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Le roman s'ouvre sur un remarquable chapitre très néo-réaliste qui met spectaculairement en scène la mère de la narratrice, mère courage qui, avec la fougue d'une Anna Magnani, déchire son chemisier et sa jupe pour obtenir un logement social salubre. La dernière phrase place sa fille, pourtant absente, dans le récit, pourtant absente, dans la scène et assène : « Et c'est comme si j'étais là, debout, la regardant depuis un coin de la pièce, je la juge et ne lui pardonne pas. »

Cette phrase radicale introduit avec force Gaia, la fille, comme un personnage à la dureté minérale. Un père handicapé, une mère qui l'élève sans compromis à ne rien attendre des autres, trois frères, une pauvreté qui la marginalise au collège. Gaia a la haine de sa condition sociale, née dans le quart monde italien qu'elle abhorre. Sa rage innerve tout le roman, quasi sans répit. Et cette colère sociale se conjugue avec une adolescence douloureuse.

C'est extrêmement rare de rencontrer un personnage d'adolescente aussi peu aimable alors même que sa condition la place du côté des victimes et donc devrait susciter compassion et empathie. Ce n'est pas le cas. Giulia Caminito, par son écriture anguleuse et râpeuse, oscille entre distanciation stylistique et identification émotionnelle, mais à chaque fois qu'un élan nous pousse vers Gaia, cette dernière s'engouffre dans la violence et la vengeance la plus abrupte qu'elle consomme avec détermination lorsque les amours infidèles s'ajoutent aux amitiés superficielles ainsi qu'à la laideur du monde. L'auteure ne cherche pas un chemin de rédemption classique ou facile à son personnage, ce qui a quelque chose de subversif, de dérangeant en tout cas.

Ce roman n'est pas politique au premier degré. La place des grands événements y est complètement minime, à peine sont évoqués à cette aube des années 2000 le 11 septembre ou les émeutes anti-G8 à Gênes, comme si survivre était si impérieux et difficile pour Gaia qu'elle ne pouvait passer que par le repliement sur soi et par une lutte strictement intime.

Et c'est justement là que le roman prend une dimension politique, en filigrane. le cynisme et la dureté presque amorale de Gaia sont une réponse à la dureté de la société et des injustices qu'elles génèrent. Si sa colère est si forte, c'est qu'elle a trop de choses à revendiquer mais pas les bons outils pour renverser cette situation inique. Même son choix de faire des études longues de philosophie sonne comme une vengeance plutôt que comme un épanouissement personnel. le lac du titre, le lac de Bracciano, en proche banlieue de Rome, est la métaphore de cette vie douloureuse, attirant mais effrayant aves son fond sombre et vaseux.

Un récit très singulier qui porte un vrai regard sur notre société à travers cet étonnant personnage de jeune fille à construction. Même si le souffle romanesque éblouissant d'Un Jour viendra m'a plus portée, j'ai apprécié l'âpreté de ce roman traversé par une inquiétude radicale à peine éclairée par des instants de poésie aussi brefs qu'intenses.
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Roman d'apprentissage, Rome années 2000.
Gaia grandit dans une famille pauvre avec trois frères et soeurs, un père en chaise roulante et une mère femme de ménage, Antonia la rousse, figure étonnante de l'histoire qui gère marmaille, mari et maison d'une main de fer. Souhaitant que sa fille échappe coute que coute à sa condition sociale à travers les études, elle l'envoie dans un lycée fréquenté par des gosses de riches, où sa fille y sera cruellement exposée. Mais même dans les années 2000 en Italie changer de classe sociale est très difficile, les ambitions de la mère seront-elles d'un grand secours à la fille ?

C'est le style spontané et plein d'humour dans l'esprit de celle des "Chats éraflés" qui illumine ce texte très fort , une énième histoire de famille et d'enfance / adolescence complexes, dans un milieu défavorisé. L'écriture très personnelle est superbe !
Les personnages sont sans exception intéressants, dont Gaia et Antonia, mère-fille rousses. La fille ne manque pas de culot et va trés vite suivre l'exemple de sa mère pour se défendre et se protéger, quitte à user la violence hors de sa famille. Alors qu'en famille où elle se sent "sous anesthésie", elle reste désarmée. Antonia L encourage aussi à la lecture, choisissant les grands classiques de la Littérature et lui offrant un dictionnaire qui sera longtemps l'unique trésor en papier qu'elle possèdera.

Sur fond d'un lac aux eaux noirs ( lac de Bracciano, qui existe vraiment et est comme décrit dans le livre) qui engloutit tout, une histoire de frustrations, d'envie, de rage et de vengeance dû à la pauvreté, mais aussi celle de soif d'amour, de tendresse et de reconnaissance, dans une Italie où l'argent semble être seul maître à bord. Et pour finir avec un sourire, la moral du livre 😆 : Les mecs , pensez-y deux fois avant de tromper votre femme, fiancée et autres dans la même lignée !
L'écrivaine est déjà présente sur Babelio avec son premier livre traduit, celui-ci le second non traduit encore, est en lice pour le Prix Strega 2021, le Goncourt italien. J'avais déjà repéré Caminito grâce à l'excellente critique de Kirzy de son premier livre que je n'ai pas encore pu lire faute de temps 😊, ce sera fait prochainement vu que j'ai bien aimé celui-ci.
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C'est un très beau et âpre roman , écrit par cette jeune femme italienne promise à un bel avenir littéraire.Portrait d'une famille italienne pauvre des années 2000, et en particulier de la mère (une Anna Magnani plus vraie que nature)mais rousse comme l'est sa fille Gaïa qui est la narratrice .
Cette mère , Antonia, porte à bout de bras4 enfants et un mari cloué dans un fauteuil roulant après un accident de travail non déclaré.
Antonia est pauvre mais digne et ne supporte pas le mépris affiché par l'Administration en particulier , pour des familles dans son cas, et elle le fait savoir.
Ayant jaugé et jugé ses enfants elle exige de sa fille Gaïa qu'elle étudie encore et encore et le plus longtemps possible quitte à se saigner aux quatre veines.Elle y parviendra certes, mais Gaïa qui a hérité du caractère de sa mère pousse tout en prudence, en méfiance,elle a honte de porter les vêtements de son frère aîné dans un corps pas encore fait , et dresse ses épines dès qu'elle se sent agressée, elle pourrait tuer si elle se sentait trahie. Sa mère en miniature.
Ce sentiment de mal-être imprègne tout le livre mais mâtiné par cet instinct de survie magnifique. L'espoir de s'en sortir sans appuis est ténu dans cette Italie corsetée de ces années là.Un grand livre d'apprentissage.
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Dans ce roman, « L'eau du lac n'est jamais douce », Giulia Caminito vous happe dès les premières pages comme un courant et vous emmène au bout du récit, accroché à la narratrice, à sa jeunesse féroce et vulnérable, à sa famille, ses amitiés fragiles.... et à ce lac dont les reflets brillants occultent sa profondeur. A la fois poétique et ardent, il est impossible de le lâcher !

« L'eau du lac n'est jamais douce », raconte l'histoire d'une famille italienne des années 2000 qui vit dans un grand dénuement. Antonia Colombo, pilier du foyer familial, « La matriarche », d'une droiture exemplaire et d'une exigence sans faille , se démène pour trouver un logement décent, et maintenir à flot sa famille, et ses quatre enfants. Antonia ne s'écrase jamais devant l'injustice. Honnête, elle croit au bien commun. Mais ce principe à un prix. Celui de ne jamais la décevoir...
C'est ce qui anime et pèse sur le coeur de notre héroïne.
Son mari, paralysé suite à un accident de travail est devenu un accessoire encombrant. le fils aîné mis au ban de la famille sur injonction de « La matriarche » elle-même. Gaia, la fille aînée, jeune adolescente à part, d'une grande maturité, fait état de ce quotidien précaire, miné par les vicissitudes de la vie. Elle tâche de filer droit, en suivant les préceptes de sa mère, à savoir ne compter que sur elle-même. Elle affronte les tourments de l'adolescence, faite d'amitiés fortes et bouleversées, de déconvenues amoureuses et d'un manque d'estime de soi. Que de pression dans cette vie, que de choix à faire. Progressivement, toutes ces frustrations se muent en colère. La colère de Gaia est terrible, elle est tapie là, au plus profond d'elle-même, prête à jaillir dès que le besoin s'en fait sentir. Elle se méprise, et ce sentiment ne fait que de s'enkyster. Parviendra-t-elle à canaliser cette souffrance, voir à s'en affranchir ?

« L'eau du lac n'est jamais douce » est un roman social puissant, irriguer par la colère, une colère noire et brutale, violente, et à un certain égard nécessaire. Un roman qui émeut pas sa justesse. L'autrice dresse le portrait d'une jeunesse rugueuse et dangereuse, à l'époque des premiers chats par SMS et de l'individualisme galopant. Elle nous invite à côtoyer Gaia, ce personnage peint dans un majestueux clair-obscur, qui se débat en silence, mais non sans violence, dans le monde qui l'entoure. Un cri de colère contre les injustices, de désespoir contre les conditions de vie des pauvres, de rage contre la société et ses inégalités, et d'espoir qui resonne encore longtemps après la lecture de ce roman !

Laissez-vous tout simplement hypnotiser par ce récit de colère, de combats, de pauvreté et d'amitiés, le tout servis par une plume superbe, dans laquelle j'y est trouvé de la lumière.....

Un grand merci à la Masse Critique Littérature de Babelio et Audiolib pour cette écoute et cette très belle découverte.

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Grandir dans la pauvreté…
… ça forge le caractère.
Ou pas.
De l'enfance à l'âge adulte, au fil des épisodes de sa vie, rencontres, trahisons, deuils… qu'est-elle devenue, Gaia ? Une femme puissante ?
Ou bien est-elle restée, tout au fond d'elle-même, une enfant fragile ?
Femme puissante, c'est la mère, "Antonia la rousse", mère intraitable et sans affection, communiste vent debout contre les injustices pendant ces années Berlusconi. Antonia cherche à chaque déménagement à améliorer sa place dans la société ; elle met tout en oeuvre pour envoyer sa fille dans un bon lycée.
Gaia s'y sent exclue : "Un lycée pour riches, c'est un acte punitif, une incision profonde, une strangulation." Toutefois, bosseuse et brillante elle va les réussir, ses études.
Mais comment réussir à se débarrasser de la violence, en famille (la description d'un abominable Noël qui tourne à la tragédie entre la mère et le frère anar) ou dans ses relations avec les amies plus riches, avec les amoureux plus à l'aise en société ?
Violence, ressentiment, vengeance emplissent ce roman. Encore une fois, Giulia Caminito nous parle avec sa splendide écriture d'injustice sociale, des traumas subis par cette enfant, jamais relevée, jamais consolée et qui ne fait plus confiance à personne.
"Aucune femme bénie n'a existé ; seules existent les femmes de sang, comme moi."
Traduction parfaite de Laura Brignon.
Challenge ABC 2023-2024
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Je l'avoue,le bref portrait de la mère de Gaia qui est proposé en 4ème de couverture m'a immédiatement fait penser à La mienne et je ne pouvais pas passer à côté de cette lecture ! J'ajoute que j'avais beaucoup aimé le premier roman de G.Caminito traduit enfrançais"un jour viendra", je ne prenais donc pas beaucoup de risque!
L'autrice nous dit que " ce roman est né pour raconter trois femmes, à travers trois personnagesses qu'elles ont inspirées. "
Gaia, la narratrice,c'est elle, même si comme pour les deux autres elle s'est permise des libertés avec la réalité.
Ce roman aurait pu être l'eniéme histoire d'une fillette qui grandit dans une famille défavorisée et qui peine à s'extraire d'un milieu toujours en marge malgré ses efforts et ses brillants résultats scolaires. Mais ce serait sans compter sur la plume habitée de G.Caminito qui donne réellement vie à ses personnages et rend le lecteur également acteur tant nous nous glissons spontanément dans leurs peaux et ressentons leurs émotions.
Comme dans son premier roman le récit n'est pas linéaire car la vie n'est pas un long fleuve tranquille, et les souvenirs envahissent parfois le présent.
Gaia n'est pas facile d'accès. C'est un volcan qui ne dort pas toujours et qui peut faire très mal. Elle est aussi un peu cactus car tout en espérant qu'on se rapproche d'elle, elle affute ses aiguilles!
Dans les méandres de ses relations familiales amicales et amoureuses son manque d'estime d'elle même, son mal être permanent deviennent vite contagieux.
L'autrice n'a négligé aucun de ses personnages,hommes ou femmes ils ne sont jamais " secondaires".
Ce roman me confirme le talent de l'autrice pour dresser de très beaux portraits tant psychologiques que sociologiques.
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Malgré un titre assez poétique, l'histoire de « L'eau du lac n'est jamais douce » est bien loin d'être une sinécure.

Ce livre offre une plongée dans l'Italie, bieu n loin des paysages de cartes postales, au début des années 2000 avec la famille de Gaia. On y suit sa mère Antonia, une femme forte et sévère, son père Massimo, handicapé en chaise roulante depuis un accident de travail non déclaré, Mariano, un demi-frère en colère contre le monde et ses frères cadets jumeaux. Habitants en lointaine banlieue de Rome, pauvres mais fiers, Gaia et sa famille tentent de trouver leur place dans une société qui n'en laisse que peu aux personnes démunies et sans ressources.

Roman social et d'apprentissage, cet ouvrage dresse le portrait d'une adolescente qui se cherche, qui se construit mais qui tombe aussi. Bien loin de susciter de l'empathie ou de l'attachement, le personnage de Gaia est criant de vérité et de justesse.

L'auteur agrémente le livre de certains faits réels, comme la tenue du sommet du G8 à Gênes en 2001 et met en lumière le passage de l'enfance à l'adolescence puis à l'âge adulte de cette jeune fille dont le mot d'ordre est de ne jamais baisser les bras malgré les difficultés qui ponctuent son chemin.

La voix de la lectrice, Florine Orphelin, porte bien le personnage de Gaia. Malgré la rudesse du caractère de cette héroïne, la douceur du brin de voix de Florine Orphelin offre une parenthèse à celle-ci. Quant à l'interprétation du texte, elle est juste nickel ! le choix de cette lectrice est, selon moi, hyper bien pensé.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Ce roman social m'a beaucoup plu. Ce fut un petit coup de foudre et je n'oublierai pas le personnage de Gaia de si tôt, cette adolescente romaine issue d'une famille pauvre. La mère, Antonia, est un personnage imposant qui travaille ardemment pour que les siens se tracent une route au moins normale dans la vie, c'est-à-dire hors de la misère. Elle leur assure un toit, elle leur donne une bonne éducation, elle les place à l'école, elle les écarte des mauvaises fréquentations.

Le début du livre décrit leur quotidien misérable dans un entresol insalubre s'ouvrant sur un coin de cour. Cette famille démunie, avec un père malade, des frères jumeaux encore bébés dormant dans une boîte pour dormir, le petit frère Mariano, petit révolté de la vie, déjà sur les traces de leur mère… Aucun misérabilisme pourtant dans cette narration qui regorge de détails sinistres, car la révolte et la rage maternelle rend cela tout à fait impossible.

Au cours du roman, la famille va déménager et ainsi, l'aspect social se met à parler davantage. Gaia, spectatrice autant que victime des déboires de sa famille, accumule en elle honte, colère, sentiment d'injustice. A l'école « des riches », ça ne se passe pas toujours sans rejet ni brimade, et une violence inquiétante va se pointer dans certaines situations.

C'est un très beau portrait de la jeune fille, écrit avec des phrases plutôt longues, dans une écriture simple que j'ai beaucoup appréciée, même si parfois Gaia m'a mise à distance et que j'ai eu des difficulté à la comprendre. J'avoue que je me suis moi-même reconnue en elle, toutes proportions gardées, mais aussi en d'autres personnages du livre.

Un beau livre qui parle des adolescents en mal de vivre.
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Nous sommes dans l'Italie des années 2000. Gaia, la narratrice, vit dans une famille modeste, tenue d'une main de fer par la mère, Antonia. Une mère volontaire, au tempérament fort et fier, qui tente, non sans peine, de subvenir aux besoins de tout son petit monde.

La scène d'ouverture nous dévoile toute la ténacité et le courage de cette femme, qui tient bon et qui résiste pour obtenir ce à quoi elle a droit. Antonia se tue à la tâche et ne se laisse jamais abattre. Elle est le roc de cette famille, celle sur qui tous se reposent en toutes circonstances, celle qui prend toutes les décisions.

Massimo, le père, handicapé suite à un accident du travail, traîne sa peine depuis son fauteuil roulant. Mariano, le fils aîné, né d'un autre père, est en constante rébellion, “un courant d'air suffit à l'électriser”. Quant aux jumeaux, ils sont encore petits. Alors Antonia place tous ses espoirs en sa fille Gaia. Elle attend d'elle qu'elle travaille bien à l'école, qu'elle obtienne les meilleurs résultats, qu'elle aille à l'université et qu'elle trouve un bon travail. Elle doit s'extraire de sa condition, dépasser ses limites, c'est sa seule chance de faire un pied de nez à la société et de vivre une autre existence que celle déterminée par sa naissance.

C'est une forte pression sur les épaules d'une enfant. Une enfant qui, comme tous les enfants, ne veut pas décevoir, et qui va apprendre à se battre bec et ongles pour avoir sa place. Difficile, surtout quand vous n'avez rien. Quand, pour vous permettre d'atteindre vos objectif, le reste de la famille doit faire des sacrifices et se priver de choses souvent essentielles. Alors Gaia sait qu'elle n'a pas le droit à l'erreur.

C'est un roman qui exhale une rage obstinée, qui nous vient de la narratrice. A chaque étape de sa vie, la réalité nous assaille, la pauvreté, le mépris et la différence qui fait mal. D'autant plus que Gaia nous offre une image d'elle-même assez peu sympathique. Elle ne s'aime pas et par mimétisme, nous ne l'aimons pas vraiment non plus. Ses cheveux roux, ses taches de rousseur, physiquement non plus, elle ne s'aime pas. D'ailleurs, la jalousie la prend souvent en otage, tel un parasite. Les garçons qui la regardent à peine et ses amies qui ont tout, la beauté, l'argent. Alors quand la trahison s'invite, sa carapace se fait plus dure, plus solide, inviolable. le coeur et le corps se désolidarisent, et elle n'est plus qu'un être froid et détaché, une machine sans émotions.

Il est délicat de s'attacher à cette narratrice, d'éprouver une quelconque sympathie à son égard. Pourtant, on la comprend et on imagine combien la vie est ingrate parfois. On sait qu'au fond tout ceci n'est qu'une façade, un moyen de survivre, de se protéger pour avancer et atteindre son but. Peut-être qu'ensuite, l'eau du lac sera enfin plus douce. En attendant, on subit sa jalousie, sa colère et sa vengeance. Mais quand celle-ci devient démesurée, complètement disproportionnée, alors non, vraiment, on ne veut plus cautionner, on ne veut plus excuser, seulement que cela cesse.

L'eau du lac n'est jamais douce” est un roman d'apprentissage. Un terme qui prend tout son sens ici, avec Gaia à la fois personnage et sujet du récit, qui évolue en faisant l'expérience de la vie. Enfant, adolescente puis jeune adulte, sa personnalité s'esquisse puis s'affirme en fonction de son environnement, de ses interactions, de ses possibilités.

Pour ma part, j'aime beaucoup ce type de récit, que je trouve toujours intéressant et intense à lire. Giulia Caminito met en lumière les injustices, les difficultés sociales, sans pour autant prendre position. Une neutralité qui se ressent tant dans l'écriture que dans le manque d'empathie de la narratrice. Présenté de cette façon, c'est un roman qui paraît sombre et noir, mais étrangement il ne l'est pas. C'est une Italie aussi colorée que sa magnifique couverture française. Certes, l'histoire n'est peut-être pas aussi douce que son titre, mais elle est passionnante à lire.

Un roman qui, par certains côtés, m'en a rappelé d'autres, “L'amie prodigieuse” d'Elena Ferrante, notamment. Ce n'est pas tant l'histoire qu'une certaine ambiance, le personnage féminin central, la pauvreté, ou encore l'Italie.

Dans la version audio, l'interprétation de Florine Orphelin apporte un peu de douceur et de légèreté au personnage de Gaia. Elle a largement contribué à me la rendre moins antipathique. Son timbre de voix est véritablement plaisant et j'avais sans cesse le désir de me replonger dans mon écoute. J'ai aimé son interprétation, j'ai aimé y retrouver cet humour particulier, souvent sarcastique, qui pimente le récit. Un roman qui m'aurait sans doute paru moins abordable dans sa version papier et que l'écoute a aidé à rendre moins amer, voire même plus passionnant.

Ma chronique complète est sur le blog.
Caroline - le murmure des âmes livres
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Merci à Babelio et Audiolib.
Italie, en 2000. Peu d'allusions à la situation, juste des manifs auxquelles le fils participera avant d'être recadré par sa mère.
Gaia, de petite fille à l'âge adulte, est indignée par les différences sociales dont elle souffre; c'est elle qui raconte l'énergie et la dureté de sa mère qui se bat contre une grande pauvreté. Antonia a eu un fils, puis avec son mari une fille et des jumeaux. le père a eu un accident au travail qui le laisse en fauteuil roulant: comme il travaillait au noir, il n'a aucun droit. C'est Antonia qui doit faire bouillir la marmite pour le père handicapé et les quatre enfants (elle chassera le fils aîné) . Elle semble croire à l'ascenseur social et pousse sa fille a faire de longues études ce qu'elle regrette de ne pas avoir pu faire.
Gaia est en révolte constante...peu à peu, elle m'est devenue odieuse par sa violence et ses réactions au suicide d'une amie et la mort de sa meilleure amie: elle passe vite à autre chose au moins dans la construction du roman qui n'est pas chronologique.
Il y a trop de personnages pour me plaire et au niveau de l'écriture les très nombreuses appositions m'ont agacée.
Je ne l'ai pas lu dans les meilleures conditions: au lendemain d'une opération douloureuse.
J'ai l'intention de lire son autre livre pour un autre éclairage, l'autrice le mérite!
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