Citations sur Et les hippopotames ont bouilli vifs dans leurs pisci.. (12)
« Cette fixette sur Phillip, c’est comme le paradis des chrétiens, une illusion née du besoin, qui flotte dans un nulle part nébuleux platonique, c’est comme la prospérité, toujours pour demain, jamais ici et maintenant. Tu as peur de partir avec lui, tu as peur de prendre le risque, parce que tu sais que ça marchera pas. » (p. 29)
Réfléchis, tu es un poisson dans un étang. L'étang est en train de s'assécher. Il faut que tu évolues vers l'amphibien, mais il y a quelque chose qui te retient, qui te dit de rester dans l'étang, que tout va finir par s'arranger.
Telle ceux qui n'arrivent pas à vomir malgré des nausées épouvantables, elle gisait là, incapable de mourir, résistant à la mort comme elle avait résisté à la vie, figée dans son amer refus du devenir et du changement.
Je commençais à éprouver cette impression, familière du temps où j'étais barman, d'être le seul être sensé au milieu des fous.
Je commençais à éprouver cette impression, familière du temps où j'étais barman, d'être le seul être sensé au milieu des fous. Loin de donner un sentiment de supériorité, ça déprime et ça fait peur, impossible d'établir le contact avec qui que ce soit.
"Moi qui avais toujours tenté t'imaginer quel effet ça faisait de tuer quelqu'un, moi qui avais écrit des milliers de mots pour recréer la trame de ces émotions, voilà que ce Phillip qui était à côté de moi était passé à l'acte." [page 148]
"Là-bas, la ville était couverte d'un linceul de fumée grise brûlante qui provenait d'un incendie sur le front de mer. De temps en temps, dans cette chaleur de four, un éclat de suie tombait du ciel de cendre comme un flocon de neige noire." [page 122]
Le barman avait mis la radio. C'était le journal, il était question d'un incendie au cirque : " Et les hippopotames ont bouilli vifs dans leurs piscines ", a précisé le présentateur, avec l'onction réjouie qui les caractérise. Phillip s'est tourné vers Barbara : " Qu'est-ce que tu dirais d'un petit hippo vapeur, Babsy ? -Ça ne me fait pas rire ", elle a répondu. " Allons quand même manger. "
"Bon dieu, qu'il fait chaud", j'ai dit.
"Lève-toi et va prendre une douche, salopard.
-Qu'est-ce qu'il te prend ?
- Tu vas pas me la faire. T'as fumé de la marijuana, hier soir.
- C'était du foin, de toute façon", j'ai dit en allant dans la salle de bains. Le soleil de juin inondait la pièce, et le jet froid de la douche m'a donné l'impression de plonger dans un étang à l'ombre, un après-midi d'été, en Pennsylvanie.
Al a hoché la tête en disant: "C'est une idée, mais tu trouveras peut-être pas mal d'éléments occultistes intéressants aussi chez Yeats, et dans la doctrine kabbalistique.
- Rimbaud se prenait pour dieu, a dit Phillip. C'est peut-être la première condition. Dans la kabbale, l'homme est au seuil de la vie végétative, et entre lui et Dieu il n'y a plus qu'un voile de brume. Mais si tu te projettes effectivement en Dieu, sous la forme du soleil, la vision et la connaissance ne deviennent-elles pas accessibles?
- Oui, il se peut que tu marques un point, mais n'oublie pas que Rimbaud a fini par échouer, après s'être projeté de cette façon." [page 64/65]