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Citations sur Palestine (59)

Depuis 1994, soit bien avant l’arrivée au pouvoir du Hamas dans la
bande de Gaza, la situation géopolitique particulière de l’enclave fait en
sorte que toute action punitive collective, telle celle de 2014, ne peut être
que tuerie et destruction à grande échelle – bref, un génocide permanent.
Sachant cela, les généraux n’ont jamais éprouvé le moindre scrupule à
bombarder les Gazaouis depuis les airs, la mer ou le sol. La réduction du
nombre de Palestiniens sur l’ensemble du territoire de la Palestine
historique fait toujours partie du projet sioniste. C’est à Gaza que sa mise en
œuvre prend sa forme la plus inhumaine.
[Livre publié en 2016]
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IP: Avant tout, il y a les faits. Nous nous devons tous de les connaître, et, à
cet égard, Benny Morris avait raison d’affirmer qu’il fallait cesser de
prétendre que les Palestiniens sont partis de leur plein gré en 1948. Le débat
portait sur les faits: sont-ils partis volontairement ou ont-ils été expulsés?
Mais là n’était pas le débat le plus important, car, avant qu’Israël n’ait
d’historiens, nous savions que des Palestiniens se faisaient expulser. Mais
nous étions incapables de croire des Palestiniens. Leurs cinq millions de
réfugiés nous répétaient sans cesse: «On nous a expulsés!» Et nous leur
répondions: «Non. Vous êtes des Palestiniens. Nous ne vous croyons pas.»
Un jour, des historiens israéliens ont mis la main sur des documents qui
confirmaient les propos des Palestiniens, qui, soudain, disaient la vérité:
«Vous savez quoi? Ils disent vrai!» Ce n’était qu’une première étape, car le
plus important n’est pas ce qui s’est produit, mais les leçons qu’on en tire. Il
s’agit d’un débat moral et idéologique. Affirmer que les historiens devraient
s’en tenir aux faits et ne pas se prononcer sur les conséquences de ceux-ci
est une approche douteuse, comme on peut le constater dans les travaux de
Morris. Dans son premier livre, il déplore ce qui s’est passé en 1948, tandis
que, dans son dernier, il déplore le fait que les Israéliens n’aient pas
complété le nettoyage ethnique. Dans les deux ouvrages, les faits sont
pourtant strictement les mêmes. Dans le premier, il critique l’idée de
nettoyage ethnique; dans le dernier, il la défend – non seulement il justifie
qu’on y ait eu recours dans le passé, mais il la défend en tant que projet
d’avenir.
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P: Comme je l’ai déjà souligné, sans perspective historique et sans
connaissance des faits, on accepte sans broncher l’image négative que le
monde et les Israéliens donnent des Palestiniens. Prenons l’exemple du
prétendu terrorisme palestinien, qui, selon les Israéliens et certains
Occidentaux, a surgi de nulle part: «On ignore pourquoi ces gens sont
violents. Peut-être parce qu’ils sont musulmans, ou en raison de leur culture
politique.» Quand on connaît l’histoire, on interprète le phénomène
autrement: «Attendez un instant. Je connais les causes de toute cette
violence. […] Quelqu’un qui s’établit chez moi par la force commet un acte
de violence. Je peux avoir tort ou raison de résister par la violence, mais
tout a commencé par l’invasion de mon lieu de vie, une invasion
accompagnée d’une volonté de se débarrasser de moi. Que puis-je faire
d’autre?» La dimension historique permet avant tout de comprendre
pourquoi le conflit s’éternise. Et on n’arrivera jamais à transformer
l’opinion des gens sur la Palestine si on ne leur explique pas en quoi
l’information est manipulée. Il importe de savoir interpréter des idées
reçues comme «processus de paix», «seule démocratie du Moyen-Orient»,
«primitivisme palestinien», etc. On doit comprendre que ces expressions
participent d’une manipulation du savoir qui favorise un certain point de
vue au détriment d’un autre.
La tâche est double. On doit connaître l’histoire comme telle, mais
aussi la façon dont les récits ont été construits et sont manipulés, afin de se
donner les moyens de les contester. Le principal récit que les Israéliens
parviennent encore à véhiculer décrit un territoire qui, bien qu’il fût habité,
l’était par des gens qui n’y étaient pas vraiment attachés et dont la présence
était illégitime. Illégitime parce qu’ils sont un peu Bédouins et nomades, si
bien que le territoire n’a guère d’importance à leurs yeux, parce qu’ils sont
violents ou, après le 11-Septembre, parce qu’ils sont musulmans. Israël
ressort sans cesse cette litanie de mots et d’idées: quoi que fassent les
Israéliens, l’opinion qu’on en a n’importe guère, car le camp adverse n’a
rien de légitime à proposer; tout repose sur la bienveillance des Israéliens.
Quand on examine attentivement le langage des négociations de paix qui
ont cours depuis Oslo (et même antérieurement), on constate qu’il y est
toujours question de concessions de la part d’Israël. Des concessions. Si les
Israéliens font des concessions aux Palestiniens, la paix aura des chances de
s’installer. Avec pareille base de négociations, toute réconciliation est
impossible. «J’ai envahi votre demeure, mais je suis assez généreux pour
vous laisser revenir prendre votre canapé avant de vous envoyer vous
installer ailleurs.» Peu propice à la résolution d’un conflit, cette attitude est
presque plus humiliante que l’invasion elle-même.
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es historiens oublient souvent un aspect important
du sionisme, à savoir que ce courant voulait séculariser la société juive. Si
l’on sécularise le judaïsme, on ne peut ensuite invoquer la Bible pour
justifier l’occupation de la Palestine! C’était un drôle d’amalgame, que je
qualifierais de «mouvement issu de gens qui ne croient pas en Dieu, mais à
qui Dieu a néanmoins promis la Palestine». Cette contradiction se trouve
encore au cœur des problèmes internes de la société juive israélienne. Il
importe aussi de comprendre que, même avant Herzl, certaines personnes se
considéraient comme sionistes tout en étant conscientes de la présence de
Palestiniens en Palestine. Elles envisageaient de diverses façons les liens
avec ce territoire et les solutions à l’insécurité des juifs d’Europe. Je pense
par exemple à Ahad Ha’am (Asher Zvi Hirsch Ginsberg de son vrai nom).
Selon lui, on pouvait considérer la Palestine simplement comme un centre
spirituel et, si les juifs ne se sentaient pas en sécurité en Europe, ils
pourraient s’établir sur un autre continent ou dans un pays européen plus
sûr. Mais les sionistes chrétiens, qui existaient déjà à cette époque,
n’entendaient pas les laisser emprunter cette voie, car ils croyaient que le
retour des juifs en Palestine s’inscrivait dans la volonté divine et allait
précipiter la seconde venue du messie. Et ils étaient antisémites. Ils
pourraient donc faire d’une pierre deux coups, car ils se débarrasseraient
aussi des juifs d’Europe. Il importe de se pencher sur cette période pour
comprendre que, en s’unissant à la fin du XIXe siècle, l’impérialisme
britannique, le sionisme chrétien et, bien sûr, le nationalisme juif ont
constitué une force redoutable qui a laissé très peu de chances aux
Palestiniens.
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C’est une société très endoctrinée, sans doute davantage
que ne le sont la plupart des sociétés occidentales et même non
occidentales. Non coercitif mais intensif, l’endoctrinement des Israéliens
s’étend de leur naissance à leur mort. Les détenteurs du pouvoir ne
s’attendent pas à voir certaines personnes rompre avec l’idéologie, car tout
le monde semble baigner dans ce fluide. Dans ses livres, Nurit Peled-
Elhanan compare le processus de rejet du sionisme au cheminement d’une
personne croyante qui deviendrait athée tout en persistant à croire que Dieu
existe peut-être et qu’il pourrait la punir pour son sacrilège. En grandissant,
les Israéliens apprennent à croire que, s’ils osent remettre en cause certaines
vérités incontestables, ils devront se purifier l’esprit en profondeur pour
s’assurer de pouvoir passer à autre chose, sans quoi ils seront à jamais
tourmentés par leurs doutes. Le bourrage de crâne est si puissant! J’ai
toutefois l’impression que la génération des enfants de Nurit, qui est aussi
celle des miens, se démarque de la nôtre: grâce à internet, ils savent plus de
choses que nous en savions à leur âge. Je crois qu’il est devenu plus
difficile pour les dirigeants de ne compter que sur l’endoctrinement, même
s’ils font du bon boulot à cet égard. Il existe en Israël une petite minorité de
jeunes qui contestent le sionisme. J’ose aussi espérer que les gens sont
devenus plus ouverts avec ce qui s’est produit dans le monde arabe. On
aurait pu penser que ces sociétés étaient repliées sur elles-mêmes et qu’elles
ignoraient tout du monde; j’espère que ça va changer. Ma génération était
aussi comme prisonnière d’une bulle; nous ne savions pas qu’il existait
d’autres façons de vivre. Ce fut très difficile pour nous d’en sortir.
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De toute évidence, on ne pourra
appliquer le modèle de l’Afrique du Sud postapartheid à Israël. Autrement
dit, jamais les Israéliens n’accepteront de renoncer à leur idéologie raciste
en échange du maintien de leurs privilèges économiques. C’est impossible.
Chose très étrange, l’apartheid israélien (si on peut l’appeler ainsi) et
l’idéologie raciste qui le sous-tend sont beaucoup plus religieux et
dogmatiques que ne l’était le suprémacisme blanc en Afrique du Sud.
Même si ce dernier avait ses églises et ses propres justifications
théocratiques et religieuses, il visait essentiellement le maintien de
privilèges; une fois ces derniers garantis par le nouveau régime
postapartheid, nombreux sont les Blancs qui ont accepté le changement.
Rien de tel ne pourrait se produire en Israël. Les acteurs du secteur israélien
de la haute technologie, par exemple, ne se laisseront jamais convaincre
qu’ils resteront aussi riches qu’ils le sont aujourd’hui s’ils acceptent de
vivre dans un système plus démocratique. C’est pourquoi on doit voir là un
aspect positif, à moins de ne plus croire du tout en la capacité des jeunes
générations à rêver d’un monde meilleur, et de n’y voir qu’un exemple
frappant, en plein XXIe siècle, d’une situation déplorable, inacceptable,
d’une société ségrégationniste qui ne s’intéresse qu’à cette idéologie
fondamentalement raciste et qui est facilement identifiable comme telle. De
telles différences peuvent avoir une incidence majeure sur l’évolution de la
situation.
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À l’encontre du Grand Israël qui existe déjà, on devrait revendiquer un
changement de régime en menant une campagne fondée sur le principe
d’égalité des droits de la personne et des droits civils, en espérant que
l’évolution du contexte régional et international lui soit favorable. Ce que
fait actuellement la communauté internationale me rappelle cette fameuse
blague juive de l’ivrogne qui, de nuit, cherche au pied d’un lampadaire sa
clé, qu’il sait avoir perdue ailleurs, simplement parce qu’il y voit clair.
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Aussi, deux impulsions contradictoires s’annoncent: les Israéliens
souhaitent maintenir le statu quo et les Palestiniens brûlent d’envie d’en
finir avec celui-ci. Les premiers ont beaucoup à perdre en matière de
privilèges et de pouvoir, et les seconds ont tout à gagner. C’est pourquoi
faire pression sur Israël est essentiel à la paix ou à la réconciliation.
Une autre voie d’avenir pourrait être celle à laquelle Noam faisait
allusion tout à l’heure, qui consisterait en quelque sorte à faire comprendre
aux Israéliens qu’ils se sont enfermés dans une logique suicidaire. En
prenant soin de leur expliquer leur part de responsabilité dans la situation.
Ils érigent des murs, s’arment jusqu’aux dents, et pourtant leur insécurité ne
cesse de grandir. C’est de ce côté qu’on devrait regarder pour éviter de
renoncer à l’idéal utopique d’un avenir sans État et à la mise en place d’une
structure politique capable de mettre fin le plus rapidement possible aux
souffrances des gens sur le terrain.
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Nous devons trouver le juste équilibre entre l’évolution du
débat en Occident (rendue possible par la campagne BDS et les Semaines
contre l’apartheid israélien) et les résultats concrets sur le terrain (à l’aide
de bonnes vieilles tactiques militantes).
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La question qui importe est la
suivante: en attendant un changement fondamental dans la politique
américaine, peut-on gagner de petites batailles contre celle-ci? Existe-t-il
des lacunes dont les militants pourraient tirer parti pour convaincre les
décideurs américains de condamner ou même d’empêcher des atrocités
comme le nettoyage ethnique ininterrompu des Palestiniens du Néguev,
d’Acre ou du Grand Jérusalem?
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