Citations sur Une si longue haine (50)
Elle avait fait de son mieux pour maintenir la cohésion familiale pendant toutes ces années, mais elle ne mourrait pas sans avoir réglé quelques comptes.
Des instantanés de ses années de mariage lui revenaient : la première fois qu’ils avaient fait l’amour, quand le prêtre les avait déclarés mari et femme, Nicolas avec Annaëlle poussant ses premiers cris dans ses bras. Tous ces moments où elle avait cru vaincre ses démons.
On ne peut pas changer notre histoire, répondit Martin, elle est inscrite en nous, mieux vaut sans doute l’affronter avec lucidité.
Retrouver les lieux de son enfance, braver des souvenirs tapis dans sa mémoire comme des bêtes malfaisantes… Si elle cédait à la requête de Louise, Charlotte savait qu’elle s’infligeait une épreuve dont elle ne sortirait pas indemne.
Ils avaient appris à travailler en parfaite symbiose, mais Charlotte, toujours si distante, si prudente avec les hommes, avait gardé une certaine réserve vis-à-vis de Martin. Il avait fallu du temps avant que leur collaboration ne se mue en amitié, puis en réelle affection.
La douceur s’éteignit sur le visage de Charlotte pour laisser la place à une profonde tristesse. Martin s’aperçut qu’il venait de toucher un point sensible et respecta son silence. Elle se résolut à raconter le remariage de son père, l’arrivée de Nicole et de son fils Cédric, de quatre ans plus âgé qu’elle.
Le destin lui avait offert l’amour, le lui avait repris et elle l’avait donné sans réserve aux enfants de sa cousine. Émue, Charlotte reprit la lecture de la lettre. Louise formulait son souhait, une requête désespérée :Reviens, Charlotte, je mesure l’étendue du sacrifice que je te demande, mais je t’en prie, fais-le pour moi ! Reviens juste quelques jours, je ne veux pas mourir sans t’embrasser une dernière fois.
Certains pourraient voir dans mon existence une tragédie… mais rencontrer Henri, vivre avec lui, même si peu de temps, m’a comblée de bonheur. Et je me suis occupée de la famille, de toi, ma Charlotte. La seule vraie tragédie, c’est toi qui l’as vécue…
Un jour, les différences pour lesquelles ils s’étaient aimés ne furent plus que des différences. Leur union s’était terminée dans la peine, et depuis, elle menait l’existence qu’elle avait choisie, essentiellement consacrée à sa fille et à son travail.
Elle manquait tellement d’assurance, de confiance en elle. Nicolas s’était révélé un homme adorable, disponible et attentionné. Sa gentillesse avait vaincu toutes les défenses de Charlotte qui avait cédé au bonheur d’une relation stable, surprise de s’en remettre à un homme pour la première fois.