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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
🐄🐖Chronique🐈🐦‍⬛🐶

Le choeur de ferme

Renifle. Presse-toi
De renifler ce qui fait
Corps de ferme
Le soleil a beau décliner
Les animaux n'ont pas fini
Ils n'ont pas fini de parler
D'eux, de vous, du rythme
Le rythme qu'impose la ferme
De la traite à la saillie, du coup
A la caresse trop rare, de la ballade
A la cadence effrénée des agriculteurs
Ils n'ont pas fini d'observer les humains
Et leurs manies déconcertantes
Qui des porcs de la vache de la chienne
Du chat ou de la pie comprendra le mieux
Ce qui détermine ce microcosme singulier
Renifle. Presse-toi de renifler
Ce qui fait corps
Le sang le lait la mort la vie
Le désir la peur la souffrance la maladie
Presse-toi d'appréhender la maternité
Dans tous ses états, dans tous ses émois
Ce qui se donne et se rend dans la filiation
Ce qui se meurt et se transforme dans
Le corps
Presse-toi d'appréhender l'oeil de la bête
Ce qu'il voit ce qu'il sait ce qu'il devine
Ce qu'il conscientise ce qu'il caresse
Expérimente la douceur la violence
La cruauté l'indifférence la peine
Vis de l'intérieur la souffrance animale
Vis de l'intérieur le désespoir le deuil
La séparation l'impuissance la pénurie
Renifle comme ça pue le patriarcat
L'archaïsme le dénuement la barbarie
Presse-toi les mamelles comme elles
pour eux
Mais je te préviens d'avance
Ça ne sera jamais assez
Même à tout donner rien ne va suffire
La productivité l'insatisfaction l'aveuglement
Renifle le drame qui se joue en coulisses
Mets tes narines aux abois
Mais ne dis rien comme eux les taiseux
Ne dis rien du pesant de la silenciation
Des petits os et de la piscine
Crie mais ne dis rien
De toute façon qui écouterait une bête?
Je m'égare peut-être à laisser là
Un choeur de ferme mais
La sensorialité l'a emporté
Et de choeur à coup de coeur
Il n'y a qu'un h aspiré qui voulait
S'exprimer
Le Vivant est toujours vérité
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Roman noir, original.
Les animaux vivent leurs aventures, tandis que les humains vivent leur histoire. Sous les yeux d'une vache, d un chien, d'un chat ou encore une pie, une famille de fermier va et vont à leurs tâches journalière sous les yeux de leur animaux.
Ce qui pour nous semble banal, pour ces compagnons de vie est tout autre.
Le retrait d'un veau à sa mère, la traite animale, la chasse, la vie, la pensée face à l'humain, les secrets...

Agnès de Claireville est une auteure qui nous étonne avec son roman "Corp de ferme." Avec un style différent et une révélation qui peu laisser sans voie.
Étonnant, émouvant et différent.
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Les factures, les maladies, les naissances… C'est beaucoup de tracas, une ferme. Même les bêtes en ont conscience. Et puisque les humains sont si taiseux - “chez nous, on cause pas, c'est comme ça” -, Agnès de Clairville laisse les animaux écouter, voir et raconter.

Chacun leur tour, chacun à leur façon, ils rendent compte des événements de ce corps de ferme. D'abord les porcs, tous en choeur, impossibles à rassasier, toujours affamés. Et puis la vache, qui connaît si peu de choses des humains - “des cris, des avance, des doucement, des voilà.” La chienne, généreuse, loyale quoi qu'il arrive, sensible aux odeurs, attentives à celles, acides, du sang et de la transpiration. le chat, si peu sentimental, presque indifférent - “nous avons nos aventures, les humains ont leurs histoires” -, le seul pourtant à avoir accès à l'intimité humide des chambres à l'étage. Et enfin la pie, elle qui voit plus loin du haut de son peuplier, jusqu'au cimetière.

L'histoire avance grâce à une accumulation de détails, perçus à hauteur de bêtes, sur près de vingt ans. Des détails, anodins ou cauchemardesques, qui méritent toute notre attention. Les gestes brusques du fermier, l'abattage de la moitié du troupeau, la voix douce et épuisée de la fermière, la mort d'un chiot, quelques mots prononcés par un gendarme, le silence besogneux de l'aîné, les sanglots du cadet à peine couverts par le ronron du chat.

Dans ce huis-clos paysan, ce livre-enclos, le lecteur est comme une bête. Domestiqué par la construction du récit, apprivoisé par l'alternance des points de vue, il flaire le drame avant de le comprendre. Pour la chienne qui prend de l'âge, pour les oiseaux à portée de griffes, pour les couvées trop nombreuses.
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Certaines lectures marquent l'esprit et le corps, ce livre-ci en fait partie
Mon immersion dans l'écriture d'Agnes de Clairville a été immédiate, j'ai été happée, comme si un courant fort m'avait entraînée
L'histoire est racontée par les animaux qui gravitent dans et autour de la ferme, le procédé n'avait pas pour objet d'apporter de la distance face à la violence et l'âpreté de cet univers, plutôt de montrer sans l'écrire que l'humain est un animal comme les autres
Personnellement, j'ai tout pris en pleine figure, failli vomir toutes mes tripes à certains passages et été très fortement atteinte par cette histoire de la violence ordinaire, celle de la rudesse de la vie à la ferme et celle, plus sournoise, du silence
J'ai pour autant éprouvé la nécessité de poursuivre ma lecture jusqu'au bout, malgré la solastalgie, malgré la sensation d'effroi, bien m'en a pris car une forme d'apaisement partiel m'y attendait, une sorte d'acceptation du flot de la vie
Corps de ferme écrit un monde, notre monde, sans rien en occulter, la fange de la vie et c'est très fort
Je vous conseille de lire l'excellent article du Monde après le livre pour ne pas vous en divulgâcher toute la trame
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Bestiaire humain
Lisez ce livre déroutant où les bêtes se racontent, racontent la vie et la mort, les jours et les nuits, les saisons, le soleil et le froid, la joie et la douleur, la réalité de la condition animale et humaine dans une ferme, jusqu'à la violence la plus – ou la moins – ordinaire et banale.
Lisez ce livre troublant où les humains n'ont pas la parole, réduits à des existences mécaniques, harassés de besognes quotidiennes, distancés ou vidés de leurs émotions jusqu'au déni, seul rempart d'une réalité insupportable.
Corps de ferme est cet espace rural où les émotions sont tenues à distance, où l'autorité égale la raison du plus fort, où la différence est suspecte, où les maternités finissent cruellement… où les hommes comme les bêtes vivent assimilés à des corps, carcasses, chairs, dépouilles, restes, cadavres.
Seules les bêtes témoignent de ce qu'elles et les humains ressentent.
Corps de ferme est un curieux livre qui ne laisse pas indifférent et qui tombe à pic dans une actualité paysanne bouleversante qui demande justice et bon sens.
Lisez ce livre fort et touchant qui est bien plus qu'un récit sur la vie à la ferme.
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Merci aux éditions Harper collins et à Agnès de Clairville pour l'envoi de ce livre. J'avais adoré la Poupée qui fait oui donc c'était une évidence de me laisser embarquer dans ce nouveau livre. J'avoue que j'ai été très surprise par cette lecture ! Honnêtement je ne m'attendais pas du tout à ça et heureusement car ce que j'ai lu m'a beaucoup plu. J'adore les romans avec plusieurs voix donc en retrouver 3 différentes tout au long du livre était très plaisant. Surtout que chaque animal a sa personnalité et un point de vue différent de l'histoire donc c'est très intéressant de rencontrer ces trois échos pour avoir l'histoire dans sa globalité. J'ai été plusieurs fois surprise au cours de ma lecture, je ne m'attendais pas à un tel tournant avec la maîtresse de maison. de même que je ne m'attendais pas à être autant émue, j'avoue que l'émotion m'a gagné quand il a fallu abréger les souffrances de la chienne, preuve que je me suis bien attachée à elle. Bref, cette lecture m'a prise aux tripes et il m'a été difficile de m'arrêter.
Le livre sort le 10 janvier en libraire donc n'hésitez pas à le lire pour vous plonger dans la vie de cette ferme et de ses animaux.
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Quelles sont les voix qui résonnent dans ce corps de ferme. Il y a la frêle vache pie noir, fraîchement sortie de la "piscine" du ventre de sa mère, très souvent effrayée par ce qui l'entoure et plus encore par la trayeuse électrique.
Il y a la fidèle épagneule, qui cherche avant tout l'assentiment de ses maîtres, fière de se démarquer à la chasse, subissant les saillies régulières.
Le chat tigré, fier et espiègle, il sait se faire discret et ne rate rien des discussions animées de la ferme.
Et puis, il y a la pie, qui prend de la hauteur et observe, veille sur son nid et sans le savoir mettra au jour l'impensable...

L'épée de Damoclès pesant sur la ferme est sur le point de frapper. Sur tous. le fermier aigri, méprisable, acculé par les dettes, la femme mutique qui effleure à peine la vie, refermée sur elle-même, les deux enfants, dont l'un fan de football et l'autre artiste et sensible, verront bien vite leurs rêves oubliés, tout comme leur fraternité.

C'est donc aux animaux qu'Agnès de Clairville prête ici la voix, une immersion totale et réussie au coeur de la vie agricole comme dans la vie sauvage, avec ses obstacles, ses émerveillements, ses désillusions, ses combats. Pétri de phrases courtes et percutantes, une fois entré dans la tourmente et l'animalité, il est difficile de lâcher cette histoire de vie, de mort, d'éveil des sens, tout comme il est passionnant d'explorer les pensées animales et leurs instincts si minutieusement décortiqués ; ces fin observateurs qui subissent beaucoup et font ressortir toute la noirceur de l'âme humaine.
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« Le soir, la femme revient avec l'homme et la chienne, qui reste à la clôture. Pendant qu'elle me caresse le muffle, l'homme emporte mes petits jour et nuit qu'il a attachés à une même corde. En un instant je me retrouve à la clôture, devant la femme qui ne fait plus cas de moi, emmenant mes veaux. Quand je charge, le double fil me brûle la poitrine, un étau monte et me fait chercher de l'air. Il n'y a pas d'air. Il n'y a plus d'air pour moi. Ma plainte monte dans le ciel atone, elle enfle, ne rencontre aucun appui des tantes, seulement les dos de l'homme et de la femme qui s'éloignent avec mes deux petits. »

Corps de ferme, Agnès de Clairville @agnesdeclairville @harpercollinsfrance

Et si la ferme nous était contée par les animaux eux-mêmes, s'ils prenaient la parole pour nous dire leur quotidien, leur ressenti, la vie telle qu'on ne peut l'imaginer dans notre tête d'humain, s'ils nous racontaient les hommes eux-mêmes, leur vie, leurs vicissitudes…

Tout à tour, la vache pie noir fait entendre sa voix, le choeur des porcelets ouvre le récital en un poème retentissant, la chienne épagneule nous livre tant d'anecdotes et d'émotions et le chat tigré nous révèle bien des secrets d'alcôve… la pie n'est pas en reste quand elle apparaît plus tard dans le récit!

« L'aurore perce derrière le rideau de broussailles qui borde le pré des vaches. La porcherie et le poulailler s'éclairent. Les porcs grognent dans leurs rêves remplis de pommes de terre. le cocorico a retenti, mais les poules restent encore dans la chaleur de la paille au lieu d'aller picorer. Il est trop tôt pour attraper un poussin retardataire. Et le bec du coq est trop dur. On s'occupera de ça plus tard. Tout en haut du peuplier qui se dresse au bord du chemin, la vue est imprenable sur les allées et venues. le père a démarré la camionnette. Elle racle et crache son diesel bleu dans le matin frais. »

Agnès de Clairville réussit avec brio cette présentation peu commune. Son talent se déploie dans la mise en lumière des émotions des animaux, de l'âpreté d'une vie de labeur qui est présentée sans fards.

Le texte est rude et traduit bien le côté pénible, tant pour les bêtes que pour les humains.

On serait tenté de dire « âmes sensibles s'abstenir » et pourtant, ce texte puissant mérite d'être découvert, malgré la dureté de certains propos, malgré la souffrance, la douleur, l'incompréhension…

Il y a de la beauté aussi dans cette vie à la ferme, de la lumière, et parfois, un peu de douceur dans certains gestes échangés, certains actes, certains mots aussi…

Un roman peu commun et incroyablement prenant!
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Composition : une vache, une chienne, un chat, la souffrance du monde agricole

Dans quel cas lire ce livre : pour prendre la mesure d'un sujet malheureusement d'actualité et ce, avec une pluralité de voix d'une exquise originalité. Dans ce roman, ce ne sont pas les humains qui racontent leurs histoires, sans doute sont-ils trop taiseux pour n'avoir jamais osé le faire. Ce sont leurs bêtes qui les racontent. Qui disent ces hommes angoissés par les créances, le climat, les épidémies. Pris à la gorge par tout cela et par leurs drames personnels aussi, parfois. de plus en plus souvent. Ces hommes qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes et sur la solidarité des autres, mais seulement des comme eux, ceux qui comprennent parce qu'ils vivent aussi au rythme des traites, des vêlages, des récoltes et de la fatigue qui ne se récupère plus. Faute de trouver du soutien, de l'aide, ils endurent en silence. Alors les animaux prennent le relai et expriment ce qu'ils ressentent et en comprennent.

Effet attendu : être impressionné.e par le rendu unique de l'atmosphère et par la justesse de toutes les petites scènes de vie qui composent ce roman. J'ai été complètement convaincue par ce texte qui m'a bouleversée bien plus que ce à quoi je m'attendais. Je l'ai lu il y a plusieurs semaines et il y a régulièrement des flashs qui me reviennent, des émotions, des questionnements… de là à dire que je ne regarde plus les animaux du même oeil…. Ce roman est formidable pour ça et pour la lumière essentielle qu'il fait sur le milieu agricole.

Contre-indication : déconseillé à ceux qui, trop habitués à leurs baskets, ne sauraient être à l'aise sur pattes, sabots ou coussinets.
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Comme l'a dit une journaliste, avec ce livre, il ne faut pas s'attendre à une version de « Martine à la ferme ».

Loin de l'image d'Epinal, la ferme c'est dur, rude, ça use…

Le poids des traditions.
Les problèmes d'argent.
Le dur labeur quotidien.
L'avenir des enfants.
Et la solitude.

Pas de place pour la tendresse, les mots ou les gestes d'amours. Ni entre humain, ni avec les animaux.

Ils ne sont que des outils de travail, au même titre qu'une trayeuse ou d'un tracteur.
Ils ont leur utilité…. Et quand celle-ci touche à sa fin…

Ce livre est une réflexion émouvante, sensible et sans compromission sur la condition du monde agricole.

C'est un récit dur mais dans lequel surgit, au détour d'une page, un moment de douceur, de poésie…

L'originalité du roman tient au fait que ce sont les animaux qui vont raconter le quotidien de la ferme.

La vache, le veau, le chien, le chat…. Mais aussi une pie et des porcelets…

Un roman poignant qui m'a fait verser bien des larmes.

Un vrai coup de coeur qui m'a fait chavirer






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