- Et votre dame, elle veut pas voir ?
- Ma dame ?
- La mariée ?
- Ah... OK, bon... Réglons ça très vite, c'est un marié.
- Vous vous mariez tout seul ?
- Je me marie avec un homme.
- Ah.
- ...
- Bon, et vous prévoyez d'être combien à votre mariage ?
- Pas très nombreux, une cinquantaine peut-être.
- Peut-être ?
- On a un peu précipité la date. Mais rassurez-vous, ce n'est pas parce qu'il est enceint.
- ...
- ...
- HA HA HA ! Hu, hu, ce n'est pas parce qu'il est enceint ! Vous êtes un marrant, vous ! Vous savez, moi, à l'époque, j'ai dû avancer la date à cause de ça !
- Pourquoi on n'est pas mariés, Sarah ?
- Pourquoi devrait-on ?
- Pour faire une famille.
- On n'est pas une famille, là ?
- Si.
- Voilà.
- Et pour Jules ?
- Quoi pour Jules ?
- Quand on lui dira que ses parents n'ont pas le même nom ?
- Il répondra que ses parents ne sont pas la même personne.
Au lycée, mon meilleur ami, il est homo. Je le défends quand des connards viennent le faire chier. Alors, les abrutis, pour se venger, ils racontent partout que je suis lesbienne… Mais ça ne me dérange pas… Ça doit les rassurer de le penser… Ils raisonnent par capillarité. Les particules de bêtise s’agrègent et ça finit par former un corps solide.
(p. 140)
Le mariage pour tous, je suis plutôt pour... Je n'aime pas quand la religion vient parasiter tout ce qui est sociétal.
- Bonjour Bertille, ça va ?
- Bonjour, heu...
- Laurent ! Je suis Laurent, le démon sodomite qui est venu avec Serge.
- Ah oui ! Laurent ! Oh là là, je m'embrouille avec tous ces prénoms.
- Bertille, j'espère que tu seras là pour ton cousin. Tout à l'heure.
- Comment ça ?
- Pour son mariage. Le plus beau jour de sa vie. Tout ça.
- Mon Dieu, ça arrive vraiment ?
On n'est pas mariés qu'on a déjà un ado à la maison. La vie est une pute.
"Hey chuis pas un pédé" et autre "Allez, fais pas ta tafiole" et autres joyeusetés. Même les gros racistes évitent le "sale arabe" devant un arabe... Le jeune homo, il grandit dans un univers où les homos sont la terreur des parents et l'insulte des copains, la blague des papas... C'est la norme du langage commun. Et si tu commences à reprendre un peu les gens, tu les empêches de plai-san-ter et tu fais "toute-une-histoire-pour-rien-du-tout".
- C'est quoi le problème ?
- Le problème, ma fille, c'st que j'ai peur pour toi. Je ne sais pas où tu vas. On ne fait pas une vie sur des va-et-viens.
- Ok. Oublie ce que j'ai dit. J'aime ma vie, maman, ça va.
- Mais j'ai peur qu'un jour tu te réveilles en te demandant ce que tu as fait de toutes ces années.
- Tu parles de toi, là, pas de moi.
- Mais enfin ! Romain est de droite ! Bien sûr qu'il voudra !
- Pardon ?
- Mon père te dirait qu'il est conservateur, comme le mariage, et même que c'est la grosse erreur de la droite de ne pas avoir vu que c'est une victoire bourgeoise qu'on fasse du mariage un modèle de progrès au lieu de l'abolir.
-Oh putain... Ton père...
- Lui même !
- J'espère qu'il a raison...
- Il a toujours vaguement raison.
- Mais maintenant qu'ils sont sauvés, est-ce qu'ils sont les mêmes ? Est-ce qu'on aime autant celui qui n'a plus besoin d'être sauvé que celui qu'il fallait secourir ? (p.87)