Cristina Campo (1923-1977) par Cécile Guilbert
(...) elle apprend à déchiffrer le motif caché du tapis, sa métaphore favorite pour désigner le destin, et notamment le sien: une petite fille handicapée par un coeur malade qui comprend vite que l'infortune se transmute en bonne fortune et la malédiction en élection puisque toute épreuve peut être transformée en chemin initiatique. (p. 253)
Au rebours d'une conception de la liberté envisagée par l'individu moderne comme l'infinité de ses possibilités d'être et d'agir dans un monde accueillant tout et n'importe quoi, à ce tourbillon, à ce vertige, Campo oppose la nécessité de savoir reconnaître son chemin de vie, sa vocation "Pour chaque homme en son périple, écrit-elle, il existe un thème, une mélodie qui est sienne et n'est destinée à nul autre, qui le cherche depuis sa naissance, depuis l'aurore avant les siècles..." Discerner le son de cette flûte, toujours subtil, couvert par le brouhaha des voix mondaines et le vacarme social n'implique que de se rendre attentif à ce qui murmure depuis notre naissance à l'oreille de notre désir, nous appelle, revient en signes, mystères, prémonitions, appels, énoncés de figures secrètes -"annonciations voilées" dit-elle que nous devons apprendre à décrypter, désignant alors rien moins que ce qui nous est originel, et donc destinal. p254