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Critique de Aelinel


Ça y'est! Je termine la sélection des cinq finalistes du PLIB 2019 avec cette dernière lecture : La fille qui tressait les nuages de Céline Chevet. J'avoue, je l'avais laissé pour la fin car ce n'était pas le roman qui m'attirait le plus. En cause? La touche surréaliste qui ne correspond malheureusement pas à mes goûts littéraires. Et finalement, ma lecture s'est plutôt bien passée, on peut même dire que j'ai été agréablement surprise.

A Saitama, au nord de Tokyo, Julian est un adolescent métissé anglo-japonais discret. Lorsqu'il eut douze ans, ses origines lui avaient attiré les moqueries de ses petits camarades et s'il n'y avait eu Souichiro pour le tirer de là, il aurait passé un sale quart d'heure. C'est ainsi que les deux amis devinrent inséparables et ce, bien qu'un drame ne les mît à rude épreuve. En effet, Souichiro perdit sa soeur des suites d'une maladie et Julian qui était amoureux d'elle, n'arrive toujours pas à faire son deuil. Pis, il a même perdu la mémoire de cet évènement traumatisant. Deux ans après les faits, il fait alors une rencontre déterminante dans son lycée : celle de la discrète Akiko. La jeune fille va en effet tout mettre en oeuvre pour que Julian se libère de son passé.

Une fable exotique…

A vrai dire, je n'ai pas beaucoup lu de romans se déroulant au Japon ou d'auteurs japonais. En effet, mes seules incursions littéraires ont été le roman autobiographique d'Amélie Nothomb, Stupeur et tremblements, les douze tomes du manga trop « kawai » Chi, une vie de chat, le conte surréaliste (et auquel, je n'ai pas du tout adhéré!) L'étrange Bibliothèque d'Haruki Murakami ou le thriller coup de coeur Les assassins de la 5eB de Kanae Minato.

Si ces quelques lectures m'ont permise un peu d'appréhender la société japonaise, le roman de Céline Chevet est encore plus immersif. L'auteure a fait ses études à l'Université de Tokyo et cela se ressent car elle a ajouté beaucoup de détails sur la société japonaise.
– Elle utilise du vocabulaire en langue originale et l'explicite au moyen de notes de bas de pages. Ainsi, le lecteur découvre des termes de la vie courante comme konbini (petit supermarché), les spécialités culinaires comme kakigori (glace pilée qui se mange avec un sirop) ou macha (thé japonais amer) et des formules de politesse comme Tadaima (je suis rentré) ou Okaeri (Bienvenue à la maison).
– Les us et coutumes sont également abordés et je citerai par exemple l'hommage rendus aux morts, les superstitions et la religion ou le mobilier intérieur comme le kotatsu (sorte de table chauffante) ou le futon bien plus connu dans notre société occidentale.

…et surréaliste…

« Le cours d'Histoire de l'art battait son plein. On parlait surréalisme avec les différents groupes d'Europe pour la plupart enfants du dadaïsme, l'altercation entre André Gide et Frida, l'intellectualisme français, Dali et ses expérimentations médiatiques. Tout cela semblait lointain. Je ne comprenais pas l'intérêt à ressasser des mouvements de pensée si éloignés de la culture nippone. L'avaient-ils seulement influencée? le professeur cita quelques noms comme Shuzo Takigushi ou Katsue Kitazono. » (Chapitre IV)

J'ai trouvé cette citation plutôt amusante dans le sens où le surréalisme est très présent dans le roman. Et il contredit plutôt le domaine de la physique puisque de nombreux objets ne respectent pas la Loi de la Gravité. Ainsi, un avion de papier tournoie pendant des heures au plafond d'une salle de classe tandis qu'une pièce de monnaie lancée en l'air ne revient jamais. D'autres aspects surréalistes concerne la matière et les atomes : un nuage de composition gazeuse peut-être filé comme de la laine et tressé. Ce petit côté fantaisiste s'est révélé finalement être poétique et onirique.

…qui cache beaucoup de noirceur.

Si au début du roman, le lecteur a l'impression d'avoir affaire à la vie insouciante de quatre lycéens, il se trompe lourdement! En effet très rapidement, le roman se teinte d'une ambiance lourde.
– Tout d'abord, les quatre personnages principaux entretiennent des relations malsaines. Souichiro a rencontré Julian alors qu'il était victime de racisme et de harcèlement. La conversation qu'il entretient avec lui est glaçante (et malheureusement c'est cette dernière qui m'a permise de comprendre la fin du roman!). Haru est une petite peste, égoïste, aigrie qui torture mentalement Julian. Quant à ce dernier, il idéalise son amour perdu et ne vit qu'à travers le passé. Il ne prête donc aucune attention à Akiko au point d'oublier son nom ou ses rendez-vous avec elle. Seule Akiko semble vouloir le bien de Julian en lui permettant de se libérer de son passé pour faire enfin son deuil et aller de l'avant.
– Enfin, le roman comporte un récit enchâssé : il s'agit d'un journal trouvé par Akiko et qui relate une malédiction familiale remontant au XIXème siècle. Certaines scènes sont assez crues, notamment le massacre de petits chatons. Je comprends donc que certains lecteurs aient pu être choqués.

En conclusion, La fille qui tressait les nuages est une fable relativement étrange. Et je ne doute pas que l'atrocité du récit ainsi que quelques scènes violentes puissent en rebuter plus d'un. Pour ma part, il est vrai que j'avais quelques réserves au départ, mais finalement elle ont été vite dissipées par ma lecture. Et heureusement, Céline Chenet a bien fait de rajouter quelques notes surréalistes car ces instants poétique et onirique allègent un peu le récit et en contrebalancent la noirceur.
Lien : https://labibliothequedaelin..
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