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Citations sur Paroles empoisonnées (64)

J’arrête de respirer quelques instants, angoissée, en reconnaissant les paroles que j’ai entendues des millions de fois. Des paroles qui écrasent, qui blessent, qui nous ont marquées, elle et moi, et nous ont peu à peu empoisonnées. Maman s’est toujours rendue, a accepté sa défaite et a perdu la bataille avant de l’avoir menée. Je l’ai vue se taire trop de fois, baisser les yeux, pleurer doucement et se soumettre aux insultes. Non, Maman ne peut rien contre lui, elle est faible. Pousse-toi, Pepe, sors de là une bonne fois pour toutes ! crie enfin Maman dont la voix monte, en faisant un pas en avant, sans l’écouter, sans se laisser intimider, en levant le couteau d’un geste menaçant. Je remarque comment il tremble, aussi déconcerté que moi. Tu es folle ? Tu me menaces ? Ne me touche pas ! Que crois-tu donc faire ? Me poignarder peut-être ? Maman ne l’écoute pas et me tend la main gauche par-dessus sa personne. Indifférente à sa personne. Ce duel auquel j’ai assisté tant de fois, elle en remporte aujourd’hui la victoire absolue. Allez, Bárbara, elle répète calmement. Et moi, instinctivement, je prends sa main et je crois que ça y est, que tout est fini, que j’ai fait mon choix.

Mais il réagit violemment, m’agrippe à deux mains et me lance de toutes ses forces contre le mur. Je sens des craquements, mon corps qui s’écrase et s’effondre. Je ferme les yeux, et le cri de Maman résonne dans l’obscurité. Des coups, encore des coups, il veut m’écraser et me crever comme un rat, je sens ses bottes me frapper les côtes, le ventre, les cuisses. J’essaie de me protéger comme je peux avec les mains, jusqu’à ce qu’un coup plus violent que les autres m’enfonce la poitrine et me déchire la chair comme un poignard.
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Bien sûr que je te comprends ! Viens avec moi. Et elle parle sérieusement, à tel point qu’inconsciemment j’ai fait un pas vers elle, mais je me suis heurtée à lui, à ses paroles méprisantes et empoisonnées. Tu es pathétique, Nuria. Tu me fais de la peine. Tu t’es regardée dans le miroir ? Tu es une vieille ratée, une mère indigne, tes enfants ne te respectent pas. Tu n’entends donc pas ta fille te demander de t’en aller ?
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S’il était capable d’analyser l’histoire et de discerner avec clairvoyance ce qu’auraient dû faire quelques sénateurs républicains au Ier siècle avant Jésus-Christ, il serait aussi capable de m’aider, moi, et de me sortir de ce bourbier. Mon problème était que je ne savais pas comment commencer ni comment en parler. Comment le nommer. Je n’avais pas de mots. Je croyais que si je n’en parlais pas, ça n’existerait pas. Sans nom, les choses s’oublient ou disparaissent. C’est pourquoi cela me coûtait tant d’en parler à quelqu’un.
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J’étais amoureuse de sa sagesse, qui m’a ouvert les yeux sur les choses que je ne voulais pas voir. Il adorait le cinéma italien et on a vu ensemble des films de Visconti, Fellini, Bertolucci, Pasolini. J’en comprenais certains, d’autres pas trop, mais lui réussissait patiemment à nous faire remarquer la beauté d’une image, la description d’un sentiment, la photo impitoyable d’un monde. Je me souviens de Rome, ville ouverte, de Rossellini, et du cri d’Anna Magnani quand on arrête son compagnon chétif et qu’on le pousse dans le camion. Pour moi, Anna Magnani était une grosse ringarde, mais son cri était si émouvant, si authentique et son amour si profond et sa mort si tragique, que j’ai fini par la trouver sexy.
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Il disait que j’étais une intelligence farouche, un diamant brut. Je sais que ça lui a fait mal. Je sais qu’elle aurait aimé être à ma place et qu’elle en crevait d’envie quand Jesús me laissait les livres de Hermann Hesse. Je l’ai surprise plus d’une fois à nous espionner dans la bibliothèque, faisant l’idiote, comme si elle fouillait les étagères de fiction contemporaine à la recherche d’un livre qui n’existait pas, pendant qu’on discutait de Siddharta durant des heures et des heures. Tu as compris quelque chose ? elle me demandait ensuite, dépitée. Et dans ces moments-là, je la trouvais profondément antipathique.
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Parfois, les gens changent. Sans moi, elle aura appris à se débrouiller, aura osé dire ce qu’elle pense à voix haute et regarder les autres dans les yeux. Quand il y avait plus de trois personnes, elle se taisait, et en classe, quand on l’interrogeait, elle devenait rouge comme une tomate. Ce qu’ignoraient nos camarades, c’était qu’un grand nombre d’idées que j’exposais à voix haute, parce que moi, ça ne me gênait pas, venaient d’elle. Elle était la tête pensante et moi la pie qui jacassait. Je lui volais ses idées, j’étais un imposteur. On étudiait ensemble et elle devait m’expliquer les maths et me faire des résumés de SVT et d’histoire.
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Elle ne sait pas, elle a honte de pleurer, comme de danser et de montrer ses seins. Et elle est vraiment trop con, parce que des seins comme les siens, ça les rend dingues, les mecs. Moi, je lui disais : Eva, mets un tee-shirt moulant et tu te feras draguer. Mais elle, rien à faire. Eva voulait être invisible et passer inaperçue. Martín ne connaissait même pas son nom. C’est dingue, parce que c’est elle qui nous a présentés. Oui, ta copine qui ne cause pas, comment elle s’appelle ? Peut-être qu’elle a fait des études de journalisme, comme on se l’était promis ? Eva était entêtée. Une petite fourmi travailleuse et responsable avec les idées claires.
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Je ne voulais pas continuer à vivre dans cette angoisse permanente, à rêver de biftecks tendres et d’assiettes de pommes de terre inaccessibles, avec mes jambes qui se dérobaient, et les étourdissements, et la rage de détruire le monstre et d’apaiser la douleur. Parce que avoir faim, c’est comme avoir une bestiole déchaînée en soi, qui nous déchire de ses griffes et de ses dents, réclamant son dû, jour et nuit, sans jamais nous laisser en paix. Et la douleur s’entremêlait avec la peur qu’il ne revienne pas et ne m’abandonne dans ce trou noir, avec un frigo vide. Qu’il revienne, qu’il ne me laisse pas mourir de faim, je priais inutilement et en silence. Et je me suis vendue pour une assiette de lentilles.
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Avoir faim et ne pouvoir manger, c’est comme mourir un peu à chaque minute, à chaque seconde. Mon corps me prévenait que je devais lutter pour ne pas m’écrouler. J’observais mes bras, chaque jour plus minces, mes jambes émaciées, mes côtes que l’on pouvait compter une à une et mon ventre creux entre les os du bassin. Je devenais un squelette. Des histoires de naufragés qui buvaient le sang de leurs compagnons me revenaient en mémoire, de soldats qui dévoraient les viscères des morts, et de survivants dans la neige qui s’étaient nourris de cadavres. Et ça ne me surprenait pas le moins du monde, car la force de la faim est telle qu’on est capable de tout pour l’apaiser. J’aurais tué pour une assiette de macaronis.
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Le monde est rempli de crétins, mais personne ne sait les reconnaître. Et soudain, un froid glacial l’envahit. Elle se rappelle avoir confessé à Pepe Molina ses soupçons infondés sur Martín Borrás. Une sueur froide trempe les vêtements qu’elle vient d’enfiler. Qu’a-t-elle fait ? Pourquoi lui avoir dit ça ? Il va le tuer.
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