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Comment résister à un pareil titre ?!

"J'entends des regards que vous croyez muets"... Magnifique...

Après des lectures passionnantes mais sombres, "lourdes"... j'ai choisi un recueil de courts textes jubilatoires d'un auteur découvert avec bonheur en 2011, avec un texte très réussi , enthousiaste et communicatif , "Nos vies romancées"...!! "

Là, il s'agit de croquis, de textes saisis dans le quotidien, de débuts d'histoires imaginées par l'écrivain, à partir de ses observations des gens...dans sa vie de tous les jours, dans la rue, les jardins, les terrasses des cafés, le métro, au bord de la mer, etc. Comme il le formule très justement, avec une sorte d'ironie à son encontre: "prédateur", "voleur" impénitent des bribes de vie d'inconnus, rencontrés au hasard des jours !!! Mais à des degrés différents, ne le sommes-nous tous pas un peu, un jour... ??

"Je suis un prédateur joyeux à la recherche de sa prochaine proie, impatient de vous dépecer et ravi à l'idée que les hyènes passeront à côté de votre cadavre sans rien remarquer, ni des restes qu'elles
auraient à terminer, ni du butin dont j'ai joui et que j'emporte jalousement dans mon carnet." (p. 61)

J'avoue moi-même le regard "glouton"... lors de mes promenades,
flâneries ... L'imagination s'envole par des paroles entendus, des sourires,
des visages (nous parlant plus que d'autres)...J'ai moi-même toujours sur
moi, bloc et crayon... pour noter des idées ou des réflexions naissant
justement de ces "Regards que vous croyez muets" !!

Des textes légers, déjantés, drôles ou plus graves...un ensemble très large
d'émotions... des morceaux bouleversants sur la solitude des individus, dans nos villes et sociétés d'écrans et d'amitiés virtuelles...!

Comme les recueils des nouvelles... il y a obligatoirement des proses inégales...ou qui nous marquent moins.... Avec Arnaud Cathrine , ces proses brèves tiennent aussi de la graphomanie, du besoin irrépressible de "garder trace"... d'instants fugaces, de ceux qui peuvent apparaître insignifiants à des moments nettement plus graves et forts
en émotion... L'éventail est large , tour à tour gris ou coloré, quelques évocations d'enfance ou du passé, des pieds de nez amusants comme ces pages assez drôles sur un livre "mémorable" de la grand-mère paternelle de l'écrivain: "Convenances et bonnes manières" de Berthe Bernage...

"Je me dis, incrédule : un homme est venu mourir devant chez moi, j'ai vu un homme mourir. Je me dis des choses comme ça dont il n'y a rien à penser : ce sont des phrases toutes faites qui se portent à mon secours et entendent faire barrage à l'effroi. (...) Je contemple l'homme mort . Qui est-il ? Je comprends qu'aucune fiction n'est possible en l'occurrence." (p. 140)

Nous avons même l'extrême surprise de croiser au détour d'une de ces
courtes proses... Marguerite Duras !!
""Vous avez été visionnaire, Marguerite [Duras]- A quel propos ? - Quand vous avez déclaré que nous serions bientôt noyés dans l'information, que nous aurions des écrans partout.- J'ai dit ça en 85.-
Mais vous avez dit aussi qu'il resterait la mer quand même. Toujours elle.- Les océans. Et la lecture. Les gens vont redécouvrir ça. Un homme, un jour, lira. Et puis tout recommencera." (p. 80)

Une lecture agréable...comme une légère brise de mer par une journée ensoleillée... des brèves ironiques ou humoristiques...côtoient le drame , ou le chagrin ,comme la vie tout court !!
De plus, J'apprécie le regard très bienveillant et la sensibilité de Arnaud Cathrine !....
"Je te préviens : je n'ai pas du tout envie de me retrouver dans ton livre. Tu te prends pour Sophie Calle ou quoi ? "(p. 171)


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" Bien vu", "très bien vu".
C'est ce qu'on se dit à la fin de chacun ( ou presque) des textes de ce livre. C'est si finement observé.
On joue tous à ce petit jeu qui consiste à imaginer des vies à partir d'un visage ou de paroles entendues par inadvertance dans notre vie quotidienne. Arnaud Cathrine note ce qu'il observe dans des carnets et à partir de cette matière première, il en fait de belles histoires parfois émouvantes, parfois ironiques, toujours intéressantes. Ces histoires ne sont pas seulement inventées, elles sont aussi parfois fantasmées, comme dans un rêve .
Arnaud Cathrine crée des fictions qui montrent ce qui l'émeut ou le révolte, avec des personnages de la vie de tous les jours : la caissière du supermarché, les vieillards en prise avec la solitude, les femmes divorcées, l'ado mal dans sa peau, le couple en rupture; les petits drames de la vie quotidienne.
L'écriture est limpide, c'est sincère, sensible et généreux. Un vent d'air frais.
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Délicieuses et émouvantes tranches de vie volées à des passants dans la rue, les cafés, le métro, les restaurants, les plages, partout où des inconnus se croisent et dévoilent à leur insu des moments de leur intimité. L'imagination fait le reste.
Belle écriture, simplicité de cadrage, sensibilité sans mièvrerie, quelques surprises comme la vie en réserve.
J'ai vraiment passé un excellent moment en compagnie de cet auteur que je ne connaissais que de nom.
Cela me donne envie de fouiller cette piste, d'autant qu'Arnaud Cathrine a de multiples talents : parolier, scénariste, écrivain pour la jeunesse.
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"J'entends des regards que vous croyez muets" , le titre sonne beau et, une fois n'est pas coutume, le texte qui se cache derrière l'est tout autant !
A proprement parlé, il ne s'agit pas d'un roman, mais d'une suite de soixante-cinq récits assez brefs qui nous accroche dès la première phrase ( "Je passe mon temps à voler les gens." ) et ne nous lâche qu'à la dernière ("Qu'on laisse mon voisin en vie."). Rien qu'avec cette dizaine de mots, on perçoit déjà le regard d'Arnaud Cathrine, fait d'une réelle bienveillance pour les inconnus qu'il croise ou observe au hasard d'un déplacement. Et s'il se qualifie de voleur, ce n'est bien évidemment que pour la bonne cause littéraire, couchant sur papier avec son talent d'écrivain, ce que tout un chacun s'amuse à faire peu ou prou, qui dans une salle d'attente, qui dans un train, ou un bar : imaginer la vie d'inconnus.
Si l'exercice peut sembler assez banal, cette succession de petites histoires histoires remarquablement écrites, façonne au fil des pages un jeu de miroir vertigineux. En brossant le portrait de toutes ces personnes, parfois à peine observées quelques minutes, en leur imaginant un passé, un présent, voire un avenir, juste en s'accrochant à leurs gestes, leurs vêtements, leur voix, en apparaît, en filigrane, un autre, celui de l'auteur. le lecteur, dont visiblement on pousse la curiosité, devient doublement observateur ( j'aurai pu dire voyeur, mais le terme aurait été grossier face à la finesse non dénuée de piquant de l'auteur). Touché, ému, intrigué par ces inconnus décrits et partiellement réinventés, il pénètre aussi dans une partie de l'intimité de l'écrivain, piquant çà et là quelques éléments qui, de façon pointilliste, dressent, en creux, la silhouette d'un quarantenaire qui, bien qu' intellectuel parisien, renvoie le lecteur à sa propre image.
On a tous quelque chose d'Arnaud Cathrine et de ces (ses?) inconnus aux histoires qui ne peuvent naître que du propre vécu de celui qui les écrit. Alors, avoir un visage pas forcément aimable, faire la vaisselle à la main, parfois du naturisme, prendre des anti-dépresseurs, faire des courses à la supérette d'à côté, subir une intervention médicale, aller en vacances en France, en train, plutôt en bord de mer, à la plage de la Salie ( tiens... moi aussi ), s'intéresser aux autres... difficile de ne pas y attraper quelque chose de soi ( sans parler des nombreuses situations contées). Et dans ce kaléidoscope de sensations diverses, apparaît un autre miroir, celui de notre société où l'on remarque beaucoup d'êtres solitaires, très solitaires, même quand ils vont par deux. Sous les vernis, les barbes, les cheveux teints, derrière les lunettes de soleil, les écrans de smartphones, les cartes de restaurants, des individus luttent contre ce mal généré par nos sociétés de vitrine perpétuelle ( dans les vraies, l'auteur pointe une marque de vêtements appelée " Enfants riches déprimés" ) : la solitude !
D'une très belle écriture facile à lire car directement connectée à nos vies lambdas, les récits de " J'entends des regards que vous croyez muets" nous emballent. On ne peut résister à l'envie de les lire à haute voix à notre entourage et ils nous offrent un réel plaisir de lecture où, ici, la bienveillance n'est pas un vain mot ni un concept marketing. Arnaud Cathrine possède un regard franc et généreux, et son dernier livre se déguste comme une belle friandise acidulée qui fait autant de bien à l'âme qu'à l'esprit.
Lien : http://sansconnivence.blogsp..
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Miam! Ces regards de l'auteur se picorent quotidiennement ou d'une traite, selon chacun.

J'ai choisi de les savourer délicatement, dans le bus, au parc, dans une salle d'attente, chez "mes" commerçants...J'ai trouvé que ma lecture entrait en résonance avec ce que j'observais autour du moi : le portrait du fils d'un boulanger, tiens! L'apprenti boucher qui sort de la réserve!

Il y en a pour toutes les typologies de gourmands (si tant est que cela existe) : des miettes caustiques, petits portraits qui vous font sourire ou exploser d'un rire franc ; des bouchées plus mélancoliques et, en trame, les apparitions d'Annie Ernaux, Marguerite Duras qui inspirent et transforment le texte, la lecture à la manière des jolies recettes.

Miroirs de nos vies donc. Merci au chef Cathrine, je reviens très vite m'installer à l'une de vos tables!

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Ce recueil de courts récits, inspirés de la vie réelle, fantasmés ou parfois retranscrits (qui peut le savoir sauf l'auteur ?) est très prenant. Parfois, je me dis qu'être provincial et mener une vie bien rangée est d'une banalité sans nom. D'autre fois, je me dis que cette banalité ressemble pour beaucoup à celle des autres qui ont une vie différente. L'auteur parle beaucoup d'amour, de rupture, de désillusion, de déception, d'attente latente et pas ouvertement formulée. le corps n'est jamais absent de ces portraits psychologiques poussés. Cette présence est parfois lourde, mais toujours juste. L'authenticité du récit en est - je pense - d'autant plus saisissante. Les à côtés très auto-fictionnels font preuve de cette véracité. Il n'est pas donné à tout le monde d'être aussi tranchant, avec le réel, saisissant et lucide sans pour autant être amer ; ouvert sans être naïf. L'auteur vise juste dans le coeur du sensible. Il faudrait que je me lance dans un de ses récits plus long. Tellement de livres à lire...
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Quand je choisis un livre des éditions Verticales, je fais toujours attention d'être dans la bonne disposition d'esprit, car généralement l'ambition littéraire est exigeante et ce ne sont pas des bouquins qu'on lit pour se délasser ;-)
Surprise donc avec celui-là : hyper facile à lire, pas de prise de tête, ni de réflexion, pas de mots à chercher dans le dictionnaire, pas de références culturelles (enfin si, quelques unes, mais je les connaissais alors que d'habitude, je ne connais rien !), bref, une lecture simple que je suis vraiment surprise de trouver chez Verticales.
L'auteur choisit d'inventer la vie des personnes qu'il croise à la terrasse des cafés, dans le métro, sur la plage, etc. Qui ne le fait pas ? Il choisit de les écrire, et de les publier. Bon. Il n'y a rien de très original. Il ne s'oublie jamais (orgueil, ou jeu ?) et revient sans arrêt à travers les pages, les personnages, ce "je" un peu intrusif qui finalement ne les laisse jamais vivre et prendre leur envol, ses personnages recréés... Et puis ça manque un peu d'empathie, tout ça : inventer une vie à partir de quelques mots, d'une allure, d'une attitude... c'est plutôt bien, mais il manque le "petit truc" qui va faire de cette histoire une histoire unique. En bref, je ne me sui spas ennuyée et j'ai trouvé ça plutôt sympa à lire, mais certains récits ne sonnent pas très justes, d'une part, quand d'autres font plutôt rire. Comme si l'auteur ne savait pas vraiment quelle plume emprunter... ce qui renforce mon sentiment qu'il n'a pas su trouver sa place (ou s'effacer) dans ce bouquin ;-)
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Ce serait une fresque sur laquelle l'artiste aurait peint soixante-cinq vies qu'il aurait « volées » : « je passe mon temps à voler des gens. Dans le métro, dans la rue, au café, sur la plage. Mon regard s'arrime, je tente de les deviner, je veux les garder, je finis par les inventer, je leur prête beaucoup de moi ». Chaque personnage, ou chaque duo, est « en situation » lorsque le regard d'Arnaud le saisit : on connait la silhouette, la corpulence, la couleur des yeux et des cheveux, le teint, la manière de porter le corps ; on sait où cela se passe, le nom du café ou de la plage ou de la rue. Ce que l'on ne sait pas, et c'est là le suspense qui fait de ces petites aventures un vrai livre, c'est à quel moment la fiction s'empare de la réalité. Quand Arnaud se met-il à inventer ? Quand ces regards cessent-ils d'être muets ? Quand les personnes deviennent-elles des personnages ? C'est cette aventure qui est proposée au lecteur, avec un réalisme, une sincérité, une aisance qui vous embarque à coup sûr. Pour fil rouge entre toutes ces vies disparates, tout ce qu'Arnaud « prête », à ces femmes et à ces hommes, jusqu'à faire de ce livre un quasi autoportrait pointilliste dans lequel chacune et chacun des soixante-cinq donne sa ligne ou sa couleur. Un livre qui, sous une lecture facile, va au plus profond de l'être, de celui qui parle comme de ceux dont il est question. Avec conviction, sans fausse modestie, sans ostentation. Un livre qui sonne juste. Un livre VRAI.
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Il ne s'agit ni plus ni moins que d'une forme de journal de l'auteur, qui partout où il passe semble ne jamais pouvoir se départir de sa nature d'écrivain : celle d'un homme qui observe ses contemporains d'un regard curieux, bienveillant, tendre même parfois, qui tel Sherlock Holmes n'a besoin que de quelques petits détails pour reconstruire aux personnes croisées toute une vie. Que ce récit corresponde à la réalité, quelle importance ? le plaisir est dans l'exercice de pensée.

Pour le lectorat, il est dans la délicatesse avec laquelle Arnaud Cathrine esquisse des portraits, s'attardant souvent, consciemment ou non, sur des personnes dans une situation de fragilité ou de vulnérabilité, de laissés-pour-compte comme son voisin qui parle tout seul et semble avoir peur de tout au dehors, ce jeune homme à la laverie dont la vie semble tenir dans un seul sac, ce musicien des rues dont la dégaine se surimpose dans l'esprit de l'auteur avec des événements traumatiques. Parfois, au contraire, ce sont des gens en apparence bien sous tous rapports, mais alors l'auteur débusque les failles, comme si ses propres fragilités lui donnaient la capacité de repérer celles des autres. C'est une tenue légèrement élimée, la quête de quelqu'un à qui parler, le choix d'un emplacement à la plage. Parfois, on se reconnaît, dans certains des gestes ou des comportements adoptés par les personnages qui peuplent les pages. Parfois, on reconnaît des situations qu'on a nous aussi pu observer, et c'est tantôt drôle tantôt déchirant.

Au fil des textes, c'est aussi l'auteur qu'on apprend à connaître, car il n'est pas toujours simplement un observateur discret. Arnaud Cathrine se met en scène, planqué derrière un magazine dans un train ou derrière un journal dans un café, et c'est aussi lui qui se dessine et qui devient la matière de son livre, dans ses astuces pour pratiquer ses vols, comme il appelle cette façon de réécrire la vie de ses contemporains, mais aussi dans des conversations avec des proches, ou avec des inconnu(e)s. A-t-il vraiment aidé cette femme à porter un pack d'eau ? Raccompagné ce jeune serveur en voiture ? Pris le train avec des ami(e)s qui venaient d'euthanasier leur chat ? Peu importe, ce qui compte, c'est qu'il y a pensé, que ces situations lui sont venues à l'esprit et lui ont parues dignes d'être consignées. Et à chaque texte, on ne sait pas quel rôle il va tenir dans celui-là, et cela fait partie de la surprise, de l'impression d'ouvrir en tournant la page un nouveau paquet cadeau qui laisserait jaillir un bibelot unique et surprenant.

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Comment appeler ces notes au fil de l'eau, à la poursuite de visages juste entrevus ou lors de filatures plus intrusives ? Des brèves de comptoir ? Mais ça se passe aussi sur la plage, ou dans le train, ou bien ailleurs, bref partout où l'on peut rencontrer la gente humaine et saisir un regard, des paroles en l'air, à partir desquels reconstituer une histoire, celle de nos voisins ou de parfaits inconnus. Cet exercice littéraire, consistant à reprendre un carnet de notes pour en faire un livre, bien d'autres s'y sont exercés, Annie Ernaux étant la spécialiste du genre. Arnaud Cathrine a réussi son pari dans ce kaléidoscope nous menant de Paris à Deauville en passant par Arcachon et la Provence, au gré des pérégrinations de l'auteur, décrivant avec humour les petits travers, réels ou imaginaires, d'une humanité en quête de bonheur…
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