir du vivre ensemble, voilà le mal le plus profond dont souffre la société actuelle, un cancer qui progresse, comme un État totalitaire sous l'emprise de la finance et de la seule recherche du profit en monnaie.
Une autre voie est possible, conforme au génie de l'homme : oser encore, sauter vraiment. Pour y parvenir, il nous faut préalablement : 1. trouver le point d'appui, c'est-à-dire une autre représentation commune du monde ; 2. le levier ou la perche, c'est à dire changer la distribution des richesse, instaurer un revenu d'existence inconditionnel, égal pour tous, cumulable avec tous autres revenus d'activités ; enfin : 3. assurer notre atterrissage pour entreprendre d'un bon pas la marche vers une société nouvelle, après en avoir conçu l'épure, tout au long de l'envol. Voilà une autre façon de repérer les gènes du changement.
Telle jeune femme "bénéficiant" du RMI est placée sous surveillance quasi constante car elle pourrait bien vivre subrepticement avec un compagnon, ce qui devrait la priver du RMI. Tel autre est soupçonné d'avoir des ressources cachées. Enfin, ceux qui ont "droit" au RMI ne sont pas assurés de le percevoir durablement. Ils sont toujours incertains d'un avenir dépendant des décisions des commissions d'attribution ou de formulaires mal remplis. En en faisant des quémandeurs perpétuels, nous les enfermons dans un ghetto, nous les rivons à la pauvreté, nous les expulsons du corps social comme des cellules mortes.
Comprenons bien qu'il s'agit de changer les règles de distribution des richesses sans modifier nécessairement celles du jeu de l'économie. nous sommes quatre joueurs de cartes, à la belote, au bridge ou à tout autre jeu. Jusqu'à présent nous distribuons les cartes au hasard. Décidons de faire en sorte que chaque joueur ait une carte forte, un as dans sa main. L'as représente le revenu d'existence. Nous prenons les quatre as, nous les distribuons, puis nous faisons de même avec les cartes restantes, et nous entamons la partie dans en changer les règles.
Avec un revenu d'existence, on quitte la pesante insécurité de l'instant pour s'inscrire dans la durée. L'expérience a été faite, ses conclusions sont conformes à l'attente. ente deux groupes témoins de titulaires du RMI, l'un s'est vu assurer de le percevoir pendant deux ans, sans contrôle, ni remise en cause, l'autre est resté soumis à l'avis de la commission pur continuer à en bénéficier. Les premiers ont changé de comportement, commencé à construire des projets, à se loger en s'associant parfois.