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Critique de VincentGloeckler


Depuis Pura Vida, Patrick Deville mène une aventure romanesque particulièrement originale, chacun des récits de ce qu'il appelle « le projet Abracadabra » étant consacré à l'exploration personnelle (le narrateur, ici, acteur et témoin, est clairement, à chaque fois l'auteur), géographique et culturelle, d'une partie, plus ou moins vaste du monde, mêlant avec brio, l'évocation de ses rencontres, des anecdotes souvent plaisantes, des plongées dans l'histoire et la lecture d'autres grands explorateurs ou écrivains, et, parfois, des prises de position politiques. Et on aime le suivre sur le fleuve de ces divagations, au fil de l'eau comme au fil des associations d'idées, de fulgurances pleines de fantaisie mais toujours pertinentes… Dans Amazonia, il nous invite à une traversée du sous-continent latino-américain, de Belém aux îles Galápagos, le long du géant Amazone, puis à travers la cordillère des Andes et les vagues du Pacifique. Nous découvrons sous son regard et celui de son fils qui l'accompagne des lieux mythiques, Manaus, Iquitos, Guayaquil, en même temps qu'il retrace l'histoire de la découverte par les européens de cette partie du monde, une découverte devenant rapidement, selon le même processus qu'il avait décrit pour l'Afrique congolaise dans Equatoria, une colonisation et une exploitation, l'attrait de l'or et des richesses végétales aidant. Et de convoquer quelques héros, natifs ou de passages, de la légende locale, Aguirre, Fitzgerald, Humboldt et, bien sûr, Bolivar, mais aussi ses compagnons de plume, quelques grandes voix de la littérature, Cendrars, Montaigne ou Borges… Pourtant, si ce roman évoque avec force tous les bienfaits pour l'humanité de la nature amazonienne et la nécessité, aujourd'hui urgente (la coïncidence des incendies récents au Brésil ou en Bolivie, les informations sur les ravages de la déforestation ne peuvent que donner plus de force à ce réquisitoire) de la protéger, il perd un peu du charme des précédents récits (déjà Taba-Taba, l'avant-dernier, nous avait un peu agacé à cause du même défaut, et le petit essai qui paraît en même temps qu'Amazonia, L'étrange fraternité des lecteurs solitaires, pâtit de semblable égocentrisme), à cause d'une trop grande importance donnée à la personne de l'écrivain et, ici, de ses rapports avec son fils ou sa compagne. On a envie de dire à l'auteur, pour qu'il ne finisse pas par mal vieillir, eh, Patrick, efface-toi un peu, n'avance pas autant sur la scène, tu caches, tu gâches le décor…
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