AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,78

sur 47 notes
5
4 avis
4
2 avis
3
4 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Transcription de Radio WXRT,
Chicago, 1er janvier 1999 :

« Nous venons de recevoir une information consternante : le guitariste et chanteur Owen Noone du groupe « Owen Noone & Marauder » vient de s'écrouler sur scène alors qu'il donnait ce soir un concert à Los Angeles. »

C'est par cet incipit en forme de communiqué laconique que commence « Owen Noone & Marauder » de Douglas Cowie.

Les premières lignes du roman nous ramènent en 1995. le narrateur, qui deviendra bientôt le Maraudeur, étudie l'anglais dans une université de l'Illinois. Introverti, discret, timoré, il rencontre Owen Noone qui interprète a capella « Sweet Child O'Mine » des Guns N' Roses dans un bar étudiant. Une interprétation aussi catastrophique qu'enthousiaste qui marque le début d'une amitié indéfectible. Grand, bien bâti, les cheveux blonds, Owen est l'antithèse du narrateur : extraverti, charismatique, intrépide. Il n'est pas étudiant mais joueur de baseball professionnel dans une ligue mineure.

De but en blanc, Owen propose de fonder un groupe de rock. Aucun des deux compères ne sait chanter, ni jouer du moindre instrument mais qu'à cela ne tienne. Noone a de l'argent, et ni une, ni deux, les deux complices s'achètent deux Telecaster (la guitare mythique de Keith Richards) flambant neuves, un ampli et des pédales d'effet. Prenant conscience qu'ils ne disposent pas de répertoire, les apprenti-rockeurs vont se plonger dans la bible du folk, le recueil de standards compilés par Alan Lomax, « The Penguin Book of American Folk Songs ».

Après un concert prometteur dans le bar étudiant où ils se sont rencontrés, les deux rockeurs en herbe se laissent un peu de temps. le temps pour Maraudeur de terminer sa licence d'anglais et pour Owen d'en finir définitivement avec le baseball. le retour d'Owen dans l'Illinois marque le début de la grande aventure. Au grand dam de ses parents, le narrateur abandonne le boulot qui l'attend chez Caterpillar, et accepte la proposition de son ami : partir à l'aventure et donner à leur groupe « Owen Noone & Marauder » une chance de percer.

La formule est aussi simple que décapante. Pas de section rythmique, ni basse, ni batterie. Seulement deux guitares électriques, une pédale fuzz, et un improbable répertoire folk intégralement issu du recueil d'Alan Lomax. Un chanteur-guitariste (Owen) qui chante faux mais n'a peur de rien, un second guitariste (Maraudeur), qui surmonte son trac en buvant quelques bières. Deux passionnés qui bossent comme des fous pour réinventer une douzaine de standard folk, dans un style insolite mêlant punk et indie rock. La formule rodée sur « Yankee Doodle », un chant traditionnel de la fin du XIXème siècle, est simple. Des couplets chantés sur un tempo plutôt calme où Marauder distille quelques arpèges, et un refrain hurlé par Noone qui envoie les watts en jouant de la pédale fuzz. Un son incandescent. de l'énergie à l'état pur. Un mur sonore mêlant les rugissements d'un chanteur habité et les distorsions de deux guitaristes en fusion. Une déferlante qui emporte tout sur son passage. Un public en transe qui reprend à l'unisson le refrain de « Yankee Doodle » :

« Yankee Doodle, keep it up
Yankee Doodle Dandy
Mind the music and the step
And with the girls, be handy.»

« Owen Noone & Maraudeur » nous narre la trajectoire fulgurante d'un duo touché par la grâce. En brutalisant des classiques folk tels que « John Henry » ou « Careless Love », les deux musiciens retrouvent la pureté originelle du rock'n roll. Sauvages, libres, indomptés, les deux rockeurs raniment la flamme éteinte d'une musique vivante et éternelle.

Au cours de leur interminable odyssée à travers l'Amérique, Owen et Maraudeur vont affronter des labels assoiffés de profits, des managers véreux, et une presse people qui frappe sous la ceinture. Ils vont découvrir l'univers corrompu de l'industrie musicale, dont le seul et unique horizon est le billet vert.

Toute l'originalité de Douglas Cowie est de délaisser les tropes du « rock'n roll circus ». Les deux héros ne se droguent pas, n'additionnent pas les conquêtes d'un soir, ne fracassent pas leur guitare sur scène, ne se jettent pas dans une foule en délire. La musique, rien que la musique. Tel est le mantra du roman. Un mantra qui lui confère une intégrité rare, une fraîcheur presque enfantine.

Et pourtant. « Owen Noone & Marauder » n'est pas qu'un ouvrage musical pour happy few. C'est aussi un roman initiatique qui explore le passage à l'âge adulte, ce moment où nos illusions se fracassent contre le réel et aborde avec un regard touchant l'amitié, l'amour et la filiation.

« It 's better to burn out than to fade away » - Neil Young (Hey, Hey, My, My)

Cette phrase clôt la lettre de suicide de Kurt Cobain, le chanteur de Nirvana, dont l'ombre tutélaire plane sur le roman, tout comme celle de John Lennon, de Bob Dylan, ou de Buddy Holly. Tous ces artistes ont eu un jour le même rêve qu'Owen Noone et Marauder, jouer une musique indomptée, s'affranchir des codes d'une société hypocrite et corsetée, refuser de perdre sa vie en la gagnant.

C'est finalement le petit miracle réalisé par ce premier roman d'un jeune auteur de vingt-sept ans, nous rappeler que ce rêve nous l'avons tous partagé, et qu'il porte un nom : liberté.

Commenter  J’apprécie          6522
Le plus beau roman sur l'amitié qu'il m'ait été donné de lire. Terminer ce livre est un déchirement tant on s'est attaché à ses personnages.
Commenter  J’apprécie          30
Naissance et gloire, en 1995, du plus beau et plus improbable groupe fictif d'indie rock américain.

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2016/10/30/je-me-souviens-de-owen-noone-et-marauder-douglas-cowie/
Lien : http://charybde2.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          20
Quand deux jeunes se rencontrent dans un bar et décident de former un groupe de rock. Ça ressemble à un rêve, et eux l'ont fait: réussir dans la musique, à partir de rien, armés de leur naïveté et de leur envie de partager la musique et sa passion.
Tout ça donne un roman beau, plein de vitalité, et une lecture qui laisse un super souvenir !
Commenter  J’apprécie          20

Lecteurs (81) Voir plus



Quiz Voir plus

Arts et littérature ...

Quelle romancière publie "Les Hauts de Hurle-vent" en 1847 ?

Charlotte Brontë
Anne Brontë
Emily Brontë

16 questions
1085 lecteurs ont répondu
Thèmes : culture générale , littérature , art , musique , peinture , cinemaCréer un quiz sur ce livre

{* *}