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Citations sur Le point aveugle (19)

C’est un mensonge, je le répète, que de prétendre que les romans servent seulement à passer un moment, à tuer le temps ; au contraire : ils servent à faire vivre le temps, pour le rendre plus intense et moins trivial. Mais surtout, ils servent à changer la perception du monde ; c’est-à-dire qu‘ils servent à changer le monde.
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Un livre n'existe pas par lui-même, mais uniquement dans la mesure où quelqu'un le lit ; un livre sans lecteur n'est qu'un tas de lettres mortes et c'est quand nous autres lecteurs l'ouvrons et commençons à le lire qu'une magie perpétuelle s'opère et que la lettre ressuscite, dotée d'une vie nouvelle. Nouvelle et, bien entendu, à chaque fois différente. Un livre n'est, en somme, qu'une partition que chacun interprète à sa manière. (..)
En définitive, c'est le lecteur, et pas seulement l'écrivain, qui crée le livre.
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La seule obligation d’un roman n’est-elle pas de raconter une histoire de la meilleure des façons afin que le lecteur la vive avec la plus grande intensité possible ?
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Le roman n’est pas un divertissement ( ou il n’est pas que cela ) ; il est avant tout un outil de recherche existentielle, un outil de connaissance de la nature humaine.
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Si l’on me propose de choisir entre chercher la vérité et la trouver, je choisirai de chercher la vérité.

G. E. LESSING
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Les réponses des romans du point aveugle – ces réponses sans réponse ou sans réponse claire – sont pour moi les seules réponses véritablement littéraires, ou pour le moins les seules que proposent les bons romans. Le roman n’est pas un genre responsif mais interrogatif : écrire un roman consiste à se poser une question complexe et à la formuler de la manière la plus complexe possible, et ce, non pour y répondre ou pour y répondre de manière claire et certaine ; écrire un roman consiste à plonger dans une énigme pour la rendre insoluble, non pour la déchiffrer (à moins que la rendre insoluble soit, précisément, la seule manière de la déchiffrer). Cette énigme, c’est le point aveugle, et le meilleur que ces romans ont à dire, ils le disent à travers elle : à travers ce silence pléthorique de sens, cette cécité visionnaire, cette obscurité radiante, cette ambiguïté sans solution. Ce point aveugle, c’est ce que nous sommes.
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Un livre n'existe pas par lui-même, mais uniquement dans la mesure où quelqu'un le lit ; un livre sans lecteurs n'est qu'un tas de lettres mortes et c'est quand nous autres lecteurs l'ouvrons et commençons à le lire qu'une magie perpétuelle s'opère et que la lettre ressuscite, dotée d'une vie nouvelle.
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Les lecteurs pourront s’interroger sur le bien-fondé de ces explications. Quelle importance si les romans continuent d’être les mêmes depuis un siècle et demi, du moment qu’ils sont bons ? Pourquoi ce besoin de rénovation, de nouvelles recherches formelles, de conquêtes de nouveaux territoires ? La seule obligation d’un roman n’est-elle pas de raconter une histoire de la meilleure des façons afin que le lecteur la vive avec la plus grande intensité possible ? Peut-on mieux y parvenir que ne le fit le roman du XIXe siècle ou les romans du XXe ou XXIe siècle, qui ont suivi ce même modèle ? N’avons-nous pas dit que, même si les temps changent, les hommes demeurent en substance les mêmes, que l’art n’avance ni ne recule et que Picasso et Kafka ne sont pas meilleurs que Velasquez et Cervantès ? Pourquoi vouloir changer des choses qui sont très bien comme elles sont ?
Aucune de ces questions n’est triviale ; on peut, me semble-t-il, répondre à toutes, et par la réponse suivante : le roman n’est pas un divertissement (ou il n’est pas que cela) ; il est avant tout un outil de recherche existentielle, un outil de connaissance de la nature humaine. Il est vrai qu’en tant qu’individu, Velasquez est substantiellement identique à Picasso et Cervantès à Kafka, de même qu’il est vrai qu’en tant qu’artiste, Picasso n’est pas supérieur à Velasquez ni Kafka à Cervantès ; mais Picasso voit dans la réalité des choses que Velasquez n’a pas vues et Kafka découvre chez les êtres des caractéristiques que Cervantès n’a pas découvertes. La découverte de Kafka n’annule pas celle de Cervantès, comme la découverte de l’Australie n’annule pas celle de l’Amérique : celle-ci complète la carte du monde ; celle-là, la carte de l’homme. Il n’est pas vrai que la seule obligation d’un roman soit de raconter une bonne histoire et de la faire vivre au lecteur ; la seule obligation d’un roman (ou du moins la plus importante) consiste à amplifier notre connaissance de l’humain et c’est pourquoi Hermann Broch disait que tout roman qui ne découvre aucune parcelle jusqu’alors méconnue de l’existence est immoral. Cela dit, nous savons que le roman est forme et que, dans un roman, une mauvaise histoire bien racontée est une bonne histoire, alors qu’une bonne histoire mal racontée est une mauvaise histoire ; de même, utilisant de vieilles formes, le roman est condamné à dire de vieilles choses ; c’est seulement en s’appropriant de nouvelles formes qu’il pourra dire de nouvelles choses. D’où l’impératif d’innovation formelle. Le roman du XIXe siècle n’est pas le modèle parfait et insurpassable du roman, parce que la forme parfaite du roman n’existe pas ; plus précisément : la seule forme parfaite du roman est, à la rigueur, la forme imparfaite mais infiniment perfectible que Cervantès a conçue. Le roman a besoin de changer, de revêtir un aspect qu’il n’a jamais revêtu, d’être là où il n’a jamais été, de conquérir des territoires vierges, afin de dire ce que personne n’a encore dit et ce que personne à part lui ne peut dire. C’est un mensonge, je le répète, que de prétendre que les romans servent seulement à passer un moment, à tuer le temps ; au contraire : ils servent à faire vivre le temps, pour le rendre plus intense et moins trivial. Mais surtout, ils servent à changer la perception du monde ; c’est-à-dire qu’ils servent à changer le monde. Le roman a besoin de se renouveler pour dire des vérités nouvelles ; il a besoin de changer pour nous changer : pour nous rendre tels que nous n’avons jamais été.
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Le roman moderne est un genre unique parce que, du moins en germe, toutes ses possibilités se trouvent contenues dans un seul livre : Cervantès fonde et épuise le genre dans son Quichotte, tout en le rendant inépuisable. En d’autres termes : dans le Quichotte, Cervantès définit les règles du roman moderne en balisant le territoire sur lequel les autres romanciers ont depuis évolué et qu’ils n’ont probablement pas encore achevé de coloniser. Qu’est-ce donc que ce genre unique ? Ou, du moins, qu’est-il pour son créateur ?
Pour Cervantès, le roman est le genre des genres : et aussi, ou surtout, un genre dégénéré. (…) Curieusement, c’est cette tare congénitale qui finit par constituer le centre névralgique et la vertu principale du genre : son caractère éminemment libre, hybride, malléable presque à l’infini ; le fait qu’il soit, comme le disait Cervantès, un genre des genres où entrent tous les genres et qui se nourrit de tous. Il est évident que seul un genre dégénéré pouvait devenir un tel genre, parce qu’il est évident aussi que seul un genre plébéien, un genre sans obligation de protéger sa pureté et sa vertu aristocratique, pouvait se mêler à tous les autres genres, se les appropriant et devenant ainsi un genre hybride. C’est exactement ce qu’est le Quichotte : un grand fourre-tout où, reliés par le fil ténu des aventures de don Quichotte et de Sancho Panza, s’unissent dans un amalgame inédit, comme s’ils constituaient l’encyclopédie de toutes les possibilités narratives et rhétoriques connues par l’auteur, tous les genres littéraires de son époque, de la poésie jusqu’à la prose, du propos judiciaire jusqu’au discours historique ou politique, du roman pastoral jusqu’au roman sentimental, du roman picaresque jusqu’au byzantin. Et, si c’est exactement ce qu’est le Quichotte, c’est exactement ce qu’est aussi le roman ou, du moins, un aspect fondamental du roman, celui qui va de Lawrence Sterne à James Joyce, de Henry Fielding ou Denis Diderot à Georges Perec ou Italo Calvino.
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J’essaye de cultiver la modestie mais j’essaye également d’éviter le masochisme, alors, sauf dans mes pires heures, je ne me prends pas pour un écrivain médiocre.
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