Citations sur Les enfants de Venise (123)
Le chariot des ordures,le" char à merde" ,comme on l'appelait dans le quartier de l'angelo, passait une fois par semaine,le lundi.
Ce lundi-là, après cinq jours de pluie ininterrompue ,il peinait à avancer dans l'espace étroit du dico della Pescheria,et par moment,les moyeux des roues frottaientre contre les murs des maisons .Les cinq forçats enchaînés aux brancards,de la boue jusqu'aux chevilles,ahanaient pour tirer les roues hors des trous où elles s'embourbaient.
" Je ne veux plus jamais t'entendre dire une bêtise pareille. Devenir riche, ça ne veut rien dire. Tu dois vouloir quelque chose qui nourrit le cœur. Ou tu mourras à l'intérieur. "
"On te dit que tu as les lèvres de ta grand-mère et les yeux de ton grand-père. Tu es une partie de quelque chose. Tu le sais parce que tu as leurs mains, leurs yeux, leurs lèvres, leurs cheveux... même un petit défaut dans la manière de parler te dira que tu es l'une des leurs." Mercurio s'arrêta un instant. "Moi, je n'ai jamais su si j'avais les mains de mon père ou de ma mère. C'est peut-être pour cette raison-là que je ne comprends pas pourquoi c'est important d'être juif ou chrétien... Parce que moi, je ne fais partie de rien. Je te demande pardon."
Devant l’abbaye de Santa Maria della Misericordia, la puanteur de vin aigre fut remplacée par l’odeur, plus subtile mais tout aussi dérangeante, de chair gâtée et de mort qu’exhalaient les malades et les blessés qui attendaient sur les marches de l’hospice.
Isacco s’interrogeait sur l’évolution de la maladie qui affligeait les prostituées. C’était un véritable châtiment. Le nombre de femmes infectées croissait de jour en jour. Il soignait plus de quarante malades, mais combien étaient-elles en réalité ?
La vie est simple. Quand elle devient compliquée, ça veut dire qu’on se trompe quelque part. Ne l’oublie jamais. Si la vie devient compliquée, c’est parce que c’est nous qui la compliquons. Le bonheur et la souffrance, le désespoir et l’amour sont simples. Il n’y a rien de difficile. Tu te le rappelleras ?
Je ne veux plus jamais t'entendre dire une bêtise pareille. Devenir riche, ça ne veut rien dire. Tu dois vouloir quelquechose qui nourrit le coeur. Ou tu mourras à l'intérieur.
"Les rêves ne se mesurent pas. Ils ne sont ni grands ni petits."
Mercurio avala une cuillerée de soupe sans regarder Anna.
"Les hommes qui se fixent un but facile, poursuivit Anna comme dans une réflexion intérieure, l'atteignent vite. Arrivés là, ils s'assoient... et ils meurent : ils restent là, sans bouger, pendant toute leur ennuyeuse vie."
Mercurio sentait la pression, la lutte interne. Il n’était pas habitué à parler de ses sentiments. Il ne savait pas par où commencer. Pour la première fois de sa vie, il ne voulait pas perdre la bataille. Il voulait sortir de sa coquille. « Maintenant…, dit-il tout bas, maintenant… » Il sentit que ses yeux se remplissaient de larmes de rage. Il pensa qu’il était stupide. Il savait parfaitement quoi répondre à cette question. Il le savait au plus profond de son âme, au plus vrai de son cœur. Mais il n’arrivait pas à le dire.
Affaires, négociations, marchandises, échanges commerciaux, tout passait par là, des plus petites choses jusqu’aux grandes expéditions en Orient. Pas de meilleur terrain d’action pour un voleur que cet immense marché. Chaque jour, des centaines de personnes se pressaient dans ce dédale de ruelles, de campi et de sotoporteghi. Pour vendre, acheter, manigancer, monter des projets. Et bien sûr voler. N’importe quoi. Dans ce petit quadrilatère où se concentrait toute une humanité, la grande richesse côtoyait la misère la plus noire, mendiants et marchands écrasés dans la même foule. Voix, odeurs, humeurs, tout s’y mélangeait.
Mercurio n’avait jamais vu de ville aussi bizarre. « Il y a trop d’eau », dit-il, mal à l’aise. Mais petit à petit il se laissa gagner par la magie de cet endroit unique, de ces ruelles remplies de gens qui s’affairaient, de boutiques, de marchés, d’étals.
Il voulut d’abord monter sur le pont du Rialto, un pont majestueux fait de deux rampes de mélèze et d’une machinerie extraordinaire qui les relevait au passage des plus grandes galères : tout un système de poulies et d’engrenages laissait filer des câbles et le pont s’ouvrait en grinçant. C’était inouï : on aurait dit de la prestidigitation.