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sur 84 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un froid glacial de février. Des rues grises et détrempées. Des quais quasi-déserts que la nuit enveloppe. Au loin, le sifflement du RER, strident.
Marie, une jeune femme, fonce dans le couloir, dévale les escaliers et s'engouffre dans la rame avant que les portes ne se referment. Elle traverse le wagon vide et s'installe près d'une fenêtre vers laquelle sa tête se tourne. Elle ne tarde pas à s'assoupir, bercée par l'écoulement des rails. Que fuit-elle ainsi ? À quoi pense-t-elle, étrangère au monde qui l'entoure ? Alain, une fois installé sur son siège, remarque aussitôt cette jeune femme blonde. Il faut dire que son manteau rouge détonne dans ce paysage tout gris. Un rouge qui lui rappelle la Provence qu'il a quittée. Depuis quelques mois, il vit dans le gris de Paris. Aujourd'hui impatient de retrouver sa fille. Tout plongé qu'il est dans sa grille de sudokus, il ne remarque pas la jeune femme longiligne qui entre, quelques stations plus loin, et s'installe derrière lui. Cigarette retrouve la banlieue, qu'elle a toujours rêvé de quitter, et le café de ses parents. le RER poursuit sa trajectoire et c'est au tour de Chérif, tête enfouie dans sa capuche, de pénétrer dans la rame, l'air inquiet et l'oeil vissé sur son portable. Laura, quand à elle, quitte son bureau plus tôt. Comme tous les mardis. Elle prend le RER pour se rendre à la clinique. Un rendez-vous que son entourage ignore. Elle s'assoit au fond du wagon, suivie de près par Liad, un Israëlien qui a quitté son pays le matin même et qui remarque l'élégance de Laura. Franck pénètre à son tour, engoncé et étriqué dans son pull, râlant intérieurement, obligé d'emprunter le RER depuis qu'il a perdu son permis...

Ils sont sept dans cette rame de métro qui quitte, immuablement, Paris pour rejoindre la banlieue. Une banlieue presque immobile, des rues tristes et désertes, des immeubles haut perchés. Ici et là quelques voitures sous une pluie fine qui glace le coeur et les âmes. Un paysage mat et trouble dans lequel se perdent et se confondent ces sept voyageurs. Marie, Alain, Cigarette, Chérif, Laura, Liad et Franck ne se connaissent pas, ne se sont sûrement jamais croisés. Et pourtant, ils sont là, tous ensemble mais ô combien seuls. Marie qui semble fuir sa vie, Alain qui regrette son passé, Cigarette qui voudrait construire son futur et Chérif qui redoute le sien, Liad qui croit en un avenir meilleur et enfin Franck, étriqué dans son présent. Au fil des stations, du temps qui passe, imperturbable, le profil de chacun se dessine. Des regrets, des désillusions, des erreurs, des rancoeurs, des frustrations ou encore des inquiétudes refont surface. C'est dans ce wagon qui les emmène vers un ailleurs incertain, telle une parenthèse, que chacun repense à sa propre vie. Des vies somme toute ordinaires, faites de lumières et d'ombres. À fleur de peau, Anne Collongues dépeint, avec sensibilité et une justesse, des portraits touchants, profondément intimes et délicats, des moments ordinaires de la vie qui, sous nos yeux, deviennent rares et précieux. Un roman tel un tableau de ces vies que l'on croise sans regarder, de ces êtres que l'on aperçoit à peine et de ces solitudes si ancrées. L'écriture, gracile, presque fragile, insuffle un vent de mélancolie.
Un roman sensible et saisissant.
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A quoi, à qui pense-t-elle, cette toute jeune femme qui semble s'enfouir dans son caban rouge ? Petit Chaperon perdu, la tête appuyée contre la vitre,elle semble somnoler, étrangère aux paysages et à la vie qui passent de l'autre côté. Et cet homme, sanglé derrière sa cravate, asphyxié par son costume et par sa vie trop étroite, de quoi, de qui se méfie-t-il lorsqu'il jette des coups d'oeil hargneux à ce jeune homme accroché à son portable ? Et celui qui se concentre sur des sudokus, quelles images cherche-t-il à effacer ? Et cette femme au regard sans illusion, qu'a-t-elle vécu pour que son visage garde les traces des renoncements et du mépris de soi ? Et cette autre si bien coiffée, si bien habillée, quels secrets inavouables ronge-t-elle en même temps que ses ongles ?.... Sept, ils sont sept dans le compartiment d'un RER qui traverse imperturbablement un soir d'hiver d'une banlieue à l'autre. Leurs corps s'abandonnent les uns près des autres sans que rien les relie hormis des regards furtifs, hormis l'ébauche d'une curiosité vite réfrénée. Alors que le trajet aligne la succession immuable des arrêts, des montées, des descentes, des plages de lumière qui tranchent la nuit, chacun s'enclôt dans ses pensées bercées par le bruit du glissement sur les rails. Chacun se raconte sa propre histoire à rebours du voyage vers une destination mouvante. Des trajectoires inverses en quelque sorte. Tourné vers eux-mêmes leur regard saisit à peine le monde qui les entoure, ces portions de villes et de vies que fend la ligne du train. Derrière les fenêtres, dans les rues, dans les immeubles entraperçus au fil de la course, d'autres existences se nouent et se dénouent dans l'intimité des foyers. Anonymes.
La grâce et le rythme de l'écriture d'Anne Collongues nous convient à ce voyage. Silencieux, attentif, le lecteur s'assoit tour à tour près de Marie, d'Alain, de Franck, de Liad, de Laura, de Cherif et de Christelle et partage avec eux la lente remontée des souvenirs, des évènements qui les ont brutalement "séparés" de ce qu'ils rêvaient d'être. Les souffrances enfouies, les sentiments explosifs, les chagrins inexorables, la mort et la vie se dévident et tracent des chemins biscornus qui aboutissent tous à ce compartiment, sur cette ligne du RER à ce moment précis.
Les récits s'enchaînent l'un à l'autre, s'éloignent, reviennent et s'entrelacent par la magie d'une écriture qui sinue et s'insinue dans le profond des êtres, à l'heure des choix, là où une intersection vient couper la route rectiligne du RER. Une écriture qui nous fait voir, écouter et ressentir aussi bien les flashs colorés des néons qui disparaissent dans la nuit que l'étouffement d'un coeur qui s'effondre.
Maîtrisé de bout en bout, "Ce qui nous sépare" me laisse une empreinte profonde, vivante, le sillon d'une mélancolie lucide et compatissante.
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Que j'en ai pris du temps à lire ce livre qui compte pourtant à peine 125 pages !

Ne vous y trompez pas, c'est parce que j'ai savouré chaque page, chaque ligne, chaque phrase si justement élaborée, chaque tournure si magnifiquement rédigée d'une belle plume délicatement ciselée et souvent poétique. Et je m'en suis délectée.

J'ai aimé découvrir les différents protagonistes au fur et à mesure de leur montée dans le RER où ils cohabitent . La description de leur passé plus ou moins lointain explique leurs failles et leurs fêlures. Tous ces personnages que rien ne rapproche et pourtant intimement liés par le lieu et l'instant.
Les regards qui se croisent furtivement, les suppositions ébauchées sur les partenaires de voyage, les pensées de chacun, tout cela s'entremêle à merveille .
Puis le voyage s'achève pour chacun l'un après l'autre, et donc le livre alors que la vie continue.
A nous lecteur de donner alors libre cours à notre imagination. Il serait difficile de réussir à le faire avec un tel talent.
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Cher livre,
Je t'ai aimé à la première seconde ou je te vis. Je me revois ouvrant l'enveloppe. Je te revois en glissant doucement. Il faut dire que tu es plutôt beau gosse. J'aime ton format étroit et allongé et cette couverture floutée où les couleurs sont un peu poudreuses. C'est que j'en ai fréquenté un certain nombre de tes congénères ces derniers temps qui me séduisirent il faut bien le dire. Mais chacun me laissait un goût d'inachevé. Toi, en lisant les premières lignes, j'ai tout de suite su que tu allais combler ce vide. J'aime le rythme dans lequel tu m'as emportée. Je n'ai pas résisté. Tandis que les sons du RER s'immisçaient dans mon jardin, dans ma chambre, tes mots me percutaient de plein fouet.

Déjà tu t'éloignes, d'autres t'attendent…

Merci aux 68 premières fois pour cette histoire d'amour.

Lien : https://www.facebook.com/Liv..
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Vous ne prendrez plus le RER dans le même état d'esprit…

Un RER qui travers la capitale et glisse vers la banlieue nord-ouest de Paris.
Un soir d'hiver, froid.
Qui n'a jamais fait cette expédition dans sa vie ?
Travailleurs, vacanciers ou juste pour le plaisir, tous ceux qui disposent de ce transport en commun à proximité de chez eux, l'on déjà vécu.
Anne Collongues, dans son premier roman, Ce qui nous sépare, invite le lecteur à partager le voyage durant quelques stations de RER, de sept passagers réunies par le hasard e la vie, dans un même wagon.
Liad prend pour la première fois un RER, il vient tout juste d'arriver d'Israël.
Cigarette est venue aider ses parents dans le bar PMU de son enfance.
Quand à Laura, elle accomplie comme chaque semaine sa visite à la clinique.

Sept personnages, hétéroclites, sept personnages banals en apparence, qui ressemblent à ceux que vous croise !
Chacun est dans sa bulle, pensant à sa vie, ce qui l'attend en descendant du RER ou à son passé.

Le lecteur découvre les personnages qui se dévoilent au fils des pages.
Avec son écriture fluide et légère, l'auteur sait capter son lecteur dans un roman qui décrit la vie de personnages banals.
Peu à peu les différences se réduisent et ce qui au début séparait les personnages va les réunir sans pour autant qu'il ne fasse connaissance.

Un roman qui démontre bien la réalité de notre civilisation. Tous différent mais unis par nos sentiments humains auxquels personne ne peut échapper.

Un premier roman très réussi, qui saura captiver son lecteur jusqu'à la fin.
Une plume envoutante qu'il faut absolument découvrir et qui est promise à un brillant avenir.

Ce qui nous sépare, d'Anne Collongues, éditions Actes Sud, mars 2016, 169 pages.

Ma note : 19/20

Lien : http://livresdeblogue.blogsp..
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Tout nous éloigne et pourtant tellement de choses nous rapprochent.
Une rame de RER.
Quelques passagers.
Un moment d'intimité partagé.
Des regards.

Des pensées.
Oui c est bien cela. Tous pensent.
Ils pensent à leur vie.
Ils pensent à ce qui les attends.
Ils pensent à ce qu ils ont fait.
Ils réfléchissent.
Ils espèrent.
Ils ont peur.
Ils sont seuls... seuls avec leurs pensées.
Leurs soucis.
Leurs envies.
Leurs craintes.

L une fuie sa vie et cet enfant qui ne fait que pleurer et son compagnon avec tout à changé.
Une autre rejoint cet amant caché qui est dans le coma par sa faute.
Lui va rejoindre une personne qui lui est chère alors qu il a tout perdu.
Elle prend une grande décision après plus de 20 ans.
Celui là à peur parce que qu il a fait est mal et que la famille s est sacré.
L étranger arrive enfin à Paris. Il est tellement différent des autres et il a choisi cette destination alors que tout rêvent de s amuser.
Ce dernier est à bout. Et désormais il y a la perruche...

Leurs vies vont se confondre le temps d un roman. On s immerge dans leurs esprits. On les comprends. On se dit que nous aussi on a nos soucis. Ils ont tous en commun cette destination qui n est autre que leur vie... pour certains elle va changer. Pour d autres elle va continuer comme elle était. Peut être la fin du voyage pour elle ?

Un livre prenant. Des personnages attachants. Un boit de vie que nous vivons tous. Ça aurait pu être nous dans cette rame de RER. Ça pourrait être nous...
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LIVRE MAGNIFIQUE :
histoires de 7 personnages ensemble dans un wagon du RER. Ils ne se connaissent pas, ne se parlent pas.
Anne Collongues nous entraine dans chacune des vies, sans transition, sans répit, d'une écriture maitrisée. Je n'ai pas pu quitter ce livre, emportée par chacune des histoires. Cette solitude "partagée", m'a secouée et je ne verrai plus de la même façon mes "voisins" dans le RER.
Je le recommande.
Anne j'attends avec impatience votre prochain roman.
Déjà addict !!!!
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Depuis plusieurs dizaines d'années, je prends quotidiennement les transports en commun. Je me demande régulièrement qui sont ces gens avec qui je partage ce voyage. Avec Ce qui nous sépare, Anne Collongues m'offre un cadeau sur mesure. J'ai adoré ce livre du premier au dernier mot.

Ce qui nous sépare nous présente une heure de voyage en RER et décortique l'âme de chacun des passagers. On ne sera pas grand chose de chacun d'eux, juste assez pour s'émouvoir et pour désirer en savoir plus. Ce sont des moments de vie souvent sans début et sans fin. Ils partagent les pensées, les questions qui les traversent dans les quelques minutes durant lesquelles ils se laissent transporter. Des tranches de vie qui se mêlent, se répondent relatées avec beaucoup de délicatesse. Des histoires différentes qui pourtant les rapprochent dans la solitude et qui est pour chacun d'eux un changement radical, un moment décisif.

Ce qui nous sépare est un roman profondément humain et réaliste, j'ai adoré m'asseoir sur ce siège défraîchi dans cette soirée d'hiver et partager avec ces sept personnages un moment unique. J'en ressors extrêmement émue et un brin mélancolique mais avec l'impression géniale d'avoir fait un très beau voyage.
Lien : https://mesexperiencesautour..
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On a tous vécu ces longs trajets en métro ou on est enfermés dans ses pensées, ses problèmes et on remarque à peine les autres passagers. Voici ce qui nous est raconté ici, ces 40 mn de trajets où les vies s'entrecroisent sans jamais rentrer en contact. le style est superbe, la psychologie fine. Je me suis régalée.
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Sept histoires qui s'entremêlent pour n'en faire au final qu'une seule, au gré des stations et d'un voyage effectué en RER, voici ce que nous propose le premier roman d'Anne Collongues.

Servies par une écriture (déjà) maîtrisée et métaphorique à souhait (je ne suis pas étonnée qu'elle ait été publiée chez Actes Sud), ces bribes de vies faites d'illusions, de rêves, d'espoirs, de solitudes marquent de leurs empreintes psychologiques ces pages dont les rames sinueuses engendrent des tournants singuliers dans chacune des normalités décrites.

Ce qui sépare est parfois ce qui rassemble…

J'ai simplement envie de vous dire ceci : laissez vous embarquer !

Et pour tous ceux qui prennent quotidiennement les transports : ce livre va vous faire les apprécier.
Lien : https://arthemiss.com/ce-qui..
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