Citations sur Blessures (13)
Connaitre une guerre simplement par l'intermédiaire de la radio et de journaux remplis de slogans, de rumeurs, de préjugés immuables, dans le confort de sa maison, est différent d'une expérience directe. Il est dangereux d'accorder trop d'importance aux informations de secondes main.
- Tu sais bien qu'il est parfois plus facile de mourir tôt que de vivre.
[...] toutes les blessures reçues de chaque côté du front lui paraissaient infligées sur un seul et même corps qu'était l'humanité.
Il hésita un instant sur le mot "heureux", conscient de la quantité d'encre que l'on avait versée depuis des siècles au sujet de ce sentiment ineffable, impossible à saisir, à démontrer, à prouver. Il eut une brève pensée pour ses parents, qui avaient consacré leur vie entière à une abstraction. Il m'avait ni la force ni le temps d'analyser sa courte existence, de réfléchir à ce qui l'avait pousser à se croire heureux. Il s'imaginait qu'on lèverait les yeux au ciel en lisant son dernier message : lui heureux, mais comment est-ce possible?
N'a-t-il pas coupé les ponts en partant de chez lui?
Il est vrai qu'il déteste les ponts. Les arrières-pensées, les prétextes, les précautions, les compromis que sous-entendent les ponts. Les ponts renvoient à des structures solides, à des oppositions insurmontables, à des écarts toujours persistants, à des divisions et des séparations changeantes mais éternelles. Ce mot fait partie du vocabulaire des stratèges, des diplomates, des guerriers, des savants, de ceux qui s'appuient sur des catégories rassurantes. Il refuse de devenir cette chose sur laquelle on marche en agitant un drapeau, en emportant un plan dans sa poche, en entonnant une chanson selon la direction du vent.
[...] la guerre, voulant imposer un autre rythme et d'autres modalités, cherchant à réduire le monde à une seule civilisation, était capable de balayer toute trace humaine, d'enterrer plusieurs générations, en très peu de temps. Cela au profit d'une minorité de gens puisque, au détriment d'une masse manipulable, grâce au sacrifice du sang jeune, car dans tous les camps, ce sont des jeunes plein de vitalité, des jeunes brûlants de révolte et d'exaltation, qui sont envoyés au front et qui meurent les premiers.
C'est ainsi depuis toujours, que les médiocres ciblent les êtres qui semblent vivre dans une autre dimension, jaloux de leur vitalité, de leur audace, de leur aspiration naïve à quelque chose de mieux.
[...] Dieu - il n'aime pas beaucoup prononcer son nom, mais comment le dire autrement? - n'a créé qu'une terre, qu'un peuple. On peut bien appeler cela une utopie, mais ce ne sont pas les utopies qui sont de trop dans ce monde, aujourd'hui comme hier.
La bonté était une qualité suspecte, anormale, idiote, surtout en temps de guerre.
Toute sanction contre un pays est une sanction contre un peuple entier. Ce n’était qu’un jeu entre les puissances, avec lequel Poutre-numéro-deux n’avait rien à voir. Il n’était même pas un pion sur leur échiquier. Il ne comprenait même pas les mouvements qui précédaient et suivaient. Il n’était que de la chair fraîche et gratuite servant à alimenter le feu qu’avaient allumé ceux qui aimaient jouer et avoir le dernier mot.