Citations sur Nouvelle Babel (43)
Cléo apprenait à ses élèves qu'au temps des premières téléportations, et même un peu avant, c'est l'anglais qui était parlé partout sur terre. Puis dès les premières téléportations humaines, contre toute attente, l'espagnol s'était imposé comme la seule langue mondiale, en quelques années, renvoyant l'anglais, le mandarin, le portugais et le français au rang de langues quasi mortes. L'espagnol était une langue qui chante, une langue du Sud et du soleil, où neuf Terriens sur dix se téléportaient quand ils quittaient leur espace privé ou leur travail. La langue de la fête... et puisque le monde était devenu une fête !
Avez-vous oublié qu'au début du XXIe siècle, pour tenter de contrôler les pandémies, on confinait les gens chez eux ? Comme au Moyen Age !
Les grandes puissances se sont refermées sur elles-mêmes, les clés ont été confiées à des leaders désignés par leur peuple, défendant leur pays comme des pitbulls défendent une gamelle. Chacun s’est recroquevillé. Jamais le monde n’a été aussi égoïste. Des millions de migrants sont morts de ne pas pouvoir changer d’hémisphère, dans l’indifférence générale des nations barricadées. Jamais l’économie n’avait circulé aussi librement, l’argent, les images, la musique, ce que les gens mangeaient ou portaient sur le dos, et pourtant jamais la Terre n’avait été autant divisée, en deux cents morceaux, deux cents Etats ne jurant chacun que par son intérêt particulier.
Les accords de Supremacy de Muse explosèrent à en faire fondre, au loin, très loin, la neige du mont Fuji.
Le bonheur ! pour un peu, Clément aurait eu envie de faire valser tous ses vêtements et de danser une dans les champs roses de shibazakura, ou au bord du minuscule bassin aux nymphéas qu'elle avait aménagé devant le chalet.
Quand ils dépassèrent les quarante-trois couchers de soleil, à Tahai, devant les statues géantes de l’Ile de Pâques, ils s’embrassèrent.
Il avait commencé à lacer sa basket droite et lacerait la gauche dans la foulée, une fois dans la cordillère : se téléporter était devenu tellement mécanique qu’on pouvait commencer un geste à un endroit et l’achever une fois arrivé, presque sans se rendre compte qu’on avait changé de décor et parfois même traversé la terre entière.
[...] plus personne aujourd'hui n'est capable de mourir pour la patrie, et encore moins de se faire exploser pour une cause qu'il juge plus importante que sa vie. Ce serait aussi ridicule que de demander à des jeunes gens de prendre un fusil pour éviter qu'on modifie les frontières de leur pays.
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NDL : ceci se passe en 2097. De nos jours, des gens courageux défendent leurs frontières !
Le multilibéralisme, vous appelez ça un équilibre ? Oh, bien entendu, après 1945, plus de bombes atomiques qui explosent, plus d’armées marchant baïonnette au poing, mais les États-nations ont construit des frontières, des murs plus hauts et plus nombreux que jamais. Les grandes puissances se sont refermées sur elle-mêmes, les clés ont été confiées à des leaders désignés par leur peuple, défendant leur pays comme des pitbulls défendent une gamelle. Chacun s’est recroquevillé, jamais le monde n’a été aussi égoïste. Des millions de migrants sont morts de ne pas avoir pu changer d’hémisphère, dans l’indifférence générale des nations barricadées. Jamais l’économie n’avait circulé aussi librement, l’argent, les images, la musique, ce que les gens mangeaient ou portaient sur leur dos, et pourtant jamais la Terre n’avait été autant divisée, en deux cents morceaux, deux cents États ne jurant chacun que par son intérêt particulier.
Les religions ont disparu avec tout le reste, ma grande, en même temps que les pays et les langues, c'est toi l'instit, je ne vais pas te faire un cours d'histoire !
Aujourd'hui, la Terre est devenue un bien de consommation comme les autres. Avant, les Terriens la protégeaient, entretenaient un lien viscéral avec elle, vital, organique.