Qu'on fasse selon sa volonté ne signifie pas toujours qu'on le désire vraiment. On fait des tas de trucs, on prend des décisions avec trop de hâte, et après on le regrette, parce que, en définitive, ce n'était pas ce qu'on souhaitait intimement. Il y a des décisions plus ou moins promises au regret. Il y a des vies ainsi qui virent à l'amer.
A s'envelopper autour de soi pour se cacher qu'on est blessé, on finit par s'emprisonner dans ses propres épaisseurs, paniqué de plus être découvert...
- Je me souviens quand je brassais les os à Bordeaux.Tu trouves de tout dans les cercueils. Des mecs, là-bas, s'enterrent avec des bouteilles de vin, rien que des grands crus. Grands crus.
- Et alors?
- Alors tu peux toujours fouiller dans leurs poches, c'est rare qu'y pensent au tire-bouchon. Curieux, non?
- Curieux...
- Alors, avec mon pote, on leur rendait service, aux mecs. J'ai appris un truc, gamin.
- Quoi donc?
- Les morts, ça boit pas!
Les femmes vous tendent parfois ce genre de piège. Elles aiment que vous leur expliquiez le pourquoi du comment. Vous n'en ressentez pas forcément la nécessité. L'explication ajoutera à la confusion. Déjà que ce n'est pas très clair dans votre tête. Mais vous vous y appliquez. Elles vous écoutent puis ne peuvent s'empêcher de vous démontrer que vous êtes dans l'erreur. Comme si ça ne leur suffisait pas de voir vos couilles, il faut aussi qu'elles vous les cassent.
Elle réfléchit. Posez un problème à une bibliothécaire et elle se pliera en huit pour le résoudre, avec toujours la gentillesse et la passion qui caractérise sa profession.
( p 151)
- L'effet nitrate d'ammonium ! plaisanta-t-il encore. On en pris tous un sacré coup sur le citron pas vrai? Je sais pas toi, mais moi, parfois ça revient, un vrai cauchemar, même un an après...
- A plus forte raison parce que ça fera bientôt un an... Tu n'as pas remarqué dans la rue, tous ces gens qui marchent l'échine courbée, ou qui sursaute dès qu'ils entendent une porte claquer ?
( p 106)
( Toulouse)
Les difficultés de la vie aboutissent à une forme particulière de mélancolie qui cristallise ensuite en un ensemble de gestes, de regards, de désastres.
Jim Harrison