ISABELLE
Nous donnons bien souvent de divers noms aux choses,
Des épines pour moi, vous les nommez des roses,
Ce que vous appelez service, affection,
Je l'appelle supplice et persécution.
Chacun dans sa croyance également s'obstine,
Vous pensez m'obliger d'un feu qui m'assassine,
Et la même action à votre sentiment
Mérite récompense, au mien un châtiment.
Je vous aime Madame, et mon fidèle amour
Depuis qu'on l'a vu naître a crû de jour en jour ;
Te faut-il de ma flamme un plus grand témoignage ?
Crois que je suis sans feinte à toi jusqu'à la mort.
Et j'entrevois quelqu'un. Est-ce toi mon souci ?
Ma chère âme, est-ce vous ? surprises adorables !
Son destin et le mien prennent un même cours,
Et je mourrais du coup qui trancherait ses jours.
CLINDOR, en prison.
Aimables souvenirs de mes chères délices
Qu'on va bientôt changer en d'infâmes supplices,
Que, malgré les horreurs de ce mortel effroi,
Vous avez de douceurs et de charmes pour moi !
Que même tes dédains me semblent gracieux !
Je suis dans la misère, et tu n'as point de bien ;
Un rien s'assemble mal avec un autre rien.
LYSE
Mon visage est ainsi malheureux en attraits :
D'autres charment de loin, le mien fait peur de près.