La Brière est un territoire que je connais bien, et j'ai été ému de reconnaître pas mal de lieux que j'ai visités ou traversés. Ce roman de terroir touchera peut-être un peu moins les gens qui ne connaissent pas le deuxième marécage de France en superficie (après la Camargue), mais il a quand même des atouts qui peuvent plaire au plus grand nombre, et notamment des personnages sculpturaux, au premier rang desquels figure Aoustin, le "héros" de cette histoire, rude bonhomme aussi dévoué à sa Brière qu'il est impitoyable envers les siens.
Il est question du statut si particulier de
la Brière (encore aujourd'hui et depuis Anne de Bretagne, elle appartient à ses riverains de manière indivise), mais il est aussi question de drame familial, qui trouve son origine dans la révolte de Théotiste, la fille d'Aoustin, contre l'autorité patriarcale.
Si l'on trouve dans ce texte certaines lourdeurs et emphases typiques de l'époque où il a été écrit (années 20), ça se lit quand même assez bien dans l'ensemble, et certaines descriptions sont magnifiques – surtout quand on connaît les lieux, et l'on voit bien que
Alphonse de Chateaubriant (à ne pas confondre bien sûr avec son homonyme du siècle précédent,
François-René de Châteaubriand) les a visités avec minutie. On dirait même qu'il y a vécu, tant il abonde en lexique spécifique au marais qui pourra d'ailleurs paraître obscur à beaucoup, notamment pour ce qui est des outils de tourbage, de chasse à l'anguille, etc.
Grand succès de l'entre deux guerres, ce bouquin est complètement tombé en désuétude, peut-être à cause du fait que son auteur – pourtant Prix Goncourt 1911 avec Monsieur de Lourdines – a par la suite activement collaboré avec les nazis, au point d'être condamné à mort par contumace alors qu'il était réfugié au Tyrol.
Et si la chute de l'auteur fut terrible, la chute de "
La Brière" l'est aussi.