L’alcool devint à nouveau un refuge. Très littéraire. Il suffit de penser à Malcom Lowry. Il ne se réfugia pas dans les drogues. Les drogues, c’était plus rock’n roll que littéraire. Même si Gérard de Nerval, William Burroughs, Henri Michaux. A tort ou à raison, il associait la littérature à l’alcool. Par ailleurs, il avait vendu sa guitare électrique, une Ibanez de bonne facture, sur Le Bon Coin.
Comme il arrive souvent, une partie de sa réputation venait du fait qu’il avait été refusé par presque toutes les maisons d’édition connues.
C’était une partie de sa réputation. Un cinquième environ. Deux autres cinquièmes étaient occupés par le peu d’information qu’on avait sur lui. Une opacité. Leurs doigts glissaient sur la surface lisse du peu d’information.
Le cinquième suivant tenait à ce que Murakami Haruki avait dit à son sujet : « C’est un petit chef-d’œuvre de littérature ». Tout le monde avait suivi. Il l’avait dit en japonais, ce qui ajoutait encore au sérieux de l’assertion.
Le dernier cinquième se baladait, pas vraiment inquiet de trouver sa place. Les mains dans ses poches, comme ça, le genre de cinquième qui se fout de tout.
C’était un petit chef-d’œuvre de littérature. Sur l’étagère, malgré son peu de volume, il n’hésitait pas à tutoyer Proust.
– Comment vas-tu ?
– Non mais, dites donc, le rembarrait Proust, qui était un peu à cheval sur les bonnes manières.
Il plaisait beaucoup aux filles. Sur l’étagère, il était très entouré. Eugénie Grandet, La Dame aux Camélias, Madame Bovary et La Comtesse aux pieds nus.
– Mais vous êtes un film !
– Je ne t’ai pas sonné, répondit La Comtesse aux pieds nus.
Elle était un peu susceptible.
Mais globalement, ça se passait bien.