Classic Next Men, Volume 3

Après Classic Next Men 1 (2112, épisodes 0 à 6) et Classic Next Men 2 (épisodes 7 à 18), ce tome est le troisième et dernier dans les rééditions de la série de 1992. Il contient les épisodes 19 à 30 en couleurs, les derniers de cette époque. le numéro 30 est paru en décembre 1994. L'épisode suivant est paru en décembre 2010.

Doctor Trogg (l'ennemi juré d'Action Maxx) arpente les rues de New York en se demandant ce qu'il fait là dans cet univers étrange. Il agresse un passant ; Blue Dahlia (un autre personnage des comics d'Action Maxx, un comics fictif) intervient. Sandy Tolliver s'éveille de ce cauchemar ; elle conserve toujours ses centimètres de hauteur supplémentaires. de nouveaux examens médicaux montrent que son organisme s'est également guéri de son diabète. Tony Murcheson fait évader les Next Men de leur prison. Jack rencontre Michael Benedict, un prêtre. Sathannas explique à un de ses hommes de main ce qui s'est passé en 2112. Aldus Hilltop acquiert du pouvoir, et une nouvelle femme. Amanda Watson rencontre Cornelius van Damme. Mark IV recouvre la mémoire. Hellboy (10 pages dessinées par Mike Mignola), Concrete (de Paul Chadwick), Elfquest (de Wendy et Richard Pini) et Monkeyman & O'Brien (d'Art Adams) font une apparition. Thomas Kirkland et Janey essayent de rejoindre Washington pour empêcher l'assassinat du président des États-Unis.

Le deuxième tome avait permis à John Byrne de quitter la phase d'exposition pour pleinement développer son histoire palpitante et explorer timidement quelques sentiers en dehors des stéréotypes des superhéros. Avec ces épisodes, il passe à la phase suivante qui consiste à continuer sa tapisserie narrative et complexe, et s'aventurer dans des thèmes originaux.

Il conserve le dispositif assez déroutant d'inclure des éléments très superhéros dans son histoire, pour mieux les désamorcer. Byrne insiste lourdement sur les poncifs des superhéros : la créature monstrueuse vert vif (Doctor Trogg), l'individu capable de remodeler la réalité (évocation irrépressible de Phoenix / Jean Grey), le peuple de démunis vivants dans des tunnels désaffectés (impossible de ne pas penser aux Morlocks), le super-robot, l'homme le plus riche du monde. Il va jusqu'à intégrer à son récit Hellboy et les autres personnages des créateurs travaillant à l'époque pour Dark Horse. Cet aspect est vraiment bizarre puisqu'à chaque fois il s'ingénie à établir un fort contraste entre ces éléments superficiels, et leur nature dans le cadre du récit qui est plus adulte. C'est comme s'il voulait prouver à tout prix à quel point la série "Next Men" n'est pas une série de superhéros, comme s'il compensait un sentiment d'infériorité, comme s'il craignait que le lecteur ne soit pas assez intelligent pour s'en rendre compte tout seul. Il ne peut pas s'empêcher non plus de faire souffrir une de ses héroïnes dans une scène de torture particulièrement humiliante, avec un engin appelé The Womb utilisé par le docteur Axelrod.

Heureusement il quitte chaque fois rapidement ce registre pour justement s'aventurer vers des endroits moins fréquentés. D'un point de vue général, sa narration impressionne par le grand nombre de personnages qu'il n'est pas possible de confondre, et par l'architecture solide du récit, même si les voyages dans le temps continuent de jouer un rôle primordial. le suspense ne faiblit pas du début à la fin, les scènes d'action sont prenantes et les personnages ont pris de la substance, de l'indépendance, de la personnalité. Enfin, il y a ces moments dans lesquels Byrne dépassé le récit d'aventures pour surprendre le lecteur. La personnalité de Jack l'amène à se séparer du groupe et à s'interroger sur ses actes, et sur sa foi de manière naturelle. le retour de Ben Horowitz ne donne pas lieu à des récriminations mesquines sur l'industrie des comics, mais à une mise en perspective du travail de salarié pour un grand éditeur (avec un petit clin d'oeil sous la forme de l'apparition de Mike Mignola, Art Adams et John Byrne lui-même, le temps de 2 pages).

Coté graphique, John Byrne sort également de sa zone de confort : il ne se cantonne pas au fonctionnel. Évidemment les éléments comics du scénario appartiennent au registre qu'il a peaufiné lorsqu'il illustrait les Fantastic Four ou Superman. Mais au delà de cette autocitation, Byrne prête une plus grande attention aux personnages et aux décors. Il s'est débarrassé de sa propension à tracer des grands traits pour figurer des immeubles, pour se rapprocher d'une description plus figurative et plus immersive. Il soigne tout particulièrement les différents intérieurs avec un ameublement choisi et une disposition des lieux à chaque fois particulière. Il y a également un travail significatif sur les tenues vestimentaires, et même les décors pseudo-futuristes gagnent en crédibilité. Pour le reste, le lecteur retrouve ces mises en page très fluides, et ses personnages légèrement stéréotypés mais bien différenciés.

Ce dernier tome de la première saison constitue une amélioration significative par rapport au 18 premiers épisodes. John Byrne sort de la bande dessinée de genre purement divertissante pour parler de ci de là de thèmes qui lui tiennent à coeur, avec des illustrations plus mures, plus abouties que précédemment. le dernier épisode ne conclut pas l'histoire. Byrne avait arrêté brutalement sa série avec dans l'idée de la reprendre quelques mois plus tard. En fait il n'y reviendra qu'en 2010, soit 16 ans plus tard. Les épisodes 1 à 5 de la deuxième saison se trouvent dans Scattered.