Elle s'était approchée du bar pour se trouver en pleine lumière. J'eus un aperçu de ses charmes sous les plis vaporeux de son déshabillé.
- D'accord, j'accepte ce boulot, dis-je en faisant un effort terrible pour ne plus la regarder.
À ce moment-là, il me semblait que c'était une occasion qui me vaudrait pas mal de bon temps. Mais ça ne devait pas se passer comme ça. Quand on se laisse doubler par une belle souris, ça ne se passe jamais comme on se l'imagine.
Avec elle, l'amour était aussi ignoble, aussi horrible, qu'avec un cadavre.
Dès que je l'aperçus, je compris que c'était un créancier. Je le voyais à son regard d'acier et au large sourire jovial qu'il m'adressa, aussi faux que les cils d'une entraîneuse.
Elle ne répondit pas. Ses yeux verts étaient chargés de haine, mais ça m'était égal. Est-ce qu'on ne raconte pas que la haine est la cousine de l'amour ? J'étais dans la place, et auprès d'elle. Le reste dépendait de la façon dont je saurais manœuvrer. J'ai toujours eu pas mal de succès avec les femmes hostiles. C'est même les seuls succès que j'ai eus jusqu'à maintenant.
C'est comme ça que tout a commencé. C'est comme ça que je me suis jeté dans le merdier. A ce moment-là, il me semblait que c'était une occasion qui me vaudrait pas ma de bon temps. Mais ça ne devait pas se passer comme ça. Quand on se laisse doubler par une belle souris, ça ne se passe jamais comme on se l'imagine. Drôle d'engeance, les femmes !
Je le repoussai et le remis d'aplomb. Je m'apprêtais à repartir, mais je me suis arrêté pile. J'étais impressionné par la coupe de son smoking, sa montre en or, et tout le reste de son harnachement qui puait le fric; car s'il y a une chose qui me fascine irrésistiblement, en dehors d'une jolie femme, c'est bien l'odeur du fric.